Du nouveau concernant le carrefour des intérêts énergétiques de nombreux acteurs internationaux. Surnommée la Dorsale Atlantique, la partie marocaine du gazoduc nigérian-marocain atteindra une longueur de 1672 km. Ce tronçon sera implémenté en six phases, dont la première reliera le GME à Kénitra. Lancé en 2017, le projet de gazoduc Nigeria-Maroc est un pipeline de 7000 kilomètres qui traverse les eaux territoriales de 13 pays. Le projet commun est d'une importance cruciale pour le développement économique et l'intégration interafricaine car il permettrait de résoudre significativement les problèmes liés à la sécurité énergétique régionale. Le projet a également le potentiel de répondre aux préoccupations accrues en matière de sécurité énergétique en Europe, au milieu de la crise ukrainienne en cours, du resserrement de l'approvisionnement mondial en gaz et de la sanction de la Russie par l'Occident. Où en est le tronçon marocain de ce chantier promu par l'Office national des hydrocarbures et des mines du Maroc (ONHYM) ? Si le projet du tracé continental est plus ou moins connu, on découvre désormais les détails de celui de la partie marocaine du gazoduc. Imane Mansouri, représentante de l'ONHYM, fait valoir que « la partie marocaine du gazoduc Nigeria- Maroc a été baptisée Dorsale Atlantique, et sera, comme son nom l'indique, la colonne vertébrale de l'infrastructure gazière à développer au Maroc ». Ceci dit, le gazoduc offrirait au Maroc une alternative aux exportations coûteuses de gaz naturel liquéfié (GNL), d'autant plus que le Royaume importe actuellement près de 90% de ses besoins énergétiques, ce qui le rend particulièrement vulnérable aux fluctuations et à la volatilité des prix de l'énergie qui entraîne un déficit important dans la balance commerciale extérieure du Maroc, en plus d'augmenter le budget affecté au subventionnement des produits énergétiques pour préserver le pouvoir d'achat national. Chose qui épuise les réserves de devises du pays. Une conception stratégique S'exprimant lors de la conférence organisée par l'Agence nationale de régulation de l'électricité (ANRE) à l'occasion du 2ème MEDREG President's Workshop, Imane Mansouri a mis en avant les spécificités du chantier stratégique, dressant un tableau de la transition énergétique en Méditerranée. En ce sens, elle s'est concentrée sur le gisement et l'exploitation du gaz naturel et des produits connexes que permettrait le gazoduc Nigeria-Maroc. La surveillance des conduites de gaz naturel est une tâche importante pour l'exploitation économique et de sécurité, la prévention des pertes, la protection de l'environnement, mais aussi pour le développement industriel. La représentante de l'ONHYM a ainsi fait état, lors de la présentation, des six phases de l'élaboration du projet, dont chacune est conçue de manière à raccorder une zone industrielle très consommatrice de gaz naturel au pipeline, notant que la Dorsale Atlantique, d'une longueur de 1672 km, relayera le gazoduc GME dans la région de Dakhla, point de chute et d'arrivée du gazoduc Nigeria-Maroc. La proximité du gaz de ces zones permettra d'augmenter l'efficacité, minimiser les coûts d'exploitation et maximiser la production, contribuant ainsi à la croissance économique et au développement social des régions concernées. « La première phase concerne la région de Kénitra, qui est actuellement alimentée par la production locale, mais la demande est tellement importante qu'avoir un approvisionnement supplémentaire en carburant avec du gaz naturel pourrait constituer un plus, permettant de décarboner les industries existantes », avance Mansouri, soulignant que le gazoduc Nigeria- Maroc est un projet à fort impact qui touchera une population de quelque 340 millions de personnes. Vers une optimisation de l'intégration interafricaine Une intégration régionale efficace en Afrique renforcerait non seulement le commerce au niveau continental, mais attirerait également des investissements dans le secteur manufacturier. Les pays africains restent fragmentés, empêchant les entreprises d'investir dans le développement de chaînes d'approvisionnement efficaces sur le continent. Promettant une source de gaz fiable et stable, le géant gazoduc et son tracé stratégique renforceront désormais le potentiel du continent pour attirer les investissements et contribuer au développement socio- économique. Ainsi, l'importance du projet réside dans le fait qu'il constitue la principale voie de développement et d'intégration au-delà des frontières. Selon de nombreux experts, il s'agit d'un projet atlantique stratégique qui vise à améliorer la sécurité énergétique des pays africains et européens, où le gaz naturel est la deuxième ressource énergétique primaire la plus importante après les produits dérivés du pétrole, ainsi que d'un carrefour des intérêts énergétiques de nombreux acteurs internationaux. En effet, outre les 13 pays que traversera le gazoduc, il reliera trois pays supplémentaires : le Mali, le Burkina Faso et le Niger. Les réserves de gaz sont estimées à 5400 milliards de mètres cubes, et elles seront fournies principalement par le Nigeria, la Mauritanie, le Sénégal, le Ghana et la Côte d'Ivoire. Les marchés cibles sont l'Europe, qui sera privilégiée comme premier marché, l'Afrique de l'Ouest et le Maroc, fait savoir Imane Mansouri. Cependant, ce n'est que lorsque les investissements dans ces domaines augmentent que le pipeline peut remplir ces obligations, avait déclaré, fin mars, le ministre d'Etat nigérian aux Ressources pétrolières, Timipre Sylva. En ce sens, le président du Nigeria Muhammadu Buhari a récemment exhorté le Royaume-Uni et les pays de l'UE à investir dans le projet du gazoduc afin de réussir l'acheminement du gaz nigérian jusqu'en Europe. Cette accélération de la mise en oeuvre du gazoduc Nigeria-Maroc intervient à un moment où l'Europe fait face à une grave crise énergétique causée par le conflit russo-ukrainien et la menace russe de couper l'approvisionnement de l'Europe en gaz et en pétrole durant plusieurs mois. Kawtar CHAAT