Tendances récentes du marché des produits de base Quelles répercussions sur la balance commerciale marocaine ? La DEPF (Direction des Etudes et des Prévisions Financières) vient de communiquer son nouveau rapport « Tendances récentes du marché des produits de base ». Le point sur ce document. Après une période de forte hausse, les cours des matières premières ont enregistré récemment une correction à la baisse, suite à la résurgence des craintes sur un éventuel retard de la reprise économique mondiale. La volatilité des cours est accentuée par les revirements du sentiment des investisseurs, suscités par la publication d'indicateurs conjoncturels mitigés. Ainsi, après avoir atteint un haut de 428 points début août, l'indice CRB CCI des matières premières a reculé de 4% pour s'établir à 411 points le 4 septembre, ramenant sa performance annuelle à 11%. De même, l'indice S&P GSCI a baissé de 7,5% depuis son plus haut de dix mois de 481 points atteint à la mi-août. Cette baisse découle du repli des cours de pétrole, des métaux de base, des céréales et des oléagineux. Marché pétrolier Après avoir atteint un sommet annuel en août, les prix du pétrole ont enregistré un repli, affectés par la faiblesse de la demande actuelle et le niveau élevé des stocks américains. Ainsi, le baril du Brent s'est établi à moins de 67 dollars le 14 septembre, en baisse de 10% depuis son plus haut d'août (75 $), ramenant sa performance depuis le début de l'année à 56%. En contraste avec l'évolution des cours pétroliers en 2009, les prix du gaz naturel ont chuté à leur plus bas niveau en sept ans et demi début septembre aux États-Unis en raison d'une offre surabondante et d'une montée continue des stocks américains (+22% en un an). Aux Etats-Unis, la confiance des consommateurs s'est encore dégradée en août parallèlement à la remontée du taux de chômage à son plus haut niveau en 26 ans (9,7% contre 9,4% en juillet). Toutefois, l'indice ISM manufacturier a atteint 52,9 en août, après 48,9 en juillet, indiquant une expansion pour la première fois depuis 19 mois. En Chine, la production manufacturière a continué de progresser en août, pour son sixième mois d'expansion, selon l'indice des directeurs d'achats (PMI) officiel. Par ailleurs, l'indice du climat des affaires allemand (IFO) progresse encore en août, pour le sixième mois consécutif. S'agissant des fondamentaux du marché pétrolier, ils restent faibles avec des indicateurs sur la demande, l'offre et les stocks pétroliers moins favorables pour les cours. Dans son rapport de septembre, l'Agence internationale de l'énergie (AIE) s'attend à ce que la demande mondiale en pétrole baisse de 1,8 mbj en 2009, à 84,4 mbj. En 2010, cette demande devrait rebondir de 1,3 mbj, tirée notamment par la reprise de l'économie chinoise. Aux Etats-Unis, les stocks commerciaux de brut ont enregistré une baisse de 5,9 mb la semaine du 4 septembre pour s'établir à 337,5 mb, mais restent situés au dessus de la fourchette de variation habituelle pour cette période de l'année, reflétant une demande encore faible en pleine « driving season » estivale. Par ailleurs, lors de sa réunion le 9 septembre à Vienne, l'OPEP a maintenu ses quotas de production inchangés pour se focaliser d'abord sur une meilleure discipline de ses membres. Le taux d'application des baisses déjà programmées (4,2 mbj) a reculé à moins de 70% en août contre plus de 80% en début d'année. L'Organisation avait déjà laissé entendre qu'elle ciblait un prix de pétrole de 70 à 80 dollars le baril. Marché des métaux et minerais Après un fort rebond, les cours des métaux de base se sont repliés, suite à des craintes de ralentissement de la demande chinoise. Dans ce sillage, l'indice LMEX des prix des métaux industriels s'est établi à 2.821 points le 14 septembre, en baisse de 7% par rapport à son plus haut du 13 août, tiré par une contreperformance de ses principales composantes. Ainsi, les cours de l'Aluminium ont reculé de 12% sur la même période pour s'établir à 1.793 dollars la tonne ($/t) le 14 septembre, ramenant leurs gains annuels à 20%. Les stocks sur le LME (London Metal Exchange) ont atteint un record de 4,6 millions de tonnes (Mt), trois fois de plus qu'il y a un an. De même, les prix du nickel et de l'étain ont enregistré des baisses respectives de 20% et 6% sur la période susvisée, en ligne avec une remontée de leurs stocks sur le LME de 10% et 13% respectivement