Un rapport provisoire de l'IGF qui a fuité dans la presse révèle des achats à des prix exorbitants du ministère de la Justice au profit du nouveau siège de l'Institut supérieur de la magistrature. Des dépenses que le département de Benabdelkader assume malgré la polémique suscitée.
Une table de réunion modulable de 1260×180 cm, en bois de chêne rouvre et cuir « de haute qualité », achetée au prix de 758.280 dirhams, cinq poubelles de 114 litres en aluminium à 6012 DH chacune, 22 réfrigérateurs LG à 15.000 DH chacun ou encore 20 téléviseurs Samsung 55' à 22.200 DH l'unité. Ce sont quelque unes des dépenses du ministère de la Justice révélées dans un rapport provisoire de l'Inspection générale des finances (IGF) qui a fuité dans la presse. Tous ces achats ont été effectués au profit du nouveau siège de l'Institut supérieur de la magistrature à Salé, entre 2017 et 2018. Dans ses observations contenues dans le rapport, l'IGF explique aussi que « le prix des arbres plantés sur place, des palmiers washingtonia de 5 mètres, ne dépasse pas 6240 DH, à l'exception de deux oliviers achetés à 36.000 DH l'unité. Ces documents ont rapidement fait le tour des réseaux sociaux, provoquant la colère de plusieurs internautes et acteurs associatifs. L'Association marocaine de protection des biens publics (AMPBM) a, elle, demandé dans une correspondance au président du ministère public, Mohamed Abdennabaoui, l'ouverture d'une enquête judiciaire. Dans cette lettre, son président Mohamed El Ghaloussi, fustige notamment des « soupçons de dilapidations » et de « détournements » de biens de publics. Benabdelkader assume Pourtant, dans un communiqué diffusé hier, jeudi 4 février, le ministère de la Justice par la voie de sa direction de l'équipement et de la gestion du patrimoine assure que le rapport de l'IGF « ne relève aucun manquement au respect du principe de concurrence ». Selon cette direction, « plusieurs sociétés ont répondu à l'appel d'offres et aucune plainte n'a été déposée à ce sujet ». « L'IGF mène régulièrement des missions de contrôle des comptes du projet de construction du nouvel institut depuis 2017, en élaborant trois rapports y afférents jusqu'en 2020. Le rapport de l'inspection relatif à l'exercice 2019 traite des marchés conclus durant la période de mise en œuvre du projet jusqu'en 2018 », explique la direction ministérielle. Dans son communiqué, la même direction justifie aussi le prix de la poubelle « antirouille », qui, précise-t-elle, destinée aux espaces extérieurs par la surface du projet qui « s'étend sur cinq hectares ». Pour ce qui est de la table de 758.280 dirhams, le ministère assure que « son prix d'achat a été le moins coûteux » des offres qu'il avait reçues. Et d'ajouter : « conformément au code des normes appliquées par l'IGF, les données financières du projet reflètent une image transparente sur les sommes dépensées ». Dans la foulée, Mustapha Ramid, qui a été ministre de la Justice et des libertés jusqu'en avril 2017, a réagi à la polémique. Dans un communiqué diffusé par son cabinet, l'actuel ministre chargé des droits de l'Homme et des relations avec le parlement se dit « surpris d'avoir été mêlé sans raison » à cette affaire, assurant qu'il ne dirigeait plus ce ministère à la date des achats listés dans le rapport. Son successeur Mohamed Aujjar (avril 2017- octobre 2019) n'a pas encore réagi.