Il y a plus de trois décennies, le Maroc, désireux de renforcer son intégration dans l'économie mondiale, négociait son premier Accord de Libre-Echange (ALE) avec les Etats-Unis, marquant ainsi un tournant dans sa politique commerciale. Depuis, le Royaume a signé une cinquantaine d'accords du genre, générant environ 400 milliards de dirhams de retombées économiques. Ce montant, significatif pour une économie émergente comme celle du Maroc, reste cependant inférieur aux potentialités du plus grand exportateur mondial de phosphates et l'un des principaux fournisseurs de produits halieutiques pour la zone Euro. Or, avec des échanges commerciaux principalement tournés vers le Vieux continent, le commerce extérieur du Royaume, dont le tissu économique est bien moins mature que celui de l'Europe, ne pourra jamais atteindre son plein potentiel, comme en témoigne le déficit commercial dépassant les 100 MMDH. Même son de cloche du côté des EtatsUnis ou encore des pays d'Asie, avec lesquels le déficit continue de se creuser. Il est vrai que ces accords devraient être appréhendés dans leur ensemble, d'autant que 99% des exportations du Royaume sont effectuées dans le cadre des ALE, et leur révision pourrait, comme l'a expliqué précédemment le ministre de tutelle, avoir des conséquences «désavantageuses sur les gains qu'ils génèrent». Mais un nouveau paradigme bien au-delà d'un simple «rééquilibrage» s'impose. La mouture de certains ALE a, d'ailleurs, bel et bien été révisée, à l'instar de celle de l'accord avec Ankara, afin de rééquilibrer, ne serait-ce qu'en partie, la balance, mais l'impact reste insignifiant, comparé aux dividendes que pourrait générer le Royaume en s'ouvrant sur de nouveaux marchés à forte valeur ajoutée et surtout à faible pression économique. Il est vrai que l'une des priorités doit être de consolider le Made in Morocco, mais en attendant que l'industrie nationale se renforce, Rabat aurait tout intérêt à rouvrir la voie des ALE, en se tournant vers des pays ou des zones économiques où l'avantage compétitif est clairement identifiable. Si des partenaires comme le Brésil ou le Royaume-Uni, dans un contexte post-Brexit, semblent être des choix évidents, des groupements tels que l'Union économique eurasienne pourraient également constituer une option stratégique de premier plan pour le Maroc. Mais attention à ne pas froisser certains partenaires traditionnels, qui ne se réjouiraient pas de voir le Maroc engager un partenariat avancé avec la Russie.