Retour sur les détails de la sécurisation du passage frontalier entre le Maroc et la Mauritanie qui a signifié le point de bascule dans la nouvelle réalité qui marque le dossier du Sahara marocain. Le samedi 13 novembre est la date du premier anniversaire de la sécurisation du passage d'El Guergarate et la fin des perturbations de la circulation entre le Maroc et la Mauritanie. En l'espace d'une année, le tronçon routier a été amélioré et les deux kilomètres qui séparent les postes frontaliers marocain et mauritanien qui étaient auparavant un no man's land surnommé Kandahar ont été goudronnés. Pour remonter aux origines d'une opération qui représente le point de bascule dans la question du Sahara, il faut revenir en août 2016 où se jouent les prémices des évènements de novembre 2020. Premières tensions en 2016 Le Royaume entreprend durant cette période une opération d'assainissement dans ce qui était une zone démilitarisée. C'est une opération d'asphaltage conduite sous la protection d'unités de la Gendarmerie Royale qui avaient également pour mandat de mettre fin aux activités de contrebande et de commerce illicite dans la zone. « Cette étape, qui s'inscrit dans le cadre des opérations d'assainissement menées au niveau de la région d'El Guergarate par les services de sécurité et de douane, vise à garantir la sûreté et la sécurité des usagers de cet axe routier et faciliter la circulation et le transit des marchandises dans de bonnes conditions », explique un communiqué officiel publié au moment des faits. Une opération qui débouchera sur un face-à-face entre les forces de sécurités marocaines et des éléments armés des séparatistes du Polisario qui ont établi leurs positions à une centaine de mètres de celles occupées par les gendarmes. Un stand-off qui durera jusqu'en février 2017 et prendra fin avec le retrait unilatéral des éléments marocains le 26 février 2017. La région reprend ainsi sa routine de zone de transit, et ce, jusqu'au 18 octobre 2020, date à laquelle, selon les données remontées par la MINURSO, commencent à être enregistrées des manifestations (9 selon l'ONU), dans la zone de Bir Lahlou, appelant notamment à la fermeture définitive de la route reliant El Guergarate à la Mauritanie. Début des perturbations Des protestations menées par des civils mêlant hommes, femmes et enfants et qui, jusqu'au 29 octobre, se dispersent « pacifiquement le même jour, sans atteinte à la sécurité », selon le rapport transmis au Secrétaire Général des Nations Unis par la MINURSO. A partir du 21 octobre, un groupe d'une cinquantaine de personnes est détecté dans la zone d'El Guergarate. Ces « manifestants » mettent en place un barrage routier obstruant toute circulation entre le Maroc et la Mauritanie, prenant de facto en otage les routiers et les voyageurs dans les deux sens. Le même jour, le coordonnateur du Maroc auprès de la MINURSO a exprimé sa « préoccupation au sujet de la manifestation orchestrée par le Front Polisario » et a demandé le retrait immédiat et inconditionnel dudit Front dans la zone tampon. Le représentant du Royaume auprès de la Mission des Nations Unies a également fait observer que le Maroc « se réservait le droit de prendre toutes les mesures nécessaires, y compris une intervention sur le terrain, pour assurer la libre circulation du trafic civil et commercial et rétablir le statu quo ante ». 24 heures plus tard, les observateurs onusiens sont empêchés par les séparatistes d'effectuer des « vérifications complètes de la zone sur le terrain », le même jour sont détectés dans la zone, grâce à des reconnaissances aériennes, 12 séparatistes armés et 8 véhicules légers de combat, dont 2 étaient équipés d'armes lourdes. Une partie des éléments se serait retirée de la zone le 29 octobre. Du côté marocain, 16 véhicules des Forces Armées Royales (FAR) appartenant aux unités du génie militaire et transportant des engins de terrassement lourds sont dépêchés dans la zone. Le 6 novembre, c'est au tour d'un contingent des FAR composé de 250 véhicules prêts au combat qui font leur apparition à 12 km d'El Guergarate. Le 7 novembre, à l'occasion du 45ème anniversaire de la Marche Verte, le Souverain a souligné dans son discours tenu à l'occasion son rejet des « pratiques inacceptables visant à perturber la circulation entre le Maroc et la Mauritanie », tout en affirmant que le Maroc « répondrait avec la plus grande fermeté et détermination à toute action ou tentative visant à porter atteinte à la sécurité et à la stabilité de ses provinces du Sud ». Opération chirurgicale des FAR Un discours qui sera suivi d'une lettre adressée le 12 novembre par le Souverain au Secrétaire Général de l'ONU, Antonio Guterres, dans laquelle il est prié de « redoubler d'efforts pour mettre fin rapidement et définitivement aux actes de provocation intolérables et déstabilisants », avant d'ajouter que « le Royaume du Maroc, en vertu de ses responsabilités et dans le plein respect de la légalité internationale, se réservait le droit d'agir au moment et de la manière qu'il juge opportuns, afin de sauvegarder le statut de la zone et de rétablir la libre circulation ». Le lendemain, soit le 13 novembre, les FAR s'avancent dans la zone tampon, alors que les séparatistes présents dans la zone s'enfuient précipitamment face à l'avancée de la colonne marocaine. Peu après, un échange de tirs est observé, sans qu'aucune victime de part et d'autre ne soit relevée. Une fois la zone sécurisée, les éléments du génie militaire réalisent en un temps record une extension de 6 Km du mur de sécurité permettant de sanctuariser la zone frontalière. Un chantier qui sera suivi de la modernisation et l'agrandissement du poste frontière le 19 novembre. Près d'un mois plus tard, cette opération rondement menée sera couronnée par la reconnaissance le 10 décembre 2020 par les Etats-Unis de la souveraineté marocaine sur ses Provinces du Sud. S. A L'info...Graphie Propagande Guerre imaginaire
Suite à la libération du passage d'El Guergarate, les séparatistes du Polisario se sont empressés de déclarer la fin du cessez-le-feu et « la reprise de la lutte armée ». Une annonce faite le 14 novembre 2020 et qui a été suivie des mois durant par les fameux « partes de guerra » du Polisario qui dépeignait un Sahara à feu et à sang, comptabilisant des pertes record du côté marocain et avançant des bombardements sur l'ensemble des Provinces du Sud. Des affrontements démentis par le Royaume comme par la MINURSO qui n'évoque que des « hostilités de faible intensité, dont l'incidence a diminué depuis janvier dernier et s'est principalement concentrée dans la région de Mahbas ». Une stratégie de propagande qui, au lieu de porter les fruits escomptés, n'a fait que renforcer la position marocaine et sa proposition d'autonomie, comme unique solution viable à un conflit dont ne bénéficient que les apparatchiks du Polisario et leurs parrains.
