En raison de la détérioration de sa position extérieure, Fitch Solutions pense que le Maroc sollicitera le soutien du FMI afin d'émettre de la dette internationale et de renforcer ses réserves de change. Le déficit du compte courant du Maroc passera de 2,5 % du PIB en 2021 à 5,4 % en 2022 et à 5,7 % en 2023, le plus important depuis 2014, prévoit Fitch Solutions. « En effet, les importations dépassent la croissance des exportations, conformément à nos attentes. Les prix élevés des produits de base et une monnaie plus faible ont entraîné une croissance significative des importations et entraîné une nette détérioration du déficit commercial des biens, exerçant une pression sur la position extérieure. Nous pensons que cette pression persistera au 2ème semestre 222, car les prix des matières premières, en particulier l'énergie, restent élevés, et un dirham durablement plus faible continuera d'augmenter les prix des importations. En 2023, alors que la croissance des importations ralentira, le déficit du compte courant se creusera encore pour atteindre 5,7 % du PIB, les exportations et les envois de fonds ralentissant considérablement », souligne l'agence de notation américaine dans une récente analyse. La chute des prix du phosphate et une récession économique chez le principal partenaire commercial du Maroc pèseront sur la croissance des exportations et creuseront le déficit commercial des biens de 21,5 % du PIB en 2022 à 21,6 % en 2023, ajoute l'agence de notation internationale. Les exportations de phosphate ont augmenté de 67,7 % en glissement annuel au cours des huit premiers mois de 2022, représentant 28,1 % des exportations totales en août. Cela était principalement dû à la flambée des prix du phosphate, qui ont augmenté de 81,1 % depuis le début de l'année. En 2023, Fitch Solutions prévoit une détente des prix en 2023 à mesure que l'offre de phosphate augmentera, ce qui pèsera considérablement sur les exportations du Maroc. Bien qu'elle constate une certaine résilience de la demande automobile dans la zone euro, Fitch Solutions s'attend, par ailleurs, à ce qu'une récession pèse sur d'autres grands secteurs que le Maroc exporte, tels que le textile et l'électronique. Dans ce contexte, elle prévoit que la croissance des exportations du Maroc ralentira considérablement, passant de 35,8 % en 2022 à seulement 2,2 % en 2023. Parallèlement, les prix élevés de l'énergie continueront d'exercer une pression à la hausse sur la croissance des importations. Fitch s'attend à ce que les prix moyens du pétrole Brent restent élevés à 100 dollars le baril (/bbl) en 2023, en légère baisse par rapport aux 105 dollars le baril en 2022.
La récession de la zone euro pèsera sur les envois de fonds
De même, Fitch Solutions prévoit qu'une contraction de l'activité économique dans la zone euro pèsera sur les entrées de touristes au Maroc en 2023. En effet, les touristes européens ont historiquement constitué la majorité des arrivées (plus de 55,0% en moyenne) en raison de la proximité du Maroc avec l'Europe. Cela dit, les exportations de services bénéficieront d'effets de base favorables au 1er trimestre 2023 en raison de la levée des restrictions strictes sur les voyages en février 2022. Cela permettra au solde des exportations de services de passer de 8,2 % du PIB en 2022 à 8,5 % du PIB en 2023. L'agence internationale prévoit également que les réserves de change subissent davantage de pression tout au long du 1er semestre 2023 alors que le dollar américain et les prix des matières premières restent élevés. Cela conduira à une diminution de la couverture des importations du Maroc de 7,3 mois en 2021 à 4,9 mois en 2022 et 4,8 mois en 2023, le niveau le plus bas depuis 2012. De ce fait, Fitch pense que le Maroc sollicitera le soutien du FMI en raison de la détérioration de sa position extérieure. La chute des réserves s'est ajoutée à une aversion accrue pour le risque envers les marchés émergents, ce qui a entraîné une flambée des swaps sur défaillance de crédit au Maroc à des niveaux jamais vus depuis 2008. D'après Fitch, cela poussera le Maroc à solliciter le soutien du FMI afin d'émettre de la dette internationale et de renforcer ses réserves de change. Les autorités pourraient chercher à utiliser les droits de tirage spéciaux (DTS) du FMI pour renforcer les réserves de change ou rechercher une ligne de liquidité de précaution (PLL), similaire au programme qui a été utilisé en avril 2020, estime la même source.