Rami Hamdallah, le nouveau Premier ministre de l'Autorité palestinienne, n'a rien d'un kamikaze. Sa nomination, le 6 juin, a pourtant toutes les allures d'un suicide politique. Il vient d'hériter du « job » le plus ingrat de toute la Cisjordanie. Il est vrai qu'il n'a probablement pas eu le choix lorsque le président palestinien, Mahmoud Abbas, est allé le chercher pour succéder à Salam Fayyad, démissionnaire depuis avril dernier. Rami Hamdallah lui ressemble d'ailleurs étrangement. C'est un haut fonctionnaire, au physique assez effacé. Jusqu'à la semaine dernière, cet homme de 54 ans, né à Anabta, un village près de Tulkarem, les cheveux ras et la peau claire, le visage barré de fines lunettes était le président de l'université Al-Najah de Naplouse, deuxième ville au nord de la Cisjordanie. Un poste qu'il occupe depuis 1998. A son actif, et contrairement à Salam Fayyad transfuge de la Banque mondiale et du FMI, qui avait, pour le Palestinien de la rue, des allures d'Ovni, Rami Hamdallah a des soutiens derrière lui. Titulaire d'un doctorat de linguistique de l'université de Lancaster (Grande-Bretagne), il est secrétaire général de la Commission électorale depuis 2002, président du conseil d'administration de la Bourse palestinienne (installée à Naplouse), et membre du directoire de la Fondation Yasser-Arafat, quoiqu'on ne lui connaisse aucun passé de résistant (pendant les Intifadas) et qu'il n'a jamais occupé de fonction politique au Fatah. Rami Hamdallah est un universitaire qui a manifestement su tisser des liens dans différents milieux. C'est aussi un proche de Munib Al-Masri, le milliardaire palestinien, lui aussi de Naplouse. Des atouts dont il aura besoin pour se faire mieux connaître des bailleurs de fonds étrangers. Car il va devoir mobiliser les fonds de la communauté internationale pour faire revivre une Autorité palestinienne ruinée depuis que les Etats-Unis, et les pays arabes, ont cessé d'apporter une aide financière à l'Autorité palestinienne pour des motifs divers. Dans l'immédiat, les Etats-Unis – et Israël, ce qui n'est pas bon pour son image de marque en Cisjordanie – ont loué son pragmatisme. Peut-il réussir ? Dés sa nomination, l'ancien universitaire a choisi de reprendre la majorité des ministres du cabinet précédent, mis un banquier aux Finances, Choukri Bichara, et nommé deux vice-Premiers ministres, l'un, Mohammed Moustapha est le président du Fonds d'investissement de Palestine et le conseiller économique de Mahmoud Abbas ; l'autre, Ziad Abou Amr est député. Manifestement, l'économie est, à juste titre, sa première préoccupation. Il déclare, en ce domaine, enfourcher les bottes de son prédécesseur, le strict et rigoureux Fayyad, loué des bailleurs de fonds. Politiquement, son gouvernement ne devrait pas vivre plus de trois mois, jusqu'au 14 août prochain, estime-t-il. C'est la date choisie pour la mise en place de l'exécutif d'union nationale (avec le Hamas) supposée parvenir à une réconciliation avec le Hamas. Vœu pieux ? Rami Hamdallah risque, à son tour, de se casser les dents sur ce projet de retrouvailles, refusé par les politiques des deux bords et plébiscité par les populations de Gaza et de Cisjordanie. Le Hamas a salué sa nomination comme la « prolongation du gouvernement Fayyad illégitime et illégal ». Le chemin sera rude pour Rami Hamdallah