Après avoir rêvé d'un destin différent et autonome, lUnion pour la Méditerranée (UPM) a, en quelque sorte, été «normalisée» par l'Europe, la semaine dernière. Si elle ne s'appelle plus désormais que «Union pour la Méditerranée» oubliant d'y accoler «processus de Barcelone», en référence à l'accord de 1995 entre l'UE et la rive sud, c'est bien en une nouvelle mouture, relookée, de ce processus que le grand projet de Nicolas Sarkozy s'est transformé. Oublié «l'union de projets pour un projet d'unio», selon la formule souhaitée à Paris. L'Elysée avait pourtant, de grandes ambitions. Deux principaux enseignements peuvent être tirés de la conférence des ministres des Affaires étrangères à Marseille, les 3 et 4 novembre. Le premier, la politique est revenue au galop dans cette enceinte de 43 pays de l'UE et du pourtour méditerranéen. Le choix d'une capitale pour cette nouvelle institution a ravivé les antagonismes. La Tunisie était candidate. La Syrie s'opposa à la candidature d'une ville arabe qui serait obligée de recevoir des Israéliens. L'Union européenne, elle, n'eût même pas à dire qu'elle réfutait la Tunisie pour son absence de respect des droits de l'homme. Restait donc à s'entendre sur le plus petit dénominateur commun : Barcelone, siège de l'accord de 1995 pourtant largement critiqué par la rive sud. Second marchandage : le statut de la Ligue arabe dans l'UPM. Israël ne la voulait qu'observatrice. Mais céda en contrepartie de l'obtention d'une viceprésident de la nouvelle institution. Qui pour faire bonne mesure fut accordée à cinq autres pays dont la Palestine, la Grèce, l'Italie et Malte. Une sixième vice-présidence devrait être attribuée ultérieurement. On est loin de la structure légère que souhaitait Nicolas Sarkozy lorsqu'il lança son projet. Deuxième enseignement : la recherche de financements. Quelques chiffres illustrent la situation de Etats du pourtour sud et est de la Méditerranée : les besoins en infrastructures sont globalement de 250 milliards d'euros ; les émigrés envoient quelque 18 milliards de dollars annuellement dans l'ensemble des pays et 17 milliards de dollars les quittent pour s'investir dans les banques occidentales. Dans le même temps, l'aide publique au développement du Nord vers le Sud ne dépassent guère 4 milliards d'euros. Bref, celle-ci ne sera jamais assez conséquente pour aider la rive sud à rattraper son retard. L'UPM se promettait donc de mobiliser les investisseurs privés, d'inciter les pays du Golfe à participer aux grands projets de développement ... Or, c'est le budget européen qui alimentait hier le «Processus de Barcelone» qui alimentera demain, l'UPM. La rive Sud se plaignait à juste titre de la bureaucratie de Bruxelles, de la lenteur dans le déblocage des fonds. Et se disait guère consulter dans l'initiative des projets. Est-ce qu'une UPM - Processus de Barcelone rénovée saura mieux répondre aux attentes du Sud? Les investisseurs privés voudront-ils s'associer dans un cadre aussi contraignant pour monter de grands projets ? Il reste à l'espérer.