Alors que la Maison Blanche menace de fermer son ambassade à Bagdad, les attaques contre des cibles US se poursuivent. Au grand dam des autorités irakiennes. Des milices soutenues ont lancé des roquettes ciblant des troupes américaines qui se sont abattues près de l'aéroport d'Erbil, dans la région semi-autonome du Kurdistan irakien, a déclaré mercredi une agence de sécurité kurde, quelques heures après que le Premier ministre irakien a promis de protéger les missions étrangères. Le service de lutte contre le terrorisme du Kurdistan irakien a imputé cette attaque aux Forces mobilisées du peuple (PMF), groupe paramilitaire irakien composé essentiellement de milices chiites soutenues par Téhéran. Six roquettes ont été tirées. Quatre ont atterri à proximité de l'aéroport d'Erbil et deux n'ont pas explosé, d'après la même source. Un porte-parole de la coalition menée par les Etats-Unis en Irak a déclaré que les premiers éléments indiquaient que les tirs n'avaient pas atteint les troupes de la coalition à Erbil. «Il n'y a pas eu de dégâts ni de victime. L'incident est en cours d'enquête», a dit sur Twitter le colonel Wayne Marotto. «Dangereuse» la menace US de quitter l'Irak L'attaque qui n'a pas été revendiquée, est survenue quelques heures après que le Premier ministre irakien Mustafa al Kadhimi a promis, lors d'une réunion avec de hauts diplomates, de protéger les missions étrangères et de limiter le nombre d'armes détenues par les forces gouvernementales, après que Washington a menacé de fermer l'ambassade américaine à Bagdad. Le chef de la diplomatie irakienne Fouad Hussein a jugé «dangereuse» la menace américaine de quitter l'Irak, après que le secrétaire d'Etat Mike Pompeo a posé la semaine dernière un ultimatum à l'Irak: soit les attaques cessent, soit Washington ferme son ambassade et rappelle ses 3.000 soldats et diplomates. Sur Twitter, Hoshyar Zebari, exchef de la diplomatie irakienne, a dénoncé «une nouvelle escalade visant à troubler la sécurité de l'Irak par les mêmes groupes qui attaquent l'ambassade américaine à Bagdad et ses convois». A Bagdad, le commandement militaire irakien a, lui, accusé des «groupes terroristes» qu'il n'a pas identifié et annoncé la suspension de responsables militaires locaux. Rhétorique guerrière contre «l'occupant américain» Depuis l'ultimatum de Washington, les chefs du Hachd et des responsables chiites se sont publiquement démarqués des attaques anti-américaines. Mais les plus radicaux du camp pro-Iran ont continué de manier la rhétorique guerrière contre «l'occupant américain». Un retrait américain d'Irak signerait la fin de la coalition anti-jihadiste, alors que le groupe Etat islamique (EI) menace toujours, s'inquiètent des diplomates. Un retrait américain pourrait surtout porter un rude coup au Premier ministre, Moustafa alKazimi, reçu il y a deux mois en grandes pompes à la Maison Blanche. D'octobre 2019 à juillet 2020, une quarantaine d'attaques à la roquette ont visé l'ambassade des Etats-Unis et des bases irakiennes abritant des soldats américains. Depuis la visite en août de M. Kazimi à Washington, le rythme des attaques s'est accéléré. Une quarantaine d'attaques ont ainsi visé en deux mois l'ambassade, des bases militaires et des convois logistiques de sous-traitants irakiens travaillant pour l'armée américaine. «Attaquer des ambassades, c'est attaquer le gouvernement car il est responsable de leur protection», a estimé M. Hussein. Ces attaques sont depuis quelques mois revendiquées par d'obscurs groupes, des faux-nez des partis et factions pro-Iran selon des experts. Si cette tragédie a profondément choqué l'opinion irakienne, la menace qui pèse sur les Américains est sans commune mesure avec d'autres, a nuancé M. Hussein. «Certains à Washington évoquent Benghazi, mais cette analyse est erronée, tout comme la décision» d'un retrait possible d'Irak, a-t-il ajouté, en référence à la mort de quatre Américains, dont l'ambassadeur, dans une attaque contre la représentation américaine en Libye en 2012. «Nous espérons que les Etats-Unis reviendront sur leur décision», pour l'instant «préliminaire», a-t-il dit. Selon les experts, Washington joue une nouvelle fois la carte de l'Irak en pleine campagne électorale.