Copenhague, centre du monde. Arrivés en éclaireurs, les experts négocient le Yalta climatique. Les ministres débarquent lundi, les chefs d'Etat suivront pour conclure à l'arraché. Il est trop tôt pour imaginer un traité mais il y aura un accord. Et peut-être qu'il sera ambitieux. Ce genre de sommet est soumis à une dramaturgie implacable. Début en fanfare, assaut de pessimisme, polémique et suspense qui s'évanouissent in extremis. Clôture dans les félicitations réciproques. Sous la loupe des médias, les Maîtres du monde ne peuvent échouer. Restent ensuite aux spécialistes à faire l'inventaire des marchandages, loin du tintamarre et dans l'indifférence quasi générale. Copenhague est bien parti puisque les Américains ont découvert l'Amérique. Eureka ! L'agence fédérale de l'environnement convient enfin que les émissions de gaz carbonique nuisent à la santé publique. On voit ainsi que le climat a changé à Washington, depuis l'époque où les Etats-Unis refusaient de signer les accords de Kyoto. Barack Obama aurait fait à Copenhague un bouc émissaire très convenable, il est désormais attendu comme un prince au Danemark. On fera les comptes dans dix jours. En attendant, quelle meilleure illustration de la mondialisation que ce grand forum sur le climat ? Dans leurs bagages, les délégations devraient emporter le dernier rapport de la fondation Bertelsman. Il est épais, de quoi meubler les longues heures de voyage en avion. Il dresse tous les quatre ans l'état des lieux de la démocratie. On y apprend qu'à l'échelle du monde et avant même la crise financière, la situation des libertés s'est détériorée. Pas pour les deux milliards et demi de nos contemporains qui restent soumis à des régimes autoritaires ou à des dictatures. La démocratie est en recul pour les quatre milliards de nos contemporains qui vivent dans des pays démocratiques. La qualité de la vie publique s'y dégraderait. Tendance générale et indices concordants : la liberté de réunion, de manifestation, la participation aux élections, la liberté de la presse seraient presque partout en recul. Autre constat : l'écrasante majorité des pays en développement a gâché les années de croissance, n'en ayant pas profité pour résorber la pauvreté et les inégalités. Les conclusions du rapport Bertelsman sonnent l'alerte. Elles décrivent un monde de plus en plus fragile. C'est aussi l'écho que renvoie l'actualité au quotidien. La mondialisation emporte dans son sillage tout un cortège de crises, de paniques identitaires et de surenchères électorales. A Copenhague, les dirigeants de la planète se mobiliseront jeudi et vendredi prochain pour protéger les générations futures. Ils devraient rester le week-end et chercher comment défendre les libertés présentes.