L'accord, initialement signé en juillet dernier à Istanbul par la Türkiye, l'ONU, la Russie et l'Ukraine, visait à reprendre les exportations de céréales à partir des ports ukrainiens. Moscou vient d'y mettre fin. Le chef de la diplomatie américaine a qualifié lundi d'"inadmissible" la décision russe de ne pas reconduire en l'état l'accord sur l'exportation des céréales ukrainiennes et assuré que cette décision allait entraîner une augmentation des prix de l'alimentation. Le choix de Moscou de se servir "de la nourriture comme d'une arme (...) va compliquer l'acheminement d'aliments dans les endroits qui en ont désespérément besoin et entraîner une hausse des prix", a déclaré le secrétaire d'Etat américain Antony Blinken. "J'espère que tous les pays observeront attentivement cette situation et qu'ils verront que la Russie est responsable du refus de fournir de la nourriture à des personnes qui en ont désespérément besoin dans le monde entier et de contribuer à la hausse des prix. Pour sa part, le Secrétaire général de l'OTAN a dénoncé, lundi, la décision de la Russie de se retirer de l'accord céréalier de la mer Noire, malgré les efforts de médiation de la Türkiye. "Je condamne la décision unilatérale de la Russie de se retirer de l'initiative sur les céréales de la mer Noire, malgré les efforts de notre allié, la Türkiye, et de l'ONU", a déclaré Jens Stoltenberg sur Twitter. Et de souligner que la "guerre illégale" menée par la Russie contre l'Ukraine continuait de "nuire à des millions de personnes vulnérables dans le monde entier". Plus tôt dans la journée de lundi, le Kremlin a annoncé qu'il avait suspendu l'accord, affirmant que la partie concernant la Russie n'avait pas été mise en œuvre.
« Chantage sur la sécurité alimentaire mondiale »
Après le retrait de Moscou de l'accord céréalier, la France a exhorté la Russie, dans un communiqué de presse publié lundi soir par le Quai d'Orsay, à « cesser son chantage sur la sécurité alimentaire mondiale ». La diplomatie française « condamne la suspension par la Russie de sa participation à l'initiative céréalière de la mer Noire » et estime que la partie russe « est seule responsable du blocage de la navigation dans cet espace maritime et impose un blocus illégal aux ports ukrainiens ». « La France continuera pour sa part, avec ses partenaires, à intensifier son action pour réduire les risques d'insécurité alimentaire pesant sur les populations les plus vulnérables à travers le monde, y compris par le biais des voies de la solidarité de l'UE, qui jouent un rôle essentiel et ont permis d'acheminer 38 millions de tonnes de céréales hors d'Ukraine depuis mars 2022 », est-il précisé. Cette déclaration intervient en réaction à l'annonce, par Moscou, de la suspension de cet accord éminemment important pour les pays dépendants du blé ukrainien.
Des millions de personnes "vont payer le prix" Des centaines de millions de personnes dans le monde "vont payer le prix" de la décision de la Russie de mettre un terme à sa participation à l'accord sur l'exportation des céréales ukrainiennes, a dénoncé lundi le secrétaire général de l'ONU. "Je regrette profondément la décision de la Fédération de Russie de mettre un terme à l'application de l'Initiative de la mer Noire, y compris le retrait des garanties de sécurité russes pour la navigation dans le nord-ouest de la mer Noire", a déclaré Antonio Guterres à la presse. La participation à cet accord "est un choix. Mais les gens en difficulté partout et les pays en développement n'ont pas de choix", a-t-il noté. "Des centaines de millions de personnes font face à la faim et les consommateurs sont confrontés à une crise mondiale du coût de la vie. Ils vont payer le prix", a-t-il insisté, estimant que la décision russe "portera un coup aux personnes dans le besoin partout dans le monde". L'ambassadrice américaine à l'ONU, Linda Thomas-Greenfield, a de son côté dénoncé un "nouvel acte de cruauté" de Moscou. "La Russie joue à des jeux politiques et de vrais gens vont souffrir. Un enfant dans la Corne de l'Afrique souffrant de malnutrition sévère, une mère qui ne produira plus de lait pour son bébé parce qu'elle n'a pas assez à manger pour elle-même", a-t-elle ajouté, accusant Moscou de "prendre l'humanité en otage". Moscou a néanmoins indiqué qu'elle est prête à y revenir « dès que la partie (des accords) concernant la Russie sera satisfaite ».
Attaque de missiles sur Odessa Des "infrastructures portuaires" ukrainiennes ont été endommagées dans une attaque de missiles russes ayant visé dans la nuit de lundi à mardi Odessa (sud), quelques heures après l'expiration d'un accord céréalier crucial. "Six missiles Kalibr ont été lancés depuis les eaux de la mer Noire sur Odessa", a indiqué dans un communiqué le commandement opérationnel ukrainien pour le sud du pays, précisant qu'ils ont été détruits par la défense aérienne mais que l'onde de choc et les débris des missiles "ont endommagé les infrastructures portuaires et plusieurs habitations privées". Vingt-et-un drones explosifs Shahed-136 ont également été détruits dans la région d'Odessa, et quatre autres dans la région de Mykolaïv, plus au nord, où une infrastructure industrielle a été touchée selon la même source. "Un incendie (s'y) est déclaré" avant d'être rapidement éteint sans faire de victimes, a rapporté le gouverneur régional, Vitali Kim, sur Telegram. Cette vague d'attaques est "une preuve supplémentaire" que la Russie "veut mettre en danger la vie de 400 millions de personnes dans divers pays qui dépendent des exportations alimentaires ukrainiennes", a commenté sur Telegram le chef de l'administration présidentielle ukrainienne, Andriï Iermak.