en un mois. De leur côté, les cours du cuivre se sont établis à 6.146 $/t le 14 septembre en baisse de 5% par rapport à leur pic annuel de 6.491 $/t atteint le 28 août. Les stocks du cuivre dans les entrepôts du LME ont augmenté de 9% sur un mois. Quant aux cours du plomb, après avoir atteint un plus haut de 16 mois de 2.448 $/t le 8 septembre, ils ont reculé de 16% sur la deuxième semaine du mois. La forte hausse est liée à la fermeture de plusieurs fonderies en Chine du fait d'une série d'intoxications au plomb. Dans le même sillage, les cours du zinc se sont repliés de 7% sur la deuxième semaine de septembre, après avoir atteint un sommet annuel de 1967 $/t le 8 septembre. En termes de perspectives, les cours des métaux de base continuent de faire face à la hausse des stocks et au repli des frets maritimes (-40% depuis début juin pour le Baltic Dry Index), ainsi que d'un ralentissement potentiel des importations chinoises. Pour les engrais, les cours ont enregistré des évolutions mitigées en août. Ainsi, les prix du phosphate brut sont restés stables à 90 dollars la tonne, leur plus bas depuis fin 2007. Les prix du DAP, TSP et de l'urée ont poursuivi leur remontée entamée en juillet (+8,6%, +0,4% et +1,4% respectivement en août), signe que la demande commence à revenir sur le marché. Quant aux cours du chlorure de potassium, ils ont reculé de 34% par rapport à juillet. Sur le marché des métaux précieux, les cours de l'or et de l'argent, évoluant en tandem, ont enregistré un fort rebond début septembre. Pour les platinoïdes, les gains restent limités malgré des interruptions de production en Afrique du Sud. Les cours de l'or ont franchi le seuil de 1.000 dollars l'once le 8 septembre, leur plus haut depuis février, suite au repli du dollar2 et un regain d'intérêt des investisseurs, notamment les fonds spécialisés (ETF), qui craignent une résurgence de l'inflation du fait des politiques monétaires et budgétaires expansionnistes. Dans le même sillage, les cours de l'argent ont atteint 16,75 $/once le 8 septembre, un sommet de 13 mois. Cette remontée des cours du métal jaune serait toutefois fragile, selon des analystes, en raison d'une très faible demande dans le secteur de la bijouterie. Marché des produits agricoles Les prix des céréales et des oléagineux ont poursuivi leur forte baisse, suite à une nette amélioration des perspectives de l'offre, confortée par des conditions climatiques favorables dans l'hémisphère nord. Ainsi, les cours du blé ont baissé de 16% en un mois et de 32% depuis leur sommet de juin pour s'établir à 201 $/t le 8 septembre, un plus bas de deux ans. Les estimations de la prochaine récolte mondiale 2009/10 ont été révisées à la hausse de 8 Mt à 662 Mt, selon un rapport du Conseil international des céréales (CIC), publié fin août. Ainsi, les stocks mondiaux de blé de fin de saison devraient augmenter de 20 Mt à 183 Mt, représentant 29% de la consommation mondiale contre 25% en 2008/09 et 19% en 2007/08. Le dollar est tombé à son plus bas d'un an contre un panier de six principales devises. Face à l'euro, le dollar a atteint son plus bas annuel, soit 1,45 $/€ le 8 septembre. De même, les prix du maïs se sont repliés de 11% sur un mois et de 26% par rapport à leur pic de juin pour s'établir à 142 $/t le 8 septembre, un plus bas depuis décembre, suite notamment à une forte amélioration des perspectives de récoltes aux Etats-Unis. La production mondiale de maïs en 2009/10 est désormais attendue à 787 Mt, soit 6 Mt de plus que les estimations du mois précédent, selon le CIC. Pour les mêmes raisons que le maïs, les cours du soja ont reculé de 20% en un mois à 360 $/t le 14 septembre, son plus bas depuis mars. Comme le laisse présager les contrats à terme, les prix du soja devraient se modérer davantage à l'arrivée des prochaines récoltes, attendues en abondance aux Etats-Unis. Par ailleurs, les cours du sucre poursuivent leur flambée, soutenus par de mauvaises conditions climatiques (phénomène El Niño) qui ont affecté les récoltes en Inde et au Brésil, les deux plus gros producteurs mondiaux de canne à sucre. Ainsi, le prix mondial du sucre brut à New York a plus que doublé depuis le début de l'année pour atteindre 25 cents/livre (soit 550 $/t) fin août, un plus haut de 28 ans. Les cours du sucre sont également liés à l'évolution du marché pétrolier qui détermine la proportion de la canne à sucre consacrée