Faut-il en rire ou en pleurer ? En pleines festivités de la Biennale de Venