Bien que le nombre d'usines d'incinération d'ordures ménagères (UIOM) ait diminué ces dernières années, la polémique mettant en cause leur impact sur la santé publique ne faiblit pas. L'Institut de Veille Sanitaire de France a réalisé, dans le cadre du Plan Cancer 2003-2007, une étude mettant en relation les rejets d'agents chimiques toxiques issus des UIOM et l'incidence de cancers chez les populations vivant à proximité. Pas innovante en la matière, cette analyse se distingue cependant par le large échantillon observé ainsi que par la multiplicité des paramètres qu'elle intègre, tels que le facteur socio-économique (chômeurs, possession d'une voiture, nombre moyen de personnes par pièce…), la densité de la population spécifique à chaque localité, le type de milieu (urbain ou rural), la pollution due au circuit routier ou encore la pollution industrielle. Répartie sur quatre départements, l'enquête se concentre sur 16 incinérateurs en activité entre 1972 et 1990, dont 10 se situent en Isère, 1 dans le Bas-Rhin, 2 dans le Haut-Rhin et 3 dans le Tarn. Pour chaque installation, le périmètre sélectionné s'étale sur une quinzaine de kilomètres autour de la cheminée. En 1995, le nombre d'individus intégrés à l'étude s'élevait à 2 487 274 individus. A l'aide d'un outil informatique, épidémiologistes et bio statisticiens sont parvenus à simuler la dispersion atmosphérique des toxines chimiques rejetées par les incinérateurs, et leur dépôt à la surface du sol. En conservant à l'esprit que le pouvoir cancérigène de certaines de ces substances reste sujet à caution, on retiendra trois catégories de polluants identifiés comme indicateurs des émissions à caractère cancérigène : d'une part les métaux lourds, en second lieu les dioxines et les PCB, et enfin les particules. Après quatre ans de recherches, l'étude a mis en évidence un lien entre l'exposition au cours des années 1970-1990 à des émissions d'UIOM et la fréquence de certaines formes cancéreuses. Ainsi, au cours de la décennie 1990, les cancers féminins, tous types confondus ont augmenté de 6 % dans les régions concernées. Cas à part, les seuls cancers du sein ont crû de 9 %. Chez l'homme, on note une recrudescence des myélomes multiples (Le myélome multiple désigne la prolifération de cellules maligne dans la moelle osseuse.), ces derniers ayant augmenté de 23 %. La courbe représentative des occurrences de LMNH (Lymphomes malins non hodgkiniens, sont des tumeurs malignes qui se développent à partir de cellules du sang. ) a été la même pour les deux sexes, et a enregistré une hausse de 12 %.