Lors d'une table ronde, organisée le 25 juin 2022, à l'université du Québec, à Montréal, Ferhat Mehenni, le président du Gouvernement kabyle provisoire en exil (ANAVAD) et du Mouvement pour l'autodétermination de la Kabylie (MAK), qui a été aussi reçu au parlement canadien, dix jours auparavant, avait déclaré que « la Kabylie est en passe de gagner son billet pour la liberté et la vie parmi les nations abouties de ce monde ». Le 11 novembre dernier, la Kabylie était au Conseil des Droits de l'Homme de l'ONU à Genève. Le président et le porte-parole, Axel Belabbassi y étaient pour défendre leur cause et exposer la situation difficile des droits de l'homme dans leur territoire. Cette séance entrera dans l'histoire. Le président de l'ANAVAD et du MAK et ses collaborateurs étaient assis face à face avec les représentants du régime algérien, menés par le ministre de la Justice, le fameux facteur furtif venu apporter l'invitation au Maroc pour le Sommet de la Ligue arabe. L'image n'est pas anodine, c'est la première fois que les deux parties se rencontrent. La délégation algérienne a été bien servie, puisque plusieurs pays ont critiqué le régime militaire d'Alger et la repression qu'il emploie sans retenue contre les opposants en général et les hirakistes en particulier. Et bien sûr contre les Kabyles. Auparavant, le président Mehenni avait envoyé une lettre aux chefs d'Etats de la Ligue arabe à l'occasion du sommet tenu à Alger les 1 et 2 novembre derniers. Une lettre passée sous silence par les médias algériens et internationaux. « Au moment où elle vous accueille, l'Algérie exerce une répression féroce contre le peuple kabyle et prépare un génocide sous le nom de code : Opération Zéro Kabyle" dénonce la lettre. "Les arrestations politiques de Kabyles, suivies de torture sont quotidiennes depuis dix-huit mois », a précisé le mouvement rappelant les 500 prisonniers politiques kabyles et les 50.000 citoyens interdits de quitter le territoire sous administration algérienne. Plus encore, dit la lettre,« la plupart des « Harragas » qui déboursent des fortunes pour tenter, à bord d'embarcations de fortune, de rejoindre les côtes nord de la Méditerranée, au péril de leur vie, sont des Kabyles dans leur écrasante majorité ». C'est ce qui fait dire aux Kabyles que « l'Algérie est devenue une prison à ciel ouvert » et que ce pays « ne fait pas honneur à sa qualité de membre de la Ligue arabe en pratiquant le colonialisme et le racisme envers le peuple autochtone de Kabylie, riche de 12 millions d'âmes et disposant de plus de 50.000 km2 d'espace ». Toujours selon la lettre adressée à la Ligue arabe, les deux-tiers des troupes algériennes sont stationnées en Kabylie alors que celle-ci mène un combat civilisé et pacifique pour son droit à l'autodétermination et son territoire ne fait que 2% de celui de l'Algérie. « Pendant que l'Algérie finance et arme des mouvements terroristes (Polisario, Hamas, Hizbollah...) contre un certain nombre de pays membres de la Ligue arabe, (le Maroc, le Liban...), l'Algérie emprisonne et torture de simples citoyens qu'elle accuse de « terrorisme » pour le seul fait d'avoir mis un drapeau kabyle sur les réseaux sociaux ». En plus de la tribune de la Ligue arabe et du Parlement canadien, le MAK a pu obtenir celle des Nations Unies, ce qui indique que les Kabyles avancent sur la voie de leur reconnaissance par la communauté internationale en tant que pays indépendant. Le processus est certes long, mais la Kabylie ne lâche rien. Pour se fixer les idées. Quel est le fond de la question kabyle ? Le Mouvement explique au monde la question : 1) L'annexion par la force de la Kabylie à l'Algérie en 1857 n'a jamais été acceptée ou validée par le peuple kabyle. C'est elle qui est à l'origine de la guerre ayant mis fin à l'Algérie française et, elle sera inéluctablement la cause, entre autres, de la reconfiguration de la géopolitique régionale. 2) L'indépendance de l'Algérie n'a été finalement pour la Kabylie qu'un passage de témoin du colonialisme français vers les nouveaux maîtres des lieux, les militaires. 3) Depuis 1963, la Kabylie est sous occupation militaire algérienne et sous une nouvelle administration coloniale. Même au temps de la guerre d'Algérie, il n'avait jamais eu autant de troupes militaires stationnées en Kabylie que depuis l'indépendance de l'Algérie.