Suite aux terribles attentats du 13 novembre dernier, le Président français, François Hollande a pris une mesure, réclamée par l'extrême droite, combattue par la gauche depuis des années. Les binationaux convaincus du terrorisme seront déchus de leur nationalité française. Cela crée une véritable division au sein de la classe politique française. A gauche, c'est «une ligne rouge qui a été franchie», à droite, les vrais républicains ne vont pas voter ce projet de loi. Cette approche remet en cause un principe fondateur, celui de l'égalité des citoyens. Un Français né en France, de père Français, qui est aussi Algérien, Marocain, Tunisien ou autre, parce que cette nationalité est inaliénable, peut être déchu de sa nationalité française. Cela signifie qu'il y a deux Français, ceux de souche, et ceux qui sont issus de l'immigration, et qu'ils ne sont pas égaux. Aux USA, l'une des plus grandes blessures du récit national, c'est le fait d'avoir emprisonné les Américains d'origine japonaise lors de la seconde guerre mondiale. Devant des faits extraordinaires, les politiques cèdent à l'émotion du moment et suivent la vox-populi en écrabouillant les principes fondateurs. Cela a toujours été contreproductif. L'efficacité de la mesure proposée est nulle pour la dissuasion négative dans le combat contre le terrorisme. Un Jihadiste, qui est prêt à mourir, à se donner la mort, n'est pas sensible au risque de perdre la nationalité d'un pays qu'il combat, qu'il hait, qu'il considère comme une zone de guerre, «Bilad Harb». Par contre, cela relègue tous les musulmans à une condition inférieure. Le prosélytisme Jihadiste va faire prospérer sa propagande. «Ils ne vous acceptent pas et vous considèrent comme des citoyens de seconde zone, même quand vous l'êtes, depuis plusieurs générations», voilà le message. Et il peut avoir de l'effet, surtout si d'autres pays européens suivent l'exemple français. Ce qui s'est passé à Ajaccio n'est pas un simple fait divers. Des Français ont attaqué d'autres Français sur la base de leur religion et de leur origine. Le fait que les corses ont élu des indépendantistes ne peut pas occulter ce fait. Ce que l'on peut attendre des politiques, surtout d'hommes de gauche, c'est qu'ils soient fermes sur les principes de la république, qu'ils apaisent les tensions et qu'ils se refusent à toute stigmatisation. François Hollande et Valls ont fait exactement le contraire. Ils nourrissent les réflexes identitaires, les communautarismes qui minent le contrat républicain. La question de la double nationalité, de la double allégeance doit être traitée autrement. Il n'est pas normal qu'un haut responsable d'un pays garde un autre passeport ; par respect de la souveraineté de ce pays. Mais la mondialisation n'est pas un concept, c'est un fait historique, et le mouvement des populations est une vérité. Il faut en faire une richesse et non un risque. C'est toute la problématique de l'intégration, qui n'est en rien l'assimilation obligatoire. Sous l'émotion des attaques barbares, François Hollande a pris un engagement inconsidéré devant la représentation nationale. Malgré le refus de la gauche et un vrai risque de rupture, il l'a maintenu, probablement en se projetant en 2017. Seulement la déchéance de la nationalité c'est l'installation de l'idée que les musulmans français ne le sont qu'à des conditions. Ce n'est pas l'idée que nous avions de la République issue de la révolution française, celle des droits de l'homme.