Infrastructures La vie reprend ses droits dans la zone
La sécurisation de l'ancienne zone tampon surnommée Kandahar par ses usagers a métamorphosé les 4 km qui séparent le Maroc et la Mauritanie. En l'espace d'une année, le poste frontière a été agrandi et modernisé. S'y ajoute le lancement d'une série de chantiers d'infrastructures visant à renforcer la qualité de vie dans la région. A l'image du démarrage de la construction d'une agence d'Al Barid Bank, en vue de mieux accompagner ses clients dans la région, en leur offrant plus de proximité et de compléter sa couverture territoriale. La zone connaît également le lancement du projet de deux zones logistiques d'El Guergarate et de Bir Gandouz. Conçues sur une superficie de 30 hectares chacune, ces zones seront la porte commerciale et logistique de l'Afrique subsaharienne en abritant des activités logistiques, commerciales et inindustrielles. Quelques jours avant, de grands projets structurants à El Guergarate et Bir Gandouz ont été lancés par le directeur général de l'Office National de l'Electricité et de l'Eau Potable (ONEE), Abderrahim El Hafidi, à l'occasion du 46ème anniversaire de la Marche Verte. Dans ce sillage, l'ONEE a programmé plusieurs projets au niveau de la province d'Aousserd, dans l'optique d'accompagner le développement socio- économique des communes et centres émergents. Au niveau d'El Guergarate, M. El Hafidi a lancé les travaux d'électrification de ce poste frontalier via son raccordement au réseau électrique du Centre de Bir Gandouz avec la construction d'un réseau de distribution moyenne tension et basse tension, le renforcement de la centrale de Bir Gandouz et la réalisation d'une centrale solaire avec système de stockage.
3 questions à Mohamed Mae El Aïnine «L'ouverture d'El Guergarate est un acquis stratégique aussi bien pour le Maroc que pour l'Europe et l'Afrique »
Mohamed Mae El Aïnine, ancien membre du Comité Exécutif de l'Istiqlal et ex-ambassadeur dans plusieurs pays, analyse la logique de l'escalade algérienne vis-à-vis du Maroc. - Un an après la libération du poste frontalier d'El Guergarate, quels sont les acquis obtenus par le Maroc sur le plan diplomatique ? - Le Maroc a enregistré plusieurs points positifs à ce sujet, il a chassé les mercenaires d'un territoire qui est le sien et c'est déjà un bon acquis. Il a ouvert sa frontière avec toute l'Afrique subsaharienne, et bien sûr avec la Mauritanie, pays frère du grand Maghreb et pays avec lequel le Maroc partage des relations séculaires. Le royaume a facilité à tous les pays européens l'accès à l'Afrique subsaharienne, aussi l'ouverture d'El Guergarate est un acquis stratégique aussi bien pour le Maroc que pour l'Europe et l'Afrique. - L'affaire des camionneurs algériens pourra-t-elle menacer la sécurité du poste frontière qui est désormais ouvert même aux voyageurs ? - Cette attaque est tout à fait le fait de l'Algérie et des éléments séparatistes. La MINURSO a inspecté les deux camions calcinés sur place sans déterminer si l'attaque était de plein front ou de l'air, mais pour le commun des mortels, il est visible qu'ils étaient carbonisés de l'avant, ce n'est donc pas une attaque de drones. D'ailleurs, il est extraordinaire de voir que les camions étaient vides, alors que l'Algérie avait déclaré qu'il s'agit de véhicules transportant des marchandises vers la Mauritanie. Ces camions, qui n'avaient rien à faire dans cette zone, étaient là de façon préméditée, c'est un stratagème pour détourner l'attention des observateurs qui avaient suivi l'attaque des camionneurs marocains au Mali, et influencer l'enquête menée qui va incriminer l'Algérie et les éléments séparatistes. - Quel regard portez-vous sur l'aménagement de cette zone logistique ? - Cette zone sera un point économique très important pour la région et pour les différents investisseurs cherchant à avoir un pied à terre dans la zone extrême-Sud du Maroc. Elle permettra de rapprocher les entrepreneurs marocains et étrangers de l'Afrique subsaharienne.