Les deux Madrid encore face à face: le Real reçoit mardi l'Atletico en demi-finale aller de Ligue des champions (20h45) pour une revanche des finales 2014 et 2016 remportées par le club merengue, éternel gagnant, aux dépens de son voisin "colchonero", sempiternel aspirant. Imaginez le cauchemar d'être toujours confronté à cet agaçant voisin qui fait tout mieux que vous et qui, à la fin, emporte toujours les lauriers: tel est le quotidien de l'"Atleti", défait quatre fois par la "Maison blanche" en quatre confrontations en C1, dont deux ces trois dernières saisons. A Madrid, moins de 10 kilomètres séparent le luxueux stade Santiago-Bernabeu, théâtre de l'affiche de mardi, de l'antique Vicente-Calderon, qui accueillera le match retour le 10 mai pour sa dernière grande soirée européenne avant démolition. Mais au palmarès des deux clubs, fondés respectivement en 1902 et 1903, il y a un gouffre. Le Real compte onze C1, un record. L'Atletico, lui, a perdu ses trois finales dans cette épreuve: en 1974 face au Bayern Munich, puis contre le Real en 2014 (4-1 a.p.) et en 2016 (1-1 a.p., 5 t.a.b. à 3). D'où le surnom de "pupas", qui désigne en Espagne des malchanceux chroniques. "Si le passé doit peser, il pèsera sur leurs épaules, pas sur les nôtres", a résumé lundi le défenseur merengue Dani Carvajal. "Ce qui m'enthousiasme est d'atteindre la finale" Tant d'échecs, tant de désillusions, tant de défaites rageantes... Il y a de quoi développer un complexe d'infériorité, même si Gabi, capitaine de l'Atletico, veut croire que cette fois, l'histoire peut être différente. "Moi, ça ne m'enthousiasme pas spécialement d'affronter le Real Madrid ou toute autre équipe. Ce qui m'enthousiasme, c'est d'atteindre la finale et d'essayer de gagner cette Ligue des champions que nous désirons tant", a lancé le milieu défensif. Pourquoi les choses changeraient-elles? Parce que depuis l'AC Milan en 1990, une malédiction a empêché tous les tenants du titre de conserver leur couronne la saison suivante, ce qui peut valoir aussi pour l'équipe de Zinédine Zidane. Et parce que l'Atletico, marche après marche, tente de refaire son retard sur son encombrant voisin. Financièrement, déjà: avec la mutualisation des droits télévisés en Espagne et ses bons parcours en Ligue des champions, le club des quartiers sud de Madrid a presque doublé son chiffre d'affaires, passé de 120 M EUR en 2012-2013 à 228 M EUR en 2015-2016, selon le cabinet Deloitte. C'est, en outre, sans compter sur les futurs revenus du nouveau stade flambant neuf en construction dans l'est de la capitale (70.000 places) et attendu pour cet été.... A titre de comparaison, le Real, basé dans les quartiers nord, est passé de 518 M EUR à 620 M EUR de revenus sur la même période. Une querelle centenaire Sportivement aussi, l'écart se réduit: l'entraîneur Diego Simeone, nommé en 2011, a bâti une équipe accrocheuse qui est vite montée en puissance: Europa League 2012, Coupe du Roi 2013, Liga 2014... Mais il reste une ultime marche: la Ligue des champions. "Nous sommes en train d'acquérir de l'expérience dans cette compétition, chaque année, nous allons plus loin et nous espérons que cette année, le résultat soit différent", a asséné Gabi. D'où la méfiance affichée par Zidane lundi: "Cela fait quatre ou cinq ans qu'ils sont très bons et ils s'améliorent chaque année. C'est une équipe qui nous met à chaque fois en difficulté", a-t-il prévenu. Mardi, c'est l'heure de vider cette querelle centenaire, exacerbée par l'enchaînement de 14 derbies en trois ans. Au stade Santiago-Bernabeu, Cristiano Ronaldo, star planétaire du Real, attendra de pied ferme Antoine Griezmann, étoile montante de l'Atletico: le Portugais aux 101 buts en Ligue des champions a triomphé du Français trois fois en 2016, en finale de C1, en finale de l'Euro et pour l'obtention du Ballon d'Or. Il y a deux issues à ce duel capital: soit le Madrid qui gagne va continuer de gagner, soit le Madrid qui aimerait gagner y parviendra enfin.