L'âge des travailleurs domestiques a considérablement évolué et les mineurs sont de moins en moins employés pour accomplir ce type de tâches. C'est la bonne nouvelle annoncée par l'étude « Promotion du travail décent au Maroc à travers la protection et l'organisation des travailleuses et travailleurs domestiques ». Fruit d'un partenariat entre la Confédération démocratique du travail (CDT) et le Centre d'études et de recherches en sciences sociales (CERSS), cette étude a été réalisée avec l'appui du Gouvernement de la RIOJA et en partenariat avec l'Institut syndical de coopération international au développement (ISCOD). Méthodologie « Ces recherches ont été menées auprès d'un échantillon aléatoire composé de 540 travailleuses et travailleurs domestiques, employeurs et autres personnes ressources. L'étude a essentiellement ciblé les villes de Casablanca, Rabat et Tanger », explique Abderrahman Mouline, coordinateur du projet. Visant à dresser et analyser l'état des lieux de l'emploi domestique au Maroc, cette enquête a été appuyée par une étude comparative. Objectif ? « L'élaboration d'une stratégie d'intervention intégrée pour renforcer la protection économique et sociale de cette catégorie sociale », ajoute le coordinateur qui explique la méthodologie adoptée pour élaborée cette étude. « On a procédé à la collecte de données à travers une revue documentaire croisant les informations pertinentes provenant de sources ministérielles et d'organismes publics nationaux. Ceci en plus des enquêtes qualitatives intégrant les données fournies par les associations concernées par le sujet, les experts et autres organismes publics », expliquent les auteurs de cette étude. Nouveaux profils Ainsi l'étude nous apprend qu'actuellement l'âge des travailleurs domestiques varie de 30 à 50 ans. Une sacrée évolution par rapport au travail des mineurs qui est en train de disparaitre progressivement comme l'affirme Mouline. L'étude révèle également l'apparition de nouveaux profils dans ce secteur d'activité. « On note l'apparition de travailleurs d'un certain niveau d'études qui peut atteindre l'universitaire notamment pour prendre en charge des personnes âgées, des enfants ou personnes à besoins spécifiques », ajoute les auteurs de l'étude qui note l'arrivée sur le marché de travailleurs étrangers provenant particulièrement d'Asie. Pour Nadia Soubate, coordinatrice du projet et membre du bureau exécutif de la CDT, l'étude s'est focalisée sur la situation socio-légale de cette catégorie travaillant le plus souvent dans l'informel. « Ceci dans l'objectif d'organiser la profession et de renforcer la protection sociale en son sein conformément à la Loi 19-12 fixant les conditions de travail et d'emploi des travailleurs domestique et la convention N° 189 sur les travailleurs et les travailleuses domestiques adoptée en 2011 par l'Organisation Internationale du Travail », soutient l'activiste syndicale. Ne disposant guère de protection sociale, un bon nombre de travailleurs domestiques ignorent l'existence même d'une loi les protégeant et un cadre juridique régulant ce domaine explique Soubate. « Malgré l'entrée en vigueur de la loi N 19-12 sur les travailleuses et travailleurs domestiques en 2018, le nombre de travailleurs déclarés à la Caisse Nationale de sécurité sociale (CNSS) ne dépasse par à l'heure actuelle 4500 personnes partagés entre chauffeurs, jardiniers et travailleuses domestiques », regrette la coordinatrice de la CDT. Loi méconnue Une situation que les auteurs de l'étude expliquent par l'ignorance des dispositions de cette loi et la complexité des procédures administratives. « La loi 19-12 est assez récente et avant son entrée en vigueur, elle est passée par une longue et difficile gestation. Ceci dit nous avons tout de même enregistré un saut important en termes de travail des enfants. Selon les chiffres du Haut commissariat au plan, on est passé de 570.000 enfants travailleurs en 1999 à 43.000 en 2018 », nous explique auparavant Salima Aadmi, responsable de la direction du travail au ministère de l'emploi. « L'étude en appelle à une action commune et intégrée impliquant pouvoirs exécutif, législatif et judiciaire. Sans oublier les syndicats des travailleurs et des employeurs et des associations. L'objectif étant de promouvoir un travail décent dans des conditions convenables pour les travailleuses et les travailleurs domestiques », conclut l'étude. Rappelons que la loi 19-12 relative au personnel de maison est entrée en vigueur le 2 octobre 2018. Réglementant la relation de travail liant les employés à leurs employeurs, cette loi fixe le salaire, la durée de travail, le repos hebdomadaire et le congé annuel payé ainsi que le droit à la protection sociale. Rappelons que la loi 19-12 offre une période transitoire de 5 ans à partir de la date de son entrée en vigueur, avant l'application définitive de l'interdiction du travail des moins de 18 ans. Ainsi le travail des 15-18 ans est toléré durant cette période transitoire mais une fois à terme le non-respect de cette close sera passible d'une amende de 25.000 à 30.000 DH. L'employeur récidiviste verra l'amende doublée et risque d'écoper d'une peine d'emprisonnement de 1 à 3 mois.