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Entretien avec Pr. Abdelatif Fekkak, Docteur en Sciences de Gestion, en Sociologie Politique et en Sciences Economiques La nouvelle Constitution, un véritable tremplin pour l'ensemble des Marocains
Dans le cadre de la mobilisation des Marocains du Monde après le vote de la Constitution, le Mouvement Nouvel Elan d'Allemagne, a organisé un colloque sur l'évaluation de la politique migratoire marocaine. Dans cette optique, nous avons fait le tour de certaines problématiques des MDM avec M. Fekkak, membre fondateur du mouvement. Une réflexion sur la place des citoyens marocains du monde dans la nouvelle Constitution, leurs rôles dans ce nouveau cadre, leurs aspirations, leurs revendications L'Opinion: Dans quel contexte a été crée le mouvement et quel en est l'objectif ? Pr. Abdelatif Fekkak : Bien que le mouvement ait été crée il y a 7 mois, il concrétise une demande d'une dizaine d'années, depuis 2002, date où M. Charchira avait écrit un certain nombre d'ouvrages sur la politique migratoire. Le Conseil de la Communauté Marocaine à l'Etranger n'existait pas alors. Et dans le CORCAS, constitué le 6 novembre après le discours Royal, les marocains de l'étranger n'y figuraient pas. Le discours Royal du 9 mars donne le lancement et cadre la nouvelle Constitution, un véritable tremplin pour l'ensemble des marocains. Ces derniers peuvent ainsi apporter leur pierre à l'édifice, au développement et à l'édification d'un Etat de droit. Un Etat où il n'y a plus de népotisme, de clientélisme politique et de régionalisme, mais un Etat de la méritocratie où la démocratie donne les chances à tous les marocains dans un cadre légal et constitutionnel. L'Opinion: Qu'est ce que vous pensez des articles de la Constitution se référant aux marocains du monde ? Pr. Abdelatif Fekkak : La nouvelle Constitution réhabilite l'ensemble des marocains de l'étranger. Il n'y a plus deux types de, les marocains de l'intérieur et les marocains de l'extérieur. La notion de binationalité ou de bicitoyenneté est un apport et une dimensité. La communauté marocaine est importante. Elle constitue plus de 6 millions et demi de personnes, mais, presque 4 millions ont changé leur nationalité pour des raisons de contraintes. A l'exemple de la Hollande où il faut faire un vote et choisir l'une des nationalités. Certains ne sont plus déclarés comme des étrangers, mais dans leurs propres pays. Deuxièmement, le projet de Constitution pose plus de réponses, du fait que la mutation d'une société répond aussi à la mutation de la communauté étrangère. La nouvelle Constitution consacre l'évolution et apporte quatre types de valeurs. La première est la bonne gouvernance. Les marocains du monde de l'étranger, qui ont été exclus de l'ensemble des partis politiques, veulent apporter aujourd'hui une nouvelle image, un nouveau souffle qui est l'éthique politique dans un Etat de droit et pas de passe droit. En deuxième lieu, ils veulent ramener la transparence politique qui est constitutionalisée. Il est inadmissible qu'au 21ème siècle, on achète électoralement un marocain. Dans ce cas, les partis politiques doivent jouer la transparence. La troisième chose, c'est que les partis politiques doivent prendre la responsabilité de faire un casting d'hommes politiques ou d'hommes d'Etat, choisis parmi les militants. Si on ne voit pas d'autres visages, le Maroc serait biodégradable. Car, aujourd'hui, les valeurs fondamentales de la Constitution sont la liberté, la liberté d'expression et l'égalité des hommes et des femmes. La quatrième valeur, c'est que, ce n'est pas grâce à la divinité grecque qu'on nomme quelqu'un, mais par le peuple, c'est à travers des institutions à caractère électif qu'on appelle la démocratie. Et en dernier lieu, le cinquième point, c'est la justice sociale. Un pays qui n'a pas de justice sociale débouche sur une société de combine. On a besoin d'une société de transparence, d'une société de confiance et d'une société de méfiance. Et les partis politiques aujourd'hui ont fait tellement d'erreurs, sous l'effet de la crise et de la mondialisation, que leur crédibilité a été ebtamée. La Constitution leur permet