"Alors que l'attention se concentre sur le soulèvement, nous craignons de voir les besoins des gens ordinaires oubliés au milieu des disputes politiques", a déclaré le directeur par intérim d'Oxfam au Yémen, Aziz Athwari. Les troubles au Yémen, nés de la contestation du régime qui se poursuit depuis cinq mois, ont aggravé une situation humanitaire déjà mauvaise, a souligné mardi l'organisation d'aide britannique Oxfam, qui a précisé qu'avant le début de la contestation en janvier, sept millions de Yéménites souffraient de malnutrition et que la "situation s'est davantage détériorée" depuis. Le Yémen, l'un des pays arabes les plus pauvres, est le théâtre depuis fin janvier d'un mouvement demandant le départ du président Ali Abdallah Saleh. La contestation s'est accompagnée de pénuries de courant, de vivres, d'eau et de carburant et certains accusent la Garde républicaine, commandée par le fils de M. Saleh, Ahmed, d'empêcher l'approvisionnement de Sanaa en divers produits. "Une punition collective" "Les gens réduisent leur consommation d'eau parce qu'elle est chère. Avant les 1.500 litres coûtaient 5 dollars, ils coûtent maintenant 20 dollars quand on peut les avoir, une somme que ces gens n'ont pas", a dit M. Athwari. L'opposition a rendu le régime Saleh responsable de ces pénuries, qu'elle a dénoncées comme "une punition collective". Les pénuries et la hausse des prix de biens de base sont "provoquées par le régime comme une punition collective infligée au peuple yéménite pour son rejet de ce régime et son adhésion aux Jeunes de la révolution", écrit le Forum commun, une alliance de l'opposition parlementaire, dans un communiqué. M. Athwari a estimé que les pays donateurs devaient venir immédiatement à l'aide du Yémen et assurer l'accès des agences humanitaires à la population qui est dans le besoin. "Les donateurs n'ont pas honoré au fil du temps leurs engagements financiers envers le Yémen. Il y a peu d'argent et il est temps d'agir", a-t-il ajouté. Le représentant d'oxfam a également souhaité voir la communauté internationale encourager toutes les parties yéménites à faciliter le travail des humanitaires. Des déplacements de personnes par plusieurs milliers Les violences au Yémen ont provoqué quelque 45.000 déplacements dans les provinces du Sud d'Aden, d'Abyane et de Lahj où l'armée dit combattre des membres présumés d'Al-Qaïda, a indiqué mardi le Bureau de coordination des Affaires humanitaires de l'ONU (Ocha). "Ocha est préoccupé par cette situation de conflit notamment au Sud du Yémen dans le gouvernorat d'Abyane", a déclaré aux médias une porte-parole de l'instance onusienne, Elisabeth Byrs. "Nous sommes préoccupés par le déplacement des personnes que ces troubles provoquent", a-t-elle ajouté. Elle a précisé que les agences humanitaires disposaient des estimations suivantes: "10.000 personnes déplacées dans le gouvernorat de Lahj, 15.000 dans le gouvernorat d'Aden. Et à peu près plus de 15.000 seraient déplacées autour d'Abyane". Mme Byrs a précisé que dans la province de Lahj, ces personnes vivent dans des familles d'accueil, tandis qu'à Aden elles ont trouvé refuge dans 33 écoles. En conséquence, "les besoins humanitaires sont croissants pour ces personnes", a-t-elle insisté, signalant que les besoins les plus urgent concernaient les vivres. En outre, le personnel humanitaire risque de faire face à un manque d'essence dans les jours à venir, a-t-elle prévenu. Elle a également indiqué que l'ONU avait reçu 59% des 224 millions de dollars demandés pour ses activités humanitaires, précisant que des financements supplémentaires seraient nécessaires, étant donné la multiplication des affrontements dans la région. Les violences au Yémen ont fait -- depuis le début du soulèvement populaire jusqu'à la date du 10 juin -- 283 tués et 3.617 blessés, a encore indiqué Mme Byrs citant des chiffres non confirmés des autorités locales. La porte-parole a ajouté qu'elle ignorait si ces statistiques englobaient uniquement les civils ou comptabilisaient également des militaires et des membres présumés d'Al-Qaïda.