Les Etats-Unis ont, pour la première fois, haussé clairement le ton face à Israël sur la colonisation, en critiquant « fermement » l'annonce de la construction de plus de 1.000 nouveaux logements en Cisjordanie occupée. « Nous sommes profondément préoccupés par le projet du gouvernement israélien », a déclaré le porte-parole de la diplomatie américaine Ned Price devant la presse. « Nous nous opposons fermement à l'extension des colonies, qui est totalement contraire aux efforts pour faire baisser les tensions et garantir le calme, et qui nuit aux perspectives de solution à deux Etats » israélien et palestinien, a-t-il ajouté. L'Etat hébreu a annoncé dimanche la construction prévue de 1.355 nouveaux logements dans des colonies juives de Cisjordanie, territoire occupé par Israël depuis 1967, une décision dénoncée par les Palestiniens. Ces nouveaux logements doivent s'ajouter aux quelque 2.000 annoncés en août par les autorités et qui devaient obtenir cette semaine un feu vert définitif du ministère de la Défense. « Le renforcement de la présence juive (en Cisjordanie) est essentiel dans la vision sioniste », avait déclaré le ministre de la Construction Zeev Elkin, membre du parti de droite Nouvel Espoir, qui fait partie de la coalition gouvernementale dirigée par Naftali Bennett. « La légalisation rétroactive des colonies illégales inacceptable » « Nous estimons aussi que tout effort visant à légaliser rétroactivement des colonies illégales est inacceptable », a encore réagi Ned Price à Washington, assurant que de hauts responsables américains avaient fait part de ces positions « directement » à leurs homologues israéliens. Il s'agit d'une des positions les plus fermes prises par les Etats-Unis à l'égard de la colonisation israélienne dans les territoires palestiniens depuis l'arrivée du président Joe Biden à la Maison Blanche en début d'année. Son prédécesseur Donald Trump, qui avait multiplié les gestes à l'égard d'Israël et de son Premier ministre de l'époque, son « ami » Benjamin Netanyahu, avait lui adopté une position nettement plus compréhensive. Son secrétaire d'Etat Mike Pompeo avait même modifié en 2019 la doctrine américaine, affirmant que Washington ne jugeait plus les colonies comme contraires au droit international, une décision célébrée par Israël mais dénoncée par les Palestiniens. Il était d'ailleurs devenu en novembre dernier, après la défaite de Donald Trump à la présidentielle, le premier chef de la diplomatie américaine à se rendre dans une colonie en Cisjordanie occupée. La colonisation israélienne avait connu un vif essor, sous l'impulsion de « Bibi » Netanyahu, pendant l'ère Trump. Le gouvernement Biden, officiellement opposé à la colonisation, s'était montré prudent ces derniers mois, se bornant la plupart du temps à appeler Israël et les Palestiniens à s'abstenir de toute mesure « unilatérale » susceptible d'attiser les tensions, y compris en matière de colonisation. Un obstacle majeur à la solution à deux Etats L'équipe démocrate semble désormais se rapprocher de la position de l'exprésident Barack Obama qui, à la fin de son mandat en 2016, avait permis l'adoption d'une résolution historique de l'ONU condamnant les colonies israéliennes. De son côté, l'Union européenne a demandé lundi à Israël de mettre un terme aux constructions de logements dans les colonies de Cisjordanie et de ne pas donner suite aux appels d'offres annoncés la semaine dernière. «Les colonies sont illégales au regard du droit international et constituent un obstacle majeur à la réalisation de la solution à deux Etats et à une paix juste, durable et globale entre les parties », a déclaré un porte-parole de la Commission européenne dans un communiqué. Le bloc européen a affirmé à plusieurs reprises qu'il ne reconnaîtrait aucune modification des frontières d'avant 1967 sur laquelle la Palestine et Israël ne s'accorderaient pas. Dimanche, les autorités israéliennes ont publié des appels d'offres pour la construction d'environ 1.300 nouveaux logements dans des colonies de Cisjordanie, sur des terrains revendiqués par les Palestiniens. Ces colonies installées sur les territoires palestiniens occupés par Israël depuis 1967 sont en effet jugées illégales par les Nations unies, et une grande partie de la communauté internationale voit en elles un obstacle majeur à la paix.
Même les oliviers subissent les affres de l'occupation
La saison des récoltes des olives bat son plein en Cisjordanie. C'est une époque de l'année censée être importante pour les Palestiniens et leurs familles. Mais la saison vire trop souvent au cauchemar à cause des attaques ritualisées des colons israéliens, des arbres vandalisés ou encore à cause de l'interdiction d'accès à leurs champs d'oliviers. C'est le cas de tous les propriétaires ayant des terres dans la « Seam Zone », située entre le mur de séparation et la ligne verte : il y a bien des champs d'oliviers, des olives prêtes à être récoltées, mais il y a devant une route bétonnée, des grillages et un checkpoint avec une barrière jaune. À Qaffin, le mur de séparation, construit il y a 20 ans, sépare les habitants de leurs terres, explique Taysir Harashe, l'ex-maire du village. « L'histoire de ce mur, c'est qu'il confisque 450 hectares du village de Qaffin, alors qu'il est construit à plus de 2km de la frontière. Et si les Israéliens donnaient 2500 permis au début du mur, désormais on en a plus que 150 ». Des permis sont nécessaires pour que les Palestiniens puissent accéder à leurs terres et ainsi récolter leurs olives, leur principale source de revenus. Pourtant 73% des demandes de permis sont rejetées par l'armée israélienne, selon l'ONG israélienne HaMoked. Et ce, toujours pour des raisons arbitraires, même pour les Palestiniens ayant obtenu le précieux sésame, l'accès est réduit. Le point de passage est ouvert trois fois 15 minutes dans la journée.