Les Islandais ont dit massivement "non" samedi par référendum au plan de remboursement à la Grande-Bretagne et aux Pays-Bas des 3,5 milliards d'euros de dettes de la banque Icesave, selon des résultats partiels. Après dépouillement d'un tiers des suffrages, sur 230.000 électeurs, le "non" l'emporte à 93% et le "oui" n'obtient que 2%, le reste des bulletins étant blancs ou nuls. Victime de la crise financière, la banque islandaise en ligne a fait faillite fin 2008. Ses quelque 400.000 clients du Royaume-Uni et des Pays-Bas, vers lesquels ses opérations étaient tournées, ont perdu au total 3,5 milliards d'euros, que leurs gouvernements leur ont remboursés. Londres et Amsterdam souhaitent que Reykjavik leur reverse ce montant. Les trois pays étaient parvenus à un accord l'an dernier sur les modalités de remboursement. Un projet de loi prévoyant que l'Etat islandais se porte garant des dettes d'Icesave et rembourse l'argent a été approuvé par le parlement. Mais le chef de l'Etat a refusé de le promulguer, ce qui a imposé la tenue d'un référendum, le premier dans le pays depuis l'indépendance d'avec le Danemark votée en 1944. Beaucoup d'Islandais contestent les conditions sévères imposées par leurs créanciers et se disent convaincus qu'un accord plus avantageux peut être trouvé alors que les discussions entre les pays se poursuivent parallèlement. Les dettes de l'Islande représentent plus de 15.000 dollars (environ 11.000 euros) par personne, pour une population de 320.000 habitants. Amsterdam et Londres ont déjà fait des propositions qui offriraient des conditions de remboursement plus avantageuses, raison de plus pour les électeurs islandais de rejeter le plan élaboré par leur gouvernement à la fin de l'année dernière. Le Premier ministre islandais de centre-gauche, Johanna Sigurdardottir, qui avait prévenu qu'elle ne voterait pas ce samedi, a exclu de démissionner à l'issue du scrutin. "Cela n'a pas d'impact sur la vie du gouvernement", a-t-elle dit à la télévision publique. "Nous devons continuer et terminer le débat sur Icesave. Nous devons arriver à un accord." Le ministre des Affaires étrangères, Ossur Skarphethinsson, a déclaré pour sa part à Reuters qu'un nouvel accord sur les conditions de remboursement pourrait être trouvé avec les Pays-Bas et la Grande-Bretagne "dans les prochaines semaines, peut-être plus rapidement". Après le résultat du vote, il a indiqué que Londres et Amsterdam avaient manifesté leur intention de poursuivre les discussions. Le référendum a donné aussi l'occasion aux Islandais, qui ont perdu 30% de leurs revenus depuis 2007, d'exprimer leur colère à l'égard des banques et de la classe politique de Reykjavik qu'ils jugent responsables de la situation. Un an après la "révolution des casseroles" qui avait poussé à la démission le Premier ministre conservateur Geir Haarde, plusieurs centaines de manifestants se sont rassemblés à Reykjavik aux cris de "Pas d'Icesave. Pas de traîtres au pouvoir. Le pays est innocent" ou "Sauvez plutôt nos maisons". "Nous voulons payer nos dettes, mais nous voulons le faire sans nous mettre en faillite", a déclaré Steinunn Ragnarsdottir, un pianiste venu voter avec sa fillette de deux ans à la mairie de Reykjavik. L'affaire Icesave a aussi réalimenté le sentiment anti-européen dans le pays alors que Bruxelles avait invité Reykjavik à ouvrir des négociations d'adhésion à l'UE. Plus de la moitié des Islandais sont aujourd'hui opposés à une éventuelle adhésion, près de deux fois plus qu'en 2008.