Alors que la Réunion de Haut Niveau (RHN) entre le Maroc et l'Espagne approche à grands pas, on en sait un peu plus sur les accords en perspective. Passage en revue des secteurs stratégiques à l'ordre du jour. A quelques jours de la tenue de la Réunion de Haut Niveau (RHN) entre le Maroc et l'Espagne, les préparatifs vont bon train et ses contours sont de plus en plus clairs. Une rencontre dont l'objectif est de porter la coopération des deux pays à un niveau supérieur aussi bien sur le plan économique que politique. D'où l'importante délégation qui accompagnera Pedro Sanchez qui, selon les médias ibériques, comporterait des ministres chapeautant des secteurs stratégiques tels que l'énergie, le transport, l'agriculture ou encore l'industrie. Des échos non-confirmés parlent même d'une possible présence royale du côté espagnol. Et pour garantir la réussite de cette réunion, qui n'a pas eu lieu depuis 2015, Sanchez s'est assuré d'exclure les ministres de Podemos, connus pour leurs positions hostiles à l'égard du Royaume.
En prélude de la RHN se tiendra un Forum économique entre les patronats des deux pays, où il sera question d'explorer les potentialités d'investissement et réfléchir sur les opportunités à saisir à la lumière de la reconfiguration des chaînes de valeur mondiales. La coopération dans la transition énergétique est également au centre de ce Forum, auquel prendront part Aziz Akhannouch et Perdo Sanchez. Selon la presse espagnole, un intérêt particulier sera accordé au secteur des énergies, étant le plus grand défi de la conjoncture actuelle. Néanmoins, des accords d'envergure sont prévus en matière de migration, de tourisme, de culture, d'emploi... et la liste n'est pas exhaustive. Des accords de taille seront scellés lors de la Réunion, afin de «marquer un avant et un après dans les relations entre Rabat et Madrid», nous indique l'ancienne ministre du Logement et membre du Parti Socialiste Ouvrier Espagnol (PSOE), María Antonia Trujillo, qui souligne que c'est le bon moment pour approuver «les stratégies d'avenir dans le cadre des relations bilatérales, en les renforçant et en rendant plus solides les piliers d'une relation qui nous unit à travers une Histoire commune».
A la quête du win-win
Le chef du gouvernement espagnol a démontré que l'intérêt de l'Espagne demeure dans le maintien de ce nouvel élan entre les deux pays, basé sur la fameuse règle win-win, indique Trujillo, notant que la RHN verra l'adoption d'initiatives conjointes innovantes qui renforceront la relation bilatérale, enrichiront le partenariat économique et impliqueront la société civile en tant que modèle de diplomatie parallèle. Elle suggère que l'innovation et l'avenir doivent couvrir une partie des accords sur des questions qui fâchent, à l'instar de l'affaire des villes de Sebta et Mellilia. En outre, suite à la reconnaissance des progrès du Maroc en termes de bonne gouvernance économique et d'amélioration du climat des affaires, l'Espagne devra encourager l'attraction d'investissements directs espagnols, en particulier dans les régions du Sud (Dakhla) après la reconnaissance du statut du Sahara marocain. Par ailleurs, l'ancienne ministre et ex-diplomate à Rabat exhorte les deux gouvernements à s'unir davantage et à profiter de leurs zones géographiques. «Nous devons assumer et mettre à profit le fait que l'avenir des deux pays se construit dans la sphère hispano-marocaine, tant dans les relations avec l'Union Européenne qu'avec l'Amérique latine et le continent africain. L'Espagne et le Maroc sont un point de référence et ont une influence dans nos régions respectives. L'Espagne en Europe et en Amérique latine, et le Maroc au Maghreb et dans le reste de l'Afrique», explique-t-elle.
La posture du Maroc à l'Union Européenne Le soutien de l'Espagne au Maroc au sein de l'Union Européenne y compris, bien sûr, au Parlement européen, doit être enregistré lors de cette réunion. "Je ne parle pas du fait que le Maroc est un partenaire stratégique de l'UE et que ce partenariat servira à œuvrer dans d'autres domaines, comme la coopération euro-africaine, puisque le Maroc est une plaque tournante pour la coopération et l'échange d'expériences entre les pays de l'UE et les pays africains. Mais, je fais référence, d'une part, à la reconnaissance par l'Espagne du modèle démocratique marocain de respect des droits de l'Homme et de l'Etat de droit, qui a progressé de manière impensable dans la nouvelle ère de Sa Majesté le Roi Mohammed VI et, d'autre part, à l'exercice de l'influence nécessaire au sein de l'UE pour défendre le régime constitutionnel marocain", a-t-elle synthétisé. Mohamed ELKORRI
L'info...Graphie Trois questions à Maria Antonia Trujillo « Un futur prometteur dans les relations bilatérales, quelques dossiers encore à résoudre » Maria Antonia Trujillo, ancienne ministre espagnole au Logement qui s'est récemment illustrée en réaffirmant la nécessité de rétrocéder au Maroc les villes de Sebta et de Mellilia, en plus des autres îlots et confettis occupés, répond à nos questions.
