Washington a déclaré mardi soir "ne pas encourager" les attaques ukrainiennes de drones en Russie, alors que Moscou a signalé qu'un de ces engins avait touché mardi un aérodrome près de la frontière, sans faire de victime. Pendant la journée, le président ukrainien Volodymyr Zelensky s'est rendu près du front, non loin de Bakhmout, le principal champ de bataille de l'est de l'Ukraine où l'armée ukrainienne résiste depuis des mois à une offensive russe. Ce déplacement intervient au moment où la Russie accuse son voisin de multiplier les attaques de drones contre des aérodromes sur son territoire. Des frappes que Kiev ne revendique pas, mais qui illustrent les difficultés que rencontre l'invasion déclenchée le 24 février par le président russe Vladimir Poutine. "Nous n'encourageons pas et nous n'aidons pas l'Ukraine à lancer des frappes en Russie", a déclaré à la presse le chef de la diplomatie américaine Antony Blinken. "Mais ce qu'il faut comprendre, c'est que les Ukrainiens vivent chaque jour avec l'agression russe qui se poursuit", a-t-il ajouté, accusant Moscou de "faire de l'hiver une arme" en bombardant les infrastructures civiles de l'Ukraine. "Ce à quoi nous sommes déterminés, c'est faire en sorte qu'ils aient en mains - avec beaucoup d'autres partenaires dans le monde - les équipements dont ils ont besoin pour se défendre, défendre leur territoire et défendre leur liberté", a précisé M. Blinken.
L'Ukraine peut continuer à développer ses propres missiles
Le chef du Pentagone, Lloyd Austin, qui s'exprimait aux côtés de Blinken, a souligné que les Etats-Unis n'empêchaient pas l'Ukraine de développer ses propres missiles à longue portée. "La réponse est non. Nous ne faisons certainement pas cela", a-t-il déclaré. "Nous ne faisons rien pour empêcher l'Ukraine de développer ses propres capacités". Le président américain Joe Biden a dit publiquement qu'il n'encourageait pas l'Ukraine à se doter de missiles de longue portée, redoutant une escalade qui pourrait conduire les Etats-Unis à jouer un rôle plus direct contre la Russie. Les Ukrainiens continuent quant à eux de subir des coupures de courant, au lendemain d'une nouvelle série de bombardements sur les infrastructures énergétiques de leur pays. A New York, le chef de l'agence humanitaire de l'ONU, Martin Griffiths, s'est alarmé devant le Conseil de sécurité: "Depuis octobre, les attaques prolongées contre les infrastructures énergétiques de l'Ukraine ont créé un nouveau niveau de besoins qui touche tout le pays et aggrave les besoins provoqués par la guerre". Pour sa part, le président Volodymyr Zelensky a diffusé trois vidéos de lui dans le Donbass, région dont Moscou a revendiqué l'annexion en septembre sans pour autant la contrôler. "L'est de l'Ukraine est l'axe (du front) le plus difficile", a dit Zelensky à des militaires, à l'occasion de la journée des forces armées. "Merci pour votre résilience", a-t-il ajouté avant de remettre des décorations.
Concentration des attaques russes sur les installations énergétiques
Volodymyr Zelensky se rend régulièrement près du front, chose que le maître du Kremlin n'a jusqu'ici jamais faite, préférant les visioconférences de son bureau ou de sa résidence. La prise de Bakhmout constituerait enfin un succès pour les Russes qui, depuis l'automne, accumulent les revers, forcés à des retraites dans le nord-est et le sud. Dans ce contexte, le Kremlin a décidé depuis octobre de concentrer les attaques sur les installations énergétiques ukrainiennes, privant la population d'électricité, voire d'eau et de chauffage, au moment où les températures sont négatives. Mardi encore, le ministre russe de la Défense Sergueï Choïgou a justifié ces "frappes massives" par la nécessité de "réduire le potentiel militaire de l'Ukraine". Si le Kremlin ne cesse de jurer qu'il viendra à bout de la résistance ukrainienne, les derniers mois se sont avérés très difficiles pour les militaires russes, face à des Ukrainiens motivés et armés par leurs alliés occidentaux. Moscou a en outre dénoncé ces deux derniers jours des attaques ukrainiennes sur des aérodromes militaires russes, dont deux, ciblés lundi, qui se situent à plusieurs centaines de kilomètres de la frontière entre les deux pays. La Russie a fait état de trois morts et deux avions endommagés lors d'une de ces attaques.
14 millions de personnes déplacées de force par la guerre
Le Secrétaire général adjoint des Nations unies aux affaires humanitaires et Coordonnateur des secours d'urgence, Martin Griffiths, a déclaré que plus de 14 millions de personnes en Ukraine ont été "forcées" de quitter leur foyer à cause de la guerre, qui dure depuis des mois. Lors d'un briefing au Conseil de sécurité de l'ONU, ce mardi, Griffiths a déclaré que la guerre en Ukraine avait tué plus de 17.000 civils, dont 419 enfants, depuis le 24 février jusqu'au 1er décembre. Le haut responsable onusien a déclaré qu'il y avait plus de 14 millions de personnes déplacées de force en Ukraine, parmi lesquelles 6,5 millions de personnes déplacées à l'intérieur du pays et plus de 7,8 millions de réfugiés à travers l'Europe. Griffiths a condamné les attaques russes contre les infrastructures énergétiques de l'Ukraine, affirmant qu'elles "ont créé un niveau de besoin sans précédent qui affecte tout le pays et augmente les besoins causés par la guerre". "Le droit international humanitaire dispose clairement que les biens indispensables à la survie de la population civile doivent être protégés. Un soin constant doit être pris pour épargner les civils et les biens de caractère civil tout au long des opérations militaires", a ajouté le Secrétaire général adjoint. Griffiths a aussi souligné que l'ampleur de la destruction des infrastructures d'électricité et de chauffage nécessite un soutien accru de la communauté internationale au gouvernement ukrainien, au-delà de ce que les travailleurs humanitaires peuvent fournir.