Les Etats-Unis ont la preuve d'une implication croissante des activistes pakistanais et des ONG caritatives qui leur sont affiliées dans les secours aux victimes des inondations dans le but de renforcer leur popularité, a déclaré un haut responsable américain. Le département d'Etat américain a déjà mis en garde contre le risque de voir les activistes islamistes s'attaquer aux travailleurs humanitaires expatriés déployés sur le terrain. Ces inondations, les plus graves depuis des décennies, font suite aux pluies de mousson exceptionnelles cette année. Elles ont mis à mal la capacité du pays et de son gouvernement civil à répondre efficacement et rapidement à la catastrophe. L'un des risques majeurs serait de voir les activistes islamistes et leurs ONG exploiter la colère de la population face à l'incurie de l'Etat, même si les Etats-Unis et leurs alliés ont dépêché des aides supplémentaires. Le responsable américain de haut rang, qui a réclamé l'anonymat, a affirmé que des activistes distribuaient même de l'argent aux sinistrés. "Il existe des indices très clairs montrant que les insurgés et les groupes affiliés cherchent actuellement à utiliser les inondations et les opérations de secours pour renforcer leur popularité avec, pour objectif à terme, de contrôler une bonne part du Pakistan", a-t-il dit jeudi. La semaine dernière, les autorités pakistanaises, conscientes de ce risque, avaient annoncé qu'elles allaient sévir contre les organisations caritatives liées aux groupes radicaux islamistes. Mercredi pourtant, le directeur de l'Usaid s'est rendu dans un camp pour victimes des inondations approvisionné en secours par une organisation caritative, le Falah-e-Insaniyat, soupçonné de liens avec le Lashkar-e-Taiba et sa branche caritative Jamaat-ud-Dawa, deux organisations figurant sur la liste noire des groupes terroristes établie par les Nations unies. Le Laskhar-e-Taiba, un moment courtisé par les puissants services secrets militaires pakistanais pour combattre l'Inde au Cachemire, est tenu pour responsable des attentats de Bombay, qui ont fait 166 morts en 2008. "Ils apportent de l'aide, de l'argent, des vivres", a souligné le responsable américain à propos des insurgés en reconnaissant l'ampleur du défi pour le gouvernement pakistanais. Sur le terrain, les autorités ont ordonné vendredi l'évacuation de la ville de Thatta, à 70 km à l'est de Karachi, dans le delta de l'Indus. Cette décision fait suite aux hautes marées enregistrées en mer d'Oman, qui borde les bouches de l'Indus. Le puissant fleuve, qui prend sa source au sud du Tibet et suit la bordure nord de l'Himalaya, est en crue. "Une nouvelle digue s'est rompue dans la nuit à proximité de Thatta, d'où l'ordre d'évacuer l'ensemble de l'agglomération", a déclaré à Reuters le responsable des secours de la province du Sind, Riaz Ahmed Soomro. La ville de Thatta abrite en temps normal environ 300.000 habitants mais sa population s'est accrue des dernières semaines avec l'afflux de personnes habitant des zones basses inondées. Les Nations unies ont annoncé que près d'un million de personnes supplémentaires avaient été déplacées dans le Sind. Jusqu'ici, l'Onu évoquait un chiffre d'environ six millions de personnes déracinées dans tout le Pakistan en raison de la montée des eaux. "Le Sud fait toujours l'objet d'inquiétude. Ces dernières 48 heures, près d'un million de personnes ont été déplacées", a déclaré Stacey Winston, porte-parole de l'Onu. Les inondations ont fait au total près de 1.600 morts depuis près d'un mois et détruit de nombreuses récoltes.