La régulation des médias à l'ère du numérique a une finalité éminemment démocratique, a souligné, jeudi à Rabat, la présidente de la Haute autorité de la communication audiovisuelle (HACA) et vice-présidente en exercice du réseau des instances africaines de régulation de la communication (RIARC), Latifa Akharbach. S'exprimant lors d'une conférence internationale organisée par la HACA sous le thème: « la régulation des médias dans un environnement numérique, mobile et social: impératifs d'adaptation et enjeux de refondation », Akharbach a indiqué que la régulation des médias a une finalité éminemment démocratique, soulignant, au passage, la nécessité pour les régulateurs des médias de renforcer leurs compétences face à une sphère numérique où les sociétés sont disponibles en permanence pour la connexion. Les sociétés expriment de plus en plus une demande de régulation eu égard aux multiples effets culturels, démocratiques, sociétaux et économiques de la communication digitalisée et globalisée, a-t-elle dit, soulignant la contribution des régulateurs à la réflexion autour de l'adaptation de la régulation des médias à l'ère numérique. « Les régulateurs, de par leur mandat spécifique et avec leurs outils propres, se posent des questions d'intérêt général: comment préserver les individus, les sociétés, et la communauté humaine globale des risques de manipulation, de la mise en danger du vivre-ensemble, de l'atteinte à la dignité humaine, de la limitation du libre arbitre du citoyen, de la diffusion du discours de haine et de la violation de la vie privée, etc », a estimé Akharbach, ajoutant que les pouvoirs publics se tournent aussi vers les régulateurs, lesquels « ne peuvent être un recours efficace que si leur autonomie est préservée et respectée ». Pour sa part, le président du Conseil national de la communication du Cameroun (CNC) et président en exercice du RIARC, Peter Essoka, a souligné que la révolution technologique a entraîne une révolution comportementale, d'où la nécessité pour une réorganisation de la chaîne de valeur du secteur de l'audiovisuel, autour de ses fonctions de création, de production, d'édition et de distribution du contenu. « Face à des mutations profondes, la régulation audiovisuelle est plus que jamais appelée à s'adapter », a-t-il fait remarquer, ajoutant que la régulation, sous sa forme actuelle, est devenue « inadaptée » à un environnement numérisé. De son côté, le président de la Haute autorité indépendante de la communication audiovisuelle de la Tunisie (HAICA) et président du réseau francophone des régulateurs des médias (REFRAM), Nouri Lajmi, a indiqué que cette rencontre vise à discuter d'une problématique qui interpelle les régulateurs vis-à-vis de leur rôle dans l'ère du numérique, où les plateformes et les réseaux sociaux envahissent la sphère médiatique. « Les réseaux sociaux sont devenus un outil d'échange d'informations » et cela pose un problème de mal-information et de « fake news », a-t-il fait savoir, y voyant de « nouveaux défis pour nous en tant que régulateurs, d'où le besoin d'affiner nos outils afin de garantir plus de démocratie, plus de liberté », et des médias et un journalisme de meilleure qualité. Cette conférence de deux jours, qui s'inscrit dans le cadre du mandat de la HACA au titre de sa vice-présidence du RIARC et de sa contribution à la mise en oeuvre de la feuille de route 2020-2021 du REFRAM, vise à croiser les perspectives et à contribuer à une réflexion collective autour de la question de l'adaptation de la régulation des médias à l'ère du numérique. Cet événement connait la participation de 21 autorités de régulation d'Afrique, de l'espace francophone et du monde arabe, ainsi que d'autres réseaux de régulateurs dont notamment le Forum des Autorités de Régulation de l'Audiovisuel des Etats-membres de l'Organisation de la Coopération Islamique (IBRAF) et la Plateforme des Régulateurs de l'Audiovisuel Ibéro-américains (PRAI). Outre les instances de régulation des médias et de nombreux experts et organismes internationaux, cette rencontre a vu la participation des présidents et directeurs généraux des opérateurs publics et privés de l'audiovisuel, de journalistes, d'acteurs de la société civile, ainsi que de représentants des milieux académiques marocains et étrangers. Les travaux de la conférence portent sur quatre axes, à savoir « les besoins d'une régulation rénovée dans un environnement numérisé et globalisé », « les médias classiques-nouveaux médias, dynamiques de la concurrence et contraintes de la régulation », « l'autorégulation et la co-régulation, avenir de la régulation » et « la régulation des médias à l'épreuve des aspirations citoyennes ». Les travaux de cette conférence se poursuivront vendredi par une session réservée aux instances membres du RIARC, intitulée « Quelles réponses africaines aux défis de la transformation numérique des médias: problématiques économiques et attentes des citoyens ? ».