Le Maroc fait face à moins de litiges au CIRDI après le règlement de deux affaires, la lutte s'intensifie concernant le reste des différends qui ont connu de nouveaux rebondissements. Tour d'horizon sur les affaires pendantes du Royaume. Détails Le Maroc est engagé dans une série de litiges contre des investisseurs internationaux soumis à l'arbitrage du Centre international pour le règlement des différends liés à l'investissement (CIRDI). Trois affaires sont toujours pendantes, dont la plus récente oppose le Royaume au groupe espagnol «Comercializadora Mediterránea de Viviendas ». Déclenchée le 27 juin après avoir été notifiée à l'instance arbitrale dix-sept jours plus tôt, cette affaire a pris son cours procédural avec le début de la formation du tribunal arbitral. Désigné comme arbitre par la partie demanderesse, le juriste péruvien Fernando Piérola-Castro a finalement accepté sa nomination, apprend-on de la fiche de la procédure qui a été actualisée. Ceci ne signifie pas encore le début des audiences puisqu'il faut impérativement que la formation du tribunal soit bouclée. La convention du CIRDI, rappelons-le, prévoit qu'il y ait un nombre impair d'arbitres, désignés chacun par les deux parties. En effet, l'article 37 prévoit de limiter le tribunal arbitral à trois arbitres le cas échéant si les parties ne se mettent pas d'accord. «À défaut d'accord entre les parties sur le nombre des arbitres et leur mode de nomination, le Tribunal comprend trois arbitres, chaque partie nommant un arbitre alors que le troisième, qui est le président du Tribunal, est nommé par accord des parties », stipule ladite convention, qui n'exclut pas pour autant la possibilité d'un arbitre unique si telle est la volonté des parties. Il convient de rappeler que le fait de la désignation des arbitres par une partie ne change rien à leur impartialité. L'article 56 stipule « qu'une fois qu'une Commission ou un Tribunal a été constitué et la procédure engagée, sa composition ne peut être modifiée à moins qu'il y ait un cas de décès, d'incapacité ou de démission d'un conciliateur ou d'un arbitre». Dans son bras de fer litigieux contre le Royaume, la société espagnole reproche aux autorités marocaines d'avoir porté atteinte à ses intérêts en ce qui concerne deux projets immobiliers qui auraient, à ses yeux, tourné au fiasco à ses dépens. Il s'agit de la ville nouvelle de Tamesna et la Perle de Tanger (Perla De Tanger). La société, défendue par le cabinet « Cremades & Asociados », allègue le traité bilatéral Maroc- Espagne de 1997 (prévoyant une clause d'arbitrage) qui aurait été violé par les autorités marocaines, estime la société espagnole. Celleci fait valoir que les autorités marocaines n'ont rien fait pour protéger ses intérêts. En fait, la défense de la société a construit sa plaidoirie autour de la supposée inaction des responsables marocains auxquels on reproche de n'avoir pas mis en place assez d'infrastructures et d'équipements pour assurer le succès du chantier de la ville nouvelle. Pour ce qui est du projet de la Perla de Tanger, la société espagnole s'est plainte des multiples écueils administratifs qui lui auraient, à en croire son réquisitoire, coûté la perte de son investissement. La société réclame 400 millions de dollars pour réparer les préjudices qu'elle estime avoir subis par la perte des projets susmentionnés. La lutte reprend contre Coral Cette affaire va commencer au niveau procédural pendant que les représentants du Maroc et ceux du groupe Coral Holdings continuent de se livrer bataille dans le litige relatif à la liquidation de la SAMIR. Actuellement, le tribunal arbitral a repris les audiences, le 25 octobre à Paris, apprend-on d'une source proche du dossier. La procédure d'arbitrage dure depuis le 14 mars 2018, date de la réception de la demande d'arbitrage par le Secrétaire général. Le 18 mai 2022, la défense du Maroc avait soumis les réponses aux questions formulées par le tribunal, le 22 décembre 2021. Le tribunal, rappelons- le, est constitué de l'Italo- Britannique Luca G. Radicati Di Brozolo, l'Américain Robert H. Smit et l'Italienne Loretta Malintoppi. Parmi les litiges susmentionnés, cette d'affaire suscite le plus d'attention au Maroc vu qu'elle concerne le sort de la raffinerie dont la reprise de l'activité fait l'objet d'un débat national. En réalité, à entendre les multiples sorties médiatiques du gouvernement sur ce dossier épineux, on comprend aussitôt que le sort de la société mise en liquidation judiciaire dépend étroitement de l'issue du litige au CIRDI. En effet, le Maroc risque 14 millions de dollars de dédommagements si le tribunal statue en faveur de l'ex-actionnaire majoritaire de la société, le Saoudien Cheikh Al Amoudi. Ce dernier allègue le traité d'investissement de 1990 signé avec la Suède pour justifier sa demande de dédommagement. Issue cordiale ? Rien n'exclut un règlement à l'amiable si les parties le jugent judicieux et à leur profit. C'est de cette façon que s'est soldé le litige du Maroc avec «Carlyle». Les autorités marocaines ont pu résoudre le différend avec le groupe américain par voie de compromis, en se mettant d'accord sur une transaction, dont le montant n'est pas connu mais qui est largement en dessous des dédommagements requis au début par le fonds américain. Le fonds, rappelons-le, réclamait 400 millions de dollars de dédommagements. Le Maroc semble de plus en plus souple et flexible dans son attitude face à ses adversaires, en étant plus enclin au compromis. Mais ce n'est pas systématique, comme le pense Abdelhakim Boutchich Kadiri, auditeur fiscal, consultant international et juge de résolution des différends. «Le recours aux transactions à l'amiable est une décision qui doit être mûrement réfléchie et ne se fait pas, en général, de façon fortuite. Tout dépend de l'ampleur de l'affaire et des intérêts du Maroc», explique-t-il. Anass MACHLOUKH