- Les élections approchent à grands pas en Espagne, quelles sont les cartes que pourrait jouer le gouvernement espagnol avec le Maroc pour consolider ses chances de réélection ? - Je suis convaincue que le candidat socialiste au gouvernement espagnol - s'il s'agit de Pedro Sánchez - fera un excellent score. Il a déjà gagné la confiance du Parti Populaire en Espagne sur la question du Sahara marocain. Au Parlement européen, les députés socialistes ont voté contre une Résolution qui représente une ingérence dans les affaires intérieures du Maroc et ont démasqué les actions des députés de différentes forces politiques qui proposent et votent en réponse à des intérêts qui ne sont ni très constructifs pour l'Union ni logiques. - Jusqu'à quel point l'imminente Réunion de Haut Niveau entre le Maroc et l'Espagne pourrait peser sur les résultats des prochaines échéances électorales ? - L'Espagne va maintenant prendre part à une réunion de haut niveau qui débouchera sur de nouveaux accords fructueux dans le domaine des relations bilatérales avec le Maroc, ce qui constituera évidemment un nouveau succès dans la politique étrangère de Pedro Sánchez. En tant que chef du gouvernement, cet homme répond aux besoins des citoyens et, enfin, il s'inscrit dans l'agenda international et place l'Espagne sur la scène mondiale à chacune de ses apparitions et interventions. Que demander de plus pour garantir sa réélection ? - Que pensez-vous du dossier de la délimitation des eaux territoriales des Iles Canaries et des îlots ? Y a-t-il une solution win-win pour les deux Etats ? - Les deux pays disposent d'une législation nationale sur la mer territoriale et ont signé des conventions à ce sujet. Il est également connu que la souveraineté des Etats s'étend, en dehors de leur territoire et de leurs eaux intérieures, à la mer territoriale adjacente à leurs côtes, délimitée conformément à la législation applicable. Espérons que des accords pourront être trouvés aux tables de travail. Mais je me demande s'il est facile ou difficile de délimiter, par exemple, les eaux territoriales dans le cas de l'îlot du Peñón de Vélez de la Gomera... La frontière qui sépare l'Espagne du Maroc au Peñón de Vélez de la Gomera est le plus petit tronçon de frontière du monde, d'à peine 85 mètres de long. Une simple corde bleue est le symbole qui sépare l'Espagne de la côte marocaine.
Sahara marocain : Position irrévocable de l'Espagne La décision sur le Sahara marocain prise par le Premier ministre espagnol, Pedro Sánchez, est une décision d'Etat sans possibilité de changement dans le cas hypothétique d'un gouvernement d'une idéologie différente, précise Maria Antonia Trujillo. Tant lors de la RHN 2012, qui s'est tenue à Rabat, que lors de la RHN 2015, qui s'est tenue à Madrid, avec M. Rajoy en tant que Premier ministre de l'Espagne et en tant que président du Parti Populaire (PP), celui-ci s'est exprimé ainsi sur la question du Sahara marocain : « En ce qui concerne la question du Sahara, les deux parties ont souligné l'importance de reprendre les négociations sur des bases solides, conformément aux Résolutions et aux paramètres clairement définis par le Conseil de Sécurité, y compris le réalisme et l'esprit de compromis, afin de parvenir à une solution politique à ce différend qui n'a que trop duré ». L'Espagne a également salué les efforts sérieux et crédibles du Maroc et, sur la question du Sahara, les deux parties se félicitent de l'adoption en avril 2015 de la Résolution 2218 du Conseil de Sécurité de l'ONU, a-t-il soutenu, ajoutant que « de même, les deux parties ont souligné l'esprit de compromis et de réalisme pour parvenir à une solution politique consensuelle et mutuellement acceptable ». Maintenant, dans la législature actuelle, un exemple de plus de la position du PP. En juillet 2022, le PP a voté avec le PSOE contre une proposition de Résolution hostile au Maroc déposée par les partis indépendantistes espagnols, qui demandaient au gouvernement de Pedro Sánchez de reconsidérer sa position sur le Sahara marocain exprimée dans la lettre adressée à Sa Majesté le Roi Mohammed VI, le 23 mars 2022. La proposition de Résolution a été rejetée par 252 voix contre, y compris celles du PP, ce qui représente un soutien et une avancée significatifs de la position officielle de l'Espagne en faveur du Plan d'autonomie et de l'utilisation de la raison, de la logique et du bon sens par le PP. "À mon avis, la gauche socialiste et l'aile droite du Parti Populaire espagnol parlent désormais le même langage sur cette question. Le Parti Populaire est d'accord avec la position du gouvernement espagnol sur le Sahara marocain.", a conclu notre interlocutrice.
Les îlots occupés au Nord du Maroc : Revendications historiques L'avenir des rochers et îlots sous souveraineté espagnole situés sur la côte nord-africaine demeure dans les priorités du gouvernement marocain. Des territoires tels que les îles Jaâfariyines, l'île d'Alhucemas et le Peñón de Vélez de la Gomera, avec une présence militaire et des installations de l'armée espagnole, sont l'une des revendications historiques du Maroc. Au titre de l'année 2023, le ministère espagnol de la Défense a décidé de les renforcer en augmentant le budget de leur entretien afin qu'ils continuent à être militairement opérationnels. En plus de Sebta et Mellilia occupées, le Maroc maintient ses revendications sur les territoires souverains que l'Espagne occupe sur le littoral marocain. Notons que l'armée espagnole y opère et, dans l'ensemble, ce sont des îlots pertinents pour la défense nationale de l'Espagne, d'après plusieurs acteurs politiques du pays ibérique. Dans ce contexte, et quelques semaines après la réunion de Sa Majesté le Roi Mohamed VI et Pedro Sanchez qui s'est tenue en avril 2022 à Rabat, le ministère de la Défense du pays ibérique a lancé un appel d'offres pour le service «d'entretien complet de ce sîles et rochers à l'horizon». Un contrat de 144.230 euros qui fait grimper les dépenses par rapport à l'année précédente, où elles dépassaient à peine les 90.000 euros. En outre, le mouvement le plus inattendu et le plus controversé de ces dernières années a eu lieu en 2021. Le site espagnol OKDIARIO a signalé le retrait des tombes des cimetières d'Al Hoceima et de Vélez de la Gomera pour leur transfert à Mellilia.