Dan son message, le Souverain a déclaré qu'en tenant sa 9e édition de son forum mondial en terre africaine, l'Alliance des Civilisations des Nations Unies donne ainsi un signal fort de continuité et d'universalité. «Elle se fédère autour d'un dessein partagé : avancer vers "une alliance de la paix" et d'un objectif commun : répondre à l'impératif du "vivre-ensemble" au nom d'une "seule humanité"», a souligné le Roi Mohammed VI. «Que l'Alliance des civilisations se réunisse à Fès est une occurrence qui va de soi. Le Maroc n'a-t-il pas eu le privilège et l'honneur d'être parmi les membres fondateurs de l'Alliance ? Fès n'est-elle pas la capitale spirituelle d'un Royaume millénaire ? Son Université Al Quaraouiyine ne constitue-t-elle pas le foyer universitaire le plus ancien du monde – le lieu où savants musulmans, juifs et même un souverain pontife parachevèrent leur savoir ? Son Université Euro-méditerranéenne ne construit-elle pas, aujourd'hui, un espace de dialogue académique et interculturel entre les deux rives ? Fès est ainsi, à l'évidence, l'incarnation même d'une alliance féconde entre les civilisations», a ajouté le Souverain en affirmant que la tenue du forum à Fès est aussi un privilège qui va de soi et en rappelant que l'Afrique est le berceau de l'humanité, le creuset des civilisations, le réservoir de la jeunesse et la promesse de l'avenir. Par ailleurs, en rappelant que le Royaume est membre fondateur de l'Alliance des civilisations et qu'il a été de tous les combats de l'organisation, le Roi Mohammed VI a salué la détermination et l'engagement du Haut-Représentant des Nations Unies pour l'Alliance des Civilisations, Miguel Angel Moratinos et les esprits vaillants ayant conçu l'Alliance des Civilisations et qui ont su penser un forum pour l'avenir. Moment opportun Le Souverain s'est arrêté sur le contexte actuel, qui est marqué par la recrudescence des causes qui furent à l'origine même de la création de l'Alliance des civilisations et a dressé un état des lieux en 8 points : * Jamais notre civilisation n'a été aussi exposée, jamais le vivre-ensemble n'a été aussi menacé au quotidien ; * Rarement l'Autre n'a été autant associé à la suspicion ou n'a été utilisé pour attiser la peur et fomenter la haine ; * Les extrêmes saturent le débat et disqualifient les discours modérés; les religions sont trop souvent instrumentalisées, lorsqu'elles ne sont pas stigmatisées; * Le populisme agite les sociétés, inventant des questions sans y répondre, brandissant la migration, tel un épouvantail dans les contextes d'élection et érigeant le migrant en bouc-émissaire; * Des continents qui ont rompu avec la guerre renouent avec les armes et la violence, sous toutes ses formes; * La Covid-19 a signé le retour du repli sur soi, alors même qu'elle aurait pu cristalliser la conscience du destin partagé; * Alors que la planète produit suffisamment pour nourrir l'humanité entière, l'insécurité alimentaire menace le monde ; * Le terrorisme se nourrit de séparatisme et guette là où l'instabilité politique ralentit le développement socio-économique ; Et le Souverain de conclure que c'est toujours le moment opportun pour parler de paix : «de la paix au-delà de l'absence de conflits ; de la paix comme vision du monde ; de la paix comme rapport à l'autre. Et l'Alliance est, à cet égard, un puissant vecteur de paix». Le Roi Mohammed VI a affirmé qu'à l'opposé des guerres – dont on connait le début, mais jamais la fin –, le dialogue est une réussite par essence. «Face à la résurgence de la conflictualité, le dialogue est, toujours, une promesse positive : sinon de différends réglés, du moins d'une connaissance mutuelle renforcée», a insisté le Souverain en ajoutant que c'est du dialogue que viendra le salut, mais à ces conditions : «Que ce dialogue soit inter-civilisationnel : c'est-à-dire inclusif et soucieux de l'humanité dans toutes ses composantes, pour appréhender le monde dans sa pluralité, agir par un multilatéralisme non vertical et incarner l'universel au sens premier ; Que ce dialogue soit inter-générationnel : c'est-à-dire qu'il associe la jeunesse et conjugue le futur au présent. Les jeunes ne représentent pas seulement les générations que nous devons préserver du fléau de la guerre et des discours de la haine ; elles sont celles qui, d'ores et déjà, font la paix ; Que ce dialogue soit inter-continental : c'est-à-dire non ethnocentrique. Je puis parler de l'Afrique et pour l'Afrique, de la place qui lui revient légitimement et non dans une arrière-cour ; du traitement auquel elle a droit : ni assistée ni laissée pour compte ; qu'elle ait les partenaires qu'elle mérite et qui la méritent et qu'elle soit considérée pour ce qu'elle est : c'est-à-dire le poumon démographique du monde et son réservoir économique, avec ses espoirs et ses atouts.» Retour à l'essentiel «La politique parle aux citoyens, la religion parle à leurs âmes, le dialogue parle à leurs civilisations», a affirmé le Roi Mohammed VI. Et le Souverain d'ajouter : «Dans toutes les langues, nous devons parler à la paix. Cette injonction émane du regard des générations passées et des générations futures». Autre appel lancé par le Roi Mohammed VI : «Dans ce moment si particulier de l'Histoire, alors que nous luttons contre le changement climatique, que nous combattons le terrorisme, que nous œuvrons en faveur du développement durable, de la sécurité hydrique, énergétique et alimentaire, du développement de manière générale, il nous faut revenir à l'essentiel, c'est-à-dire le vivre-ensemble». Pour le Souverain, «rien ne sert de mener de grands projets si nous ne parvenons pas à dépasser ce premier maillon du vivre-ensemble, au nom d'une seule humanité qui replace l'humain en son cœur».