L'agence pour les réfugiés palestiniens n'a toujours pas reçu de preuves par Israël d'une possible implication de certains employés avec le Hamas, selon un rapport indépendant présenté lundi par l'ancienne ministre française des Affaires étrangères Catherine Colonna. Israël n'a pas encore fourni la « preuve » de prétendus liens de certains membres à des «organisations» comme le Hamas, ont conclu lundi des experts mandatés par l'ONU. Reste que l'UNRWA est « irremplaçable et indispensable » aux Palestiniens, a souligné ce groupe indépendant présidé par l'ancienne ministre française des Affaires étrangères Catherine Colonna et chargé par le secrétaire général António Guterres d'une mission d'évaluation sur sa «neutralité». Ce rapport très attendu – fruit de neuf semaines de travail en Israël, Cisjordanie occupée, Jordanie – contient des «recommandations» que Mme Colonna a présentées à la presse au siège de l'ONU à New York, après des mois de tourmente pour l'UNRWA déclenchée par des accusations d'Israël. « Ce qui doit être amélioré sera amélioré. Je suis confiante dans le fait que la mise en œuvre de ces mesures aidera l'UNRWA à remplir son mandat », a affirmé Catherine Colonna. Car « l'UNRWA demeure cruciale pour apporter une aide humanitaire vitale [...] notamment en matière de santé et d'éducation aux réfugiés palestiniens à Gaza, en Jordanie, au Liban, en Syrie et en Cisjordanie », a reconnu le rapport. « Beaucoup considèrent l'UNRWA comme une planche de salut humanitaire ».
Le manque de preuve n'a pas empêché le gel du financement
« Mais en dépit de ce cadre solide, des problèmes liés à la neutralité persistent », a relevé la mission Colonna. Il s'agit « de cas d'employés exprimant publiquement leurs opinions politiques, de livres scolaires au contenu problématique venant du pays hôte et utilisés dans certaines écoles de l'UNRWA, de syndicalistes politisés proférant des menaces contre l'encadrement de l'UNRWA et perturbant des opérations » humanitaires. Catherine Colonna a évoqué à demi-mots des livres d'écoles de l'agence onusienne à caractère antisionistes. L'UNRWA, qui compte plus de 30.000 employés servant 5,9 millions de Palestiniens dans la région, est accusée par Israël d'employer plus de 400 Palestiniens dans la bande de Gaza. Douze d'entre eux sont montrés du doigt par les Israéliens pour avoir été, selon eux, directement impliqués dans l'attaque sans précédent du 7 octobre 2023 menée par le Hamas sur le sol israélien. Toutefois, Tel-Aviv n'a pas fourni la « preuve » de prétendus liens de certains membres à des «organisations» comme le Hamas. Ce qui n'a pas empêché des pays donateurs et à leurs tête les USA de suspendre leurs financements, même si certains les ont depuis repris.
Guterres accepte les recommandations du rapport Colonna
« Sur la base d'une liste de mars 2024 contenant des numéros d'identité de Palestiniens, Israël a affirmé publiquement qu'un nombre significatif d'employés de l'UNRWA sont membres d'organisations (de la résistance). Cependant, Israël doit encore en apporter la preuve », a prévenu la mission Colonna. L'ancienne ministre française a précisé à des journalistes que, selon son rapport, « l'UNRWA n'avait pas reçu de preuves par Israël » d'une possible implication de certains employés palestiniens avec le Hamas. Le porte-parole d'Antonio Guterres a assuré lui que « le secrétaire général acceptait les recommandations contenues dans le rapport de Mme Colonna » et qu'un « plan d'action » serait mis en œuvre. De son côté, Philippe Lazzarini, patron de cette agence humanitaire créée par l'Assemblée générale de l'ONU en 1949, a promis un « renforcement de nos efforts et de notre réponse face à l'un des épisodes les plus difficiles de l'histoire du peuple palestinien ». Sous pression depuis des mois, il avait défendu la semaine dernière l'UNRWA devant le Conseil de sécurité comme la « colonne vertébrale des opérations humanitaires » dans la bande de Gaza et dénoncé une campagne « insidieuse » pour y mettre fin. Il avait mis en garde contre un « démantèlement » de l'agence avec un risque de « famine » qui menace déjà le nord du territoire palestinien où plus de 34.000 personnes, la plupart des civils, ont été tuées depuis le début de l'offensive israélienne, selon le ministère de la Santé du Hamas. Lazzarini réclame une enquête sur les attaques israéliennes contre l'ONU Le chef de l'agence de l'ONU pour les réfugiés palestiniens (UNRWA), Philippe Lazzarini, a réclamé mardi une enquête du Conseil de sécurité sur les attaques d'Israël contre les Nations unies, dont 180 employés ont été tués dans la bande de Gaza depuis le début de la guerre en octobre. Philippe Lazzarini s'est exprimé à la suite du rapport d'experts indépendants emmenés par l'ex-ministre française des Affaires étrangères Catherine Colonna. Ce groupe a pointé lundi le manque de "neutralité" politique de l'agence humanitaire onusienne mais a reconnu qu'elle était "irremplaçable" pour les 5,9 millions de Palestiniens de la région. "J'ai demandé aux membres du Conseil de sécurité une enquête indépendante en responsabilité pour le mépris flagrant à l'égard des locaux de l'ONU, du personnel de l'ONU et des opérations de l'ONU dans la bande de Gaza", a martelé le patron de l'UNRWA. "A la date d'aujourd'hui, 180 employés de l'UNRWA ont été tués, la semaine dernière ils étaient 178, et plus de 160 locaux ont été endommagés ou complètement détruits", a-t-il détaillé devant la presse au siège de l'ONU à New York. Quelque 450 millions de dollars sont gelés au moment où les 2,3 millions d'habitants de la bande de Gaza vivent une catastrophe humanitaire et ont besoin d'une aide d'urgence, selon Lazzarini. En conséquence, l'UNRWA fonctionne "pour l'instant au jour le jour" en ayant récolté 100 millions de dollars de dons privés, "un signe extraordinaire de la solidarité du terrain", s'est-il félicité. Dans la tourmente depuis des mois, le dirigeant onusien italo-suisse s'en est pris directement à Israël. "Le véritable objectif derrière les attaques contre l'UNRWA est de nature politique: il est de priver les Palestiniens du statut de réfugiés à commencer par Gaza, Jérusalem et la Cisjordanie", a-t-il dit. Et "c'est exactement ce que nous avons entendu au Conseil (de sécurité) de l'ambassadeur israélien (à l'ONU Gilad Erdan). C'est un objectif d'Etat".