Mzinda, province de Youssoufia. Sous un soleil implacable, au milieu d'un paysage brut, les machines grondent et les structures s'élèvent. Ici, à mi-chemin entre Benguerir et Youssoufia, le groupe OCP transforme cette terre sèche en l'épicentre d'un projet industriel titanesque. Mais au-delà des fondations et des échafaudages, c'est un changement d'échelle qui s'opère : celui d'un nouveau modèle de production pensé pour être intelligent, durable et intégré au territoire. Le projet de Mzinda n'est en réalité que l'une des deux jambes du Strategic Program Mzinda-Meskala (SP2M), mené par OCP Nutricrops, la filiale dédiée aux engrais du groupe OCP. En parallèle, un deuxième pôle industriel est en cours de développement à Meskala, dans la province d'Essaouira. « Ce programme vise à accroître notre capacité de production d'engrais de 9 millions de tonnes d'ici 2028, avec une réalisation en deux phases. La première portera sur une capacité de 4,5 millions de tonnes de TSP et TSP+, grâce notamment au complexe chimique de Mzinda, qui produira à lui seul 1,5 million de tonnes lors de cette première phase. Cette capacité sera ensuite doublée d'ici 2028 pour atteindre 8 millions de tonnes d'engrais exportables» », explique à L'Observateur du Maroc et d'Afrique, le directeur du programme manufacturing de ce projet, Ahmed Msalli. Le complexe, d'une superficie de 460 hectares se prépare à redéfinir les standards de l'industrie chimique en Afrique. Une vision industrielle à 360° Le complexe, d'une superficie de 460 hectares se prépare à redéfinir les standards de l'industrie chimique en Afrique. Spécialisé dans la production d'acide phosphorique, le site s'appuiera sur un système intégré et à haute capacité, alimenté en soufre solide acheminé par voie maritime puis transformé sur place. La chaleur générée par les unités sulfurique servira à produire de l'électricité via une centrale de cogénération de 195 MW, couvrant les besoins du complexe. « Actuellement, nous sommes en phase de génie civil sur l'ensemble des ateliers. L'état d'avancement varie entre 15 % et 30 %, avec une moyenne globale autour de 20 %. Les premiers démarrages industriels sont prévus pour juin 2026, tandis que les dernières lignes entreront en service d'ici fin 2026. La deuxième phase, elle, débutera à partir de 2028», confie Ahmed Msalli. Une usine à l'ère de l'industrie 5.0 Mais au-delà des capacités industrielles, c'est une véritable révolution de la philosophie de production qui s'opère à Mzinda. Le complexe a été imaginé dès sa conception selon les principes de l'industrie 5.0, où l'intelligence artificielle, l'automatisation poussée et les énergies renouvelables cohabitent pour une production plus intelligente, plus propre et plus résiliente. « L'intégralité des infrastructures fonctionnera exclusivement grâce à des sources d'énergie verte, comme le solaire et l'éolien », précise Ahmed Msalli. L'eau, elle aussi, suit ce principe de circularité : « Elle sera issue exclusivement de sources non conventionnelles — notamment la station de dessalement de Safi et les eaux usées traitées des STEP de Marrakech. » Le mot d'ordre ? Ne rien gaspiller, ne rien rejeter. « Aucun déchet liquide, aucun résidu solide. Zéro gaspillage. Nous recyclons tout. C'est une rupture radicale avec les anciens modèles. Mzinda sera un site zéro émission, zéro déchet, une référence mondiale », affirme-t-il. OCP Nutricrops vise à accroître la production d'engrais de 9 millions de tonnes d'ici 2028. Un corridor logistique stratégique Autour du complexe de Mzinda, c'est tout un écosystème logistique qui prend forme, pensé pour accompagner la montée en puissance industrielle du site. Un corridor multimodal est actuellement à l'étude pour fluidifier les flux de matières premières et de produits finis. Trois options sont sur la table : des pipelines, des conduites pour matières solides, et un réseau routier dédié. L'enjeu ? Trouver la combinaison optimale entre performance, fiabilité logistique et impact environnemental réduit. En parallèle, un port industriel de nouvelle génération est en cours de construction. Il assurera l'importation des intrants stratégiques, mais aussi l'exportation des engrais produits. Ses installations, conçues pour absorber une forte croissance des volumes, sont pensées selon les standards internationaux les plus exigeants. Le social au cœur du dispositif À Mzinda, OCP Nutricrops ne bâtit pas seulement une usine. Derrière les infrastructures, un chantier tout aussi stratégique est en marche : la création d'un écosystème humain et social.. Une zone industrielle voisine est déjà en projet pour accueillir des partenaires industriels, avec l'ambition de créer un véritable écosystème intégré. Pour réussir cette intégration, le groupe s'appuie sur des alliances solides avec l'Université Mohammed VI Polytechnique (UM6P), INNOVX et JESA. Ensemble, ils déploient une stratégie de formation calibrée pour répondre aux besoins du site, tout en valorisant les compétences locales. « Aujourd'hui, 4.000 emplois sont mobilisés sur les chantiers. Nous visons entre 60 et 65 % d'employabilité locale, grâce à un dispositif de formation spécifique et ambitieux », affirme Ahmed Msalli. Des milliers d'emplois sont créés sur les chantiers de Mzinda, avec un fort accent sur l'employabilité locale et la formation professionnelle pour les habitants des régions environnantes. Au delà d'une usine À travers SP2M, OCP Nutricrops veut aussi renforcer sa position de leader mondial des engrais sur mesure, en particulier en Afrique, où les défis agricoles sont majeurs. Le constat est sans appel : les rendements agricoles africains peinent à suivre une croissance démographique galopante. « Pour nourrir 2 milliards d'Africains à l'horizon 2050, il faudra augmenter la production agricole de 50 %. Et cela ne pourra se faire qu'à travers une fertilisation intelligente et durable », affirme Amine Debbarh, directeur des ventes et du développement chez OCP Africa. Il ajoute que « l'Afrique utilise 12 kg d'engrais par hectare. La moyenne mondiale est dix fois plus élevée. Notre mission, c'est de combler cet écart, sans compromettre la santé des sols ni l'environnement. »Nous voulons réduire cet écart. Pour y parvenir, OCP Nutricrops et OCP Africa misent sur une approche scientifique rigoureuse, fondée sur les 4R : le bon produit, à la bonne dose, au bon moment et au bon endroit. Le TSP et le TSP+, produits dans les nouveaux complexes comme celui de Mzinda, sont spécialement formulés pour répondre aux besoins des sols africains. « Il ne s'agit pas seulement de produire plus, mais de produire mieux, en aidant les agriculteurs à tirer davantage de valeur de chaque hectare cultivé », conclut Debbarh.