à la production de l'éthanol. Ce ratio est estimé à 56% en août au Brésil. Dans ce sillage, l'Organisation internationale du sucre (ISO), dans son dernier rapport trimestriel, table sur un déficit mondial de sucre de 8,4 Mt en 2009/10, en forte hausse par rapport à une prévision précédente d'un déficit de 4,5 à 5,0 Mt. L'Organisation a également élargi son estimation pour le déficit mondial 2008/09 à 10,4 Mt contre une prévision antérieure d'un déficit de 7,8 Mt. Les stocks de fin de saison 2009/10 sont attendus en baisse de 14% à 53,2 Mt avec un ratio stocks/consommation de 31,8%, le plus bas depuis 20 ans. Répercussions sur la balance commerciale marocaine Au terme des sept premiers mois de 2009, les importations énergétiques et alimentaires ont baissé de 36% et 17% respectivement, en glissement annuel, suite au repli des cours mondiaux des matières premières sur la même période. Ainsi, la facture pétrolière a diminué de 59% par rapport aux sept premiers mois de 2008, pour s'établir à 8,2 milliards de dirhams, suite au repli de 21% du volume importé et de 48% du cours moyen de la tonne. De même, les importations du gas oils et fuel oils ont reculé de 10% pour s'établir à 9,2 milliards de dirhams, sous l'effet combiné d'une baisse du cours moyen de 45% et d'un rebond des quantités importés de 62%. De son côté, l'allègement de la facture alimentaire découle notamment du repli des importations des céréales et des produits oléagineux. En particulier, les achats de blé ont diminué de 42%, suite à la baisse du volume importé de 19% et du prix moyen de 28%. De même, les importations de maïs ont baissé de 34%, suite au repli du prix moyen de 30% et du volume importé de 6%. Par ailleurs, les importations des huiles végétales brutes se sont inclinées de 19% en raison du recul du prix moyen de la tonne importée de 25%. En revanche, les achats de sucre ont augmenté de 60% à fin juillet 2009, tirés par une hausse simultanée du volume (+31%) et du prix moyen de la tonne importée (+22%). En termes de perspectives, la facture céréalière devrait s'atténuer davantage, suite à un fort repli des cours internationaux et à une récolte nationale record, estimée à 102 millions de quintaux. Quant aux importations du sucre, elles pourraient s'alourdir en raison d'un fort renchérissement des cours mondiaux, alors que la production nationale de la betterave sucrière est affectée par des inondations dans la région du Gharb. Les importations couvrent habituellement plus de la moitié de la consommation nationale de sucre. Du côté des exportations, les ventes des phosphates et dérivés ont atteint près de 11,2 milliards de dirhams au cours des sept premiers mois de 20093, en baisse de 65% par rapport à 2008 et de 7% par rapport à 2007. Leur part dans les exportations totales de marchandises s'est ainsi établie à 16,5%, comparable à celle de 2007 mais inférieure de moitié à celle de 2008 qui reste une année exceptionnelle. Les ventes à l'étranger du phosphate brut ont baissé de 64%, suite à un fort repli des quantités livrées (-63%), alors que le prix moyen de la tonne exportée est resté relativement stable (-2%). Quant aux exportations de l'acide phosphorique et des engrais naturels et chimiques, elles se sont contractées de 66% et 64%, suite à la baisse des cours moyens (-62% et -63% respectivement) et des quantités livrées (-11% et -3% respectivement). Cette évolution s'est accompagnée par un net repli des importations de soufre brut de 86% en valeur et de 53% en volume. S'agissant des exportations alimentaires, les ventes des agrumes et des fruits frais ont reculé de 28% et 43% respectivement, en raison essentiellement d'une baisse des quantités livrées de 29% et 52% respectivement, alors que les exportations des tomates fraîches ont augmenté de 12% du fait d'une amélioration du volume exporté de 17%. Par ailleurs, les exportations des crustacés, mollusques et coquillages se sont repliées de 33%, affectées par un recul d'un tiers du prix moyen à l'export. Le groupe OCP a annoncé début septembre avoir réalisé, à fin août 2009, un chiffre d'affaires de 1,5 milliard de dollars (11,6 milliards de dirhams), en hausse de 13% par rapport aux huit premiers mois de 2006, considérée comme une année normale. La nette reprise entamée en juillet dernier est attribuée à la pertinence des choix stratégiques du groupe dans un contexte de crise économique internationale.