Depuis leur acquisition suite à une décision Royale, la contribution des 5 Canadairs mobilisés dans la lutte aérienne contre les incendies a été décisive dans la protection des vies, des biens et des forêts. Les Français les surnomment les « Pélicans jaunes ». Les Canadairs, avions spécialisés dans la lutte aérienne contre les incendies, ont récemment défrayé la chronique alors que plusieurs pays méditerranéens connaissent des feux de forêts d'une ampleur parfois sans précédent. Véritables bateaux volants, les canadairs sont des avions amphibies considérés par beaucoup comme les meilleurs au monde comparativement avec d'autres modèles qui ont la même fonction. Leur atout ? Être capables d'économiser un temps précieux pendant les opérations en écopant l'eau directement dans les barrages ou encore dans la mer... sans jamais s'arrêter. « Pendant l'opération d'écopage, un Canadair a besoin d'un plan d'eau qui dispose d'une longueur minimale de 1200m, une largeur entre 50 et 100m et une profondeur de 2m. La manoeuvre dure 12 secondes. Durant ce laps de temps, l'avion charge 6 tonnes d'eau », explique Fouad Assali, Chef du Centre National de Gestion des Risques Climatiques Forestiers (CNGRCF) affilié au Département des Eaux et Forêts. Une décision stratégique L'histoire des Canadairs au Maroc remonte à l'année 2010. « L'achat des Canadairs s'est fait après la succession de plusieurs feux de forêts qui ont sévi entre 2006 et 2009. C'était une décision stratégique prise par SM le Roi Mohamed 6 qui dénotait une clairvoyance et une volonté certaine d'investir dans la préservation du domaine forestier. L'acquisition des Canadairs s'est donc faite dès l'années 2011 », raconte le forestier qui décrit la joie des responsables et divers intervenants dans la lutte contre les incendies de forêts suite à cette décision. Aujourd'hui, 10 ans après la livraison au Maroc de 5 Canadairs « dernier cri et flambant neuf », les effets de cette décision stratégique ont largement eu le temps de se faire ressentir. « Comparativement avec les statistiques antécédentes des feux de forêts, cette dernière décennie a connu une baisse importante des superficies endommagées par les incendies. Une diminution de plus de 25 % qui est, entre autres, liée aux interventions de ces avions », assure notre interlocuteur. L'atout des barrages et des aéroports L'efficacité des interventions est également due à l'existence au Maroc d'infrastructures qui facilitent le travail des Canadairs. « La vision des barrages a offert au Maroc une distribution de plans d'eau et de lieux d'écopage qui est très favorable. Quel que soit l'endroit où nous avons un incendie de forêt, il se trouve toujours un barrage qui est à quelques dizaines de kilomètres à vol de Canadair. Ça nous donne cette possibilité de voir l'avion revenir sur le feu en une dizaine de minutes pour larguer 6 tonnes d'eau à chaque fois », poursuit Fouad Assali. L'autre variable à prendre en considération est la nécessité de refaire le plein. « Le Canadair a une autonomie de vol de trois heures après lesquelles il doit atterrir pour une durée de 30 à 40 minutes le temps de faire une vérification de son état et de l'approvisionner en carburant. Là aussi, le maillage important d'aéroports civils et militaires dont dispose le Royaume facilite la tâche aux pilotes », précise le chef du Centre National de Gestion des Risques Climatiques Forestiers. Des pilotes chevronnés Piloter un « pélican jaune » demande un très haut niveau de savoir-faire puisque le risque est un facteur qu'il faut savoir gérer à tout moment. L'écopage et le largage sont des manoeuvres qui demandent une précision sans faille, car l'équilibre de l'avion se retrouve modifié au moment où il charge ou se déleste de 6 tonnes d'eau. Voler à 30 mètres du sol, en prenant en considération le danger des flammes, le sens du vent, la nuisance liée à la fumée et les contraintes du réapprovisionnement, nécessite également un savoir-faire et une concentration sans faille. Pour ces raisons, l'équipe de pilotage est remplacée après chaque 6 heures de vol. Après une décennie de leur acquisition, les Canadairs ont non seulement contribué à baisser drastiquement les dégâts des feux de forêts, mais ont également permis de constituer une équipe de pilotes et un staff techniques (affilié au Forces Royal Air) qui font preuve d'un professionnalisme et d'une efficacité remarquables. Nous leur rendons ici hommage, ainsi qu'à toutes les chevilles ouvrières qui luttent au quotidien pour préserver les vies, les biens et les forêts.
Oussama ABAOUSS L'info...Graphie 3 questions à Fouad Assali, chef du CNGRCF « Il existe une synergie formidable entre les divers intervenants. Chacun est précieux et irremplaçable »
Chef du Centre National de Gestion des Risques Climatiques Forestiers affilié au Département des Eaux et Forêts, Fouad Assali répond à nos questions.
- Quel bilan faites-vous du rôle joué par les Canadairs, après 10 ans de leur acquisition ? - Aujourd'hui, les retombées de la décision Royale et visionnaire de doter notre pays de 5 Canadairs se matérialise par une baisse drastique des superficies endommagées par le feu. Le Maroc a également renforcé son autonomie puisque le recours à la coopération internationale pour éteindre un incendie n'a plus jamais été nécessaire depuis l'acquisition de ces avions. - Qu'en est-il du degré d'autonomie concernant la maintenance et la réparation de ces avions ? - Le Maroc dispose actuellement d'une autonomie absolue en ce qui concerne l'utilisation de ces appareils (les pilotes, les formateurs), mais aussi en termes d'entretien, de réparation et de maintenance. Notre pays peut se prévaloir d'un savoir-faire extraordinaire des Forces Royales Air (FRA) en matière de gestion de cette flotte de Canadairs. - Quels sont les autres acteurs impliqués dans la lutte contre les feux de forêts ? - La lutte contre les feux de forêts est la vocation de centaines d'hommes et de femmes qui se mobilisent chaque jour. Je tiens ici à saluer et à rendre hommage à tous les intervenants de la Protection Civile, de la Gendarmerie Royale, des Forces Auxiliaires, du Département des Eaux et Forêts, des Forces Armées Royales, mais également des autorités territoriales et de la société civile. Il existe une synergie formidable entre les divers intervenants dans la lutte contre les incendies de forêts. Chacun est précieux et irremplaçable dans le rôle qu'il joue. Recueillis par O. A.