au moins d'être porteurs de projets et de ne plus jouer un rôle de boite de résonance. Ce sont là les choses que les marocains du monde peuvent apporter, avec le renouvellement probablement de l'ensemble des synergies. L'Opinion: Donc il y a un apport dans la Constitution par rapport aux MDM, mais… ? Pr. Abdelatif Fekkak : Il est certain qu'il y a un apport fondamental auquel on ne s'attendait pas. D'ailleurs, Sa Majesté le Roi Mohammed VI, en revenant de Paris a surpris tout le monde. Il n'a pas couru derrière la démocratie de la rue mais l'a devancée. Le reproche, c'est qu'on aurait souhaité ouvrir un large débat pour que la société comprenne. Du fait que, c'est avec les conflits qu'on arrive à comprendre les projets. La démocratie est une grande école de compréhension humaine où il y a le partage des pouvoirs, le partage des richesses mais surtout le débat national. Il n'y a pas l'idée univoque mais c'est une démocratie. L'Opinion: Et pour ce qui est des valeurs économiques pour les MDM ? Pr. Abdelatif Fekkak : Pour ce qui est des valeurs économiques, je pense que nous pouvons nous situer dans le cadre de la mondialisation. Cette dernière n'a ni frontières économiques, ni frontières politiques ou régionales. La mondialisation détruit tout, et tous les pays incapables de s'adapter, de donner un espoir et de donner de la méritocratie à chacun, selon ses compétences, est une société biodégradable. Les valeurs sont celles du libéralisme. Le premier point serait l'autonomie de l'ensemble des institutions pédagogiques, financières et administratives. En plus, il faut que, comme conseillé par Sa Majesté le Roi, que la compétition joue son rôle avec la concurrence. On ne peut pas donner des marchés à des gens par clientélisme. Au cas contraire, Le Maroc risque d'être privé de l'élite, les oiseaux rares risquent de partir et il ne restera au Maroc que des moineaux. Le deuxième point important, c'est le développement d'un partenariat à travers les cinq continents, parce que les marocains sont éparpillés un peu partout. Mais ce qui nous rapproche, c'est les réseaux sociaux d'internet et les nouvelles technologies. Pour ce qui est de la régionalisation avancée, elle est capitale pour rendre effective la compétition à échelle humaine. Il va y avoir des tribunaux, des petits gouvernements et les institutions locales vont se substituer au gouvernement central. Ce qui permettrait au gouverneur, qui représente l'Etat, de ne plus avoir toutes les décisions et d'être sanctionné tous les 4 ou 5 ans. Nous serons alors dans une logique de la mondialisation de la démocratie, avec un certain nombre de valeurs de la révolution française de 1789. L'Opinion: Pour ce qui est de partenariats entre les cinq continents à travers le réseautage, y a-t-il des démarches faites, que ce soit par vous, par le gouvernement ou par le CCME ? Pr. Abdelatif Fekkak : Une démarche a été faite par l'Etat. Quant au CCME, ses membres n'ont pas une réelle politique d'émigration, ils font des activités culturelles pour les deuxièmes et troisièmes générations. Pour ce qui est de la Fondation Mohammed V, c'est une institution associative qui aide l'ensemble des immigrés. Nous parlons ici de la nouvelle génération, de l'élite économique, de l'élite politique des MDM, qui semble extrêmement importante et qui va se situer dans les nouvelles valeurs de ce type de pouvoir de l'Etat entre le premier chef de gouvernement et entre le chef d'Etat. L'Opinion: Parlez-nous du parti qui va être déclaré ? Pr. Abdelatif Fekkak : Ce sera un parti ouvert grâce à la méritocratie. Il va y avoir un réseau sur internet. Pour ce qui est de la représentativité politique, nous attendons le découpage des zones pour voir plus clair et nous y situer. Nous sommes en phase de concertation, en attendant le Code électoral. En France, l'ensemble des français à l'étranger sont représentés dans les deux chambres du parlement bicaméral : le sénat et l'assemblée nationale. Il n'y a aucune raison pour que le Maroc ne soit pas représenté par ses propres enfants, cette élite économique de la troisième génération qui peut apporter beaucoup pour les institutions démocratiques à caractère éclectique.