La journée du lundi 14 mai est à marquer d'une pierre blanche. Pour la première fois, un chef du gouvernement se prête à l'exercice du grand oral en vertu de l'article 100 de la nouvelle Constitution qui stipule qu'une séance par mois est réservée aux questions de politique générale et aux réponses y afférentes données par le chef du gouvernement et présentées devant la Chambre concernée dans les trente jours suivant la date de leur transmission au chef du gouvernement. Ceci veut dire que l'exercice d'avant-hier lundi devant la Chambre des Représentants sera réédité le mardi 22 mai devant la Chambre des conseillers. Et ce sera ainsi tous les mois, ce qui n'est pas de tout repos pour le chef du gouvernement qui aura ainsi à rendre compte de l'action de son équipe de façon régulière. La démarche, certes contraignante, est un grand plus en matière de contrôle de l'Exécutif par le Parlement. Les questions orales adressées avant-hier à M. Benkirane par les groupes parlementaires de la majorité, comme de l'opposition, sur une base égalitaire en matière de temps alloué aux deux parties, ont porté sur des dossiers d'actualité, à savoir l'agenda législatif, la lutte contre l'économie de rente, la promotion de la bonne gouvernance et l'emploi. Le chef de l'Exécutif, puisant dans le style propre à lui, a tenté de mettre la lumière sur l'action comme sur les intentions du gouvernement concernant ces volets. Il en ressort, par exemple, que le gouvernement «est soucieux de la mise en oeuvre démocratique et participative des dispositions constitutionnelles» et que l'élaborarion des textes y afférents requiert «une mobilisation exceptionnelle» de la part du gouvernement et du Parlement. Il a, à cet égard, appelé à la conjugaison des efforts pour hâter et rationaliser l'action législative et à des «efforts sincères» afin de réaliser cet important chantier durant l'actuelle législature. Le gouvernement a consacré une bonne part de son programme à la modernisation de l'arsenal juridique, a-t-il ajouté, relevant que ces textes concernent, à titre d'exemple, la consécration de l'amazigh comme langue officielle, l'organisation des travaux du gouvernement, le droit de grève et la Cour constitutionnelle. D'autre part, il a fait remarquer que son cabinet ne considère pas les partis de l'opposition «comme des adversaires, mais plutôt comme des rivaux avec lesquels il doit composer pour l'intérêt général et la réalisation des attentes rationnelles des citoyens «qu'on peut satisfaire en l'espace de quatre mois et demi», en référence à l'âge du premier gouvernement issue de la révision constitutionnelle de juillet dernier. Le gouvernement se comporte de manière positive et accomplira des démarches bénéfiques à tous, a-t-il insisté, soulignant que «l'Etat oeuvre aujourd'hui pour le bien du citoyen». M. Benkirane n'a pas manqué de rappeler le moment historique que vit le Maroc depuis le discours royal du 9 mars 2011 annonçant la révision constitutionnelle, qui a renforcé les attributions du gouvernement et appuyé le principe de reddition des comptes. Au sujet de l'économie de rente, M. Benkirane a considéré qu'elle doit être combattue «selon une approche participative». «Nous devrons aller de l'avant dans la lutte contre l'économie de rente, dans le respect de la loi et dans le cadre du compromis politique», a-t-il souligné, estimant que cette lutte sera «de longue haleine». Tout en reconnaissant l'existence d'un nombre d'obstacles devant cet objectif, M. Benkirane a expliqué que des raisons économiques et politiques ont été à l'origine de l'encouragement de la rente (agréments et autres). Le gouvernement a, cependant, réalisé certains acquis à cet effet, notamment l'activation des recommandations des organismes de contrôle, l'amélioration de la gouvernance des établissements et la récupération de certaines terres de la Sodea et de la Sogeta, dont les exploitants n'ont pas respecté les cahiers des charges. Au volet emploi, le ton est plutôt différent. Le chef de gouvernement a tout bonnement déclaré qu'»il est impossible de mettre en œuvre» le Procès verbal du 20 juillet signé avec les coordinations des diplômés au chômage, arguant que ses dispositions sont «anticonstitutionnelles et non conformes au statut de la fonction publique». «Le recrutement dans la fonction publique sera effectué sur la base de la méritocratie», a souligné M. Benkirane. A cet effet, a-t-il assuré, l'exécutif prendra des mesures pour garantir l'égalité des chances en matière d'accès à l'emploi, en veillant sur la transparence dans l'annonce de postes d'emploi et à ce que la procédure d'organisation des concours soit appliquée. Selon le chef du gouvernement, la réflexion sera focalisée sur les démarches et moyens à mettre en oeuvre pour encourager l'auto-emploi des jeunes et permettre aux personnes à besoins spécifiques de bénéficier du quota qui leur est réservé. M. Benkirane a rappelé que le Conseil économique et social (CES) a présenté une batterie de propositions pour l'emploi des jeunes par voie notamment de concours organisés conjointement par les départements, mettant en relief la place centrale de l'entreprise dans ce cadre. La question de l'emploi figure parmi les priorités du gouvernement conformément au texte de la Constitution, a relevé le chef de l'exécutif, qui a appelé le Parlement à faire des propositions dans le sens de la promotion de l'emploi et plaidé pour la mobilisation de toutes les parties en vue de résoudre cette problématique. Le gouvernement, a-t-il dit, oeuvre activement à développer le système d'intermédiation dans le domaine de l'embauche.