Ecrivain et avocat chevronné, Hubert Seillan publie une nouvelle édition de son livre « Le Sahara marocain : L'espace et le temps » dans lequel il trace la carte identitaire du Sahara et dont la signature a été organisée dans les locaux de «L'Opinion» à Casablanca. Echange sur un livre qui dérange les détracteurs du Royaume. - Qu'est-ce qui vous a poussé à écrire ce livre qui dresse l'identité marocaine du Sahara marocain ? - Question délicate, ce qui m'a poussé c'est la nécessité. Placé devant le fait historique évident qui veut que ce Sahara jusqu'à la Mauritanie et, si j'ose dire, jusqu'au Sénégal a des racines marocaines, je me suis engagé dans une démarche qui consiste à dire ce qu'il en est. Il y a eu un premier livre sur le procès de Gdim Izik, dans lequel j'abordais la question du Sahara mais que je ne pouvais pas développer. Donc naturellement, après le livre sur le procès, j'ai senti qu'il fallait faire un autre sur le Sahara marocain en le traitant par l'espace et par le temps. Il fallait donc remonter jusqu'aux Idrissides en 700 AC. - Comment peut-on définir la carte identitaire du Sahara marocain ? - Elle est à la fois culturelle par la tradition et par le rite malékite, mais également économique par les couloirs commerciaux. N'oublions jamais que le Maroc ne fut jamais colonisé, si ce n'est dans sa partie la plus au Nord, par Rome, mais dans des conditions souples. La France n'a pas vraiment colonisé le Maroc, d'ailleurs Lyautey, qui a instauré le protectorat, ne voulait pas que le Royaume soit colonisé comme l'Algérie. L'Empire Othoman aussi n'a pas pu mettre pied au Maroc. Par ailleurs, le Maroc a étendu son influence sur tout le Nord-Ouest de l'Afrique et par ce fait il conditionne la paix et le développement sur l'axe Nord-Sud.
Le polisario existe, car on en parle, mais en vérité, il n'a aucune reconnaissance internationale, et les gens à Tindouf veulent rentrer». - Pensez-vous que cette carte identitaire est derrière les victoires diplomatiques obtenues dernièrement par le Royaume ? - Bien sûr. Toutefois, j'estime qu'on n'a pas suffisamment utilisé cet outil de l'Histoire. C'était tellement évident pour les Marocains qu'ils n'en parlaient pas. Tandis qu'en face on brandissait en permanence les droits de l'Homme, le droit onusien sur la décolonisation et d'autres sujets du genre. Les Marocains, pour leur part, contestaient. Or, ce n'est pas ça le sujet car la souveraineté du Maroc sur le Sahara est plus que millénaire et elle est inscrite dans l'ordre des faits. Et ce genre d'arguments anéantit toutes les thèses modernes, malheureusement, ils n'ont été utilisés que tardivement par la diplomatie marocaine. - Dans votre livre, vous dites que le «polisario» n'existe plus. Pouvez-vous expliquer cette idée ? - Il n'existe plus pour plusieurs raisons. Premièrement, car les Sahraouis qui sont à Tindouf, à mon avis, ne se reconnaissent plus au polisario. Ils sont martyrisés, ils sont privés de liberté, leur santé est aujourd'hui très aléatoire et nous savons, aujourd'hui, que le Covid a été une expérience scandaleuse pour les habitants de Tindouf. Cela dit, le polisario existe, car on en parle, mais en vérité, il n'a aucune reconnaissance internationale et les gens à Tindouf veulent rentrer, mais on les empêche de le faire. Le front séparatiste ne compte plus que quelques vieux « militants », comme il y en a partout, et quelques irréductibles qui ne représentent plus rien. Mais c'est un outil algérien que le régime utilise comme un jouet, selon les besoins. Donc, le polisario n'existe pas, car le polisario c'est l'Algérie. - Un mois et demi après le verdict du tribunal européen sur les accords de pêche et agricole entre le Maroc et l'UE, les 27 comptent interjeter appel contre ce jugement. Quels sont les tenants et aboutissants de cette décision ? - Ça veut tout simplement dire que le verdict n'est pas applicable, donc on renvoie à la prochaine audience. Ce qui veut dire que les accords sont pleinement exécutoires. D'ailleurs, les règles du droit international n'ont même pas été discutées. Il est simplement dit, premièrement, que le polisario représente les intérêts des Sahraouis et, deuxièmement, que les Sahraouis n'ont pas été consultés spécialement sur ces accords. Est-ce qu'un Etat doit consulter son peuple à chaque fois qu'il souhaite conclure un accord international ? C'est absurde. Recueillis par S. J. Synopsis « Le Sahara marocain : L'espace et le temps »
« Lorsque j'avais quatre ou cinq ans, un rêve un peu inquiétant m'entraînait vers le sommeil. Une peinture accrochée en face de mon lit représentait un homme et un chameau, au repos, à l'ombre d'un arbre éthique, sur fond de l'immensité désertique. Je savais qu'il s'agissait du Sahara. Le nom avait quelque chose d'un peu effrayant. Cette assonance a résonné en moi comme un cri étrange. J'éprouvais en même temps une impression de force. Un peu plus tard, je lus Saint-Ex dans Courrier Sud, trop tôt sans doute pour en saisir l'essentiel, mais j'en ai gardé l'idée d'un infini de l'espace et du temps ouvert aux hommes libres. De l'océan Indien à l'océan Atlantique, ce grand désert sépare au Nord le pays des blancs et au Sud le pays des noirs. Dans les temps anciens, il était Océan. Sur les mers, il y a des marins, sur le sable, des nomades, et pour tous la quête de l'eau nécessaire à la vie. Le mot frontière y a été inconnu jusqu'à l'arrivée de la «civilisation». Le Sahara est donc tchadien, nigérien, malien, mauritanien, marocain, algérien, tunisien, libyen... etc. C'est le «marocain» qui est raconté ici, par la géographie, l'Histoire, l'économie et le droit. Cette langue de plus de 1000 km, qui sort du Maroc pour aller lécher la Mauritanie, est humectée par l'humidité océane. Ce Sahara atlantique est donc placé sous des auspices bienfaisants. Ses pâturages à chameaux en ont fait un espace envié. Envié il l'a été plus encore à la fin de la période coloniale, quand l'Algérie et l'Espagne ont tenté de l'établir dans la forme d'un Etat, qui, ne pouvant être qu'artificiel, leur aurait permis de poursuivre la domination coloniale, mais la tentative a échoué. Il faut savoir que, depuis 1400 ans, le Maroc a été perçu dans le grand Ouest africain, comme une autorité spirituelle et politique. Les liens coutumiers entre les hommes du Sud et du Nord sont si nombreux qu'ils rendent absurde l'idée même d'une identité saharienne distincte. Le Sahara marocain ne peut donc être compris en dehors du Maroc. 2300 km entre Tanger et la Mauritanie, réservent évidemment des particularismes locaux. Ceux du Sud sont proches de ce qu'était il y a peu encore la Californie. Un observateur attentif y trouvera les germes d'une aussi belle aventure. Ce livre doit l'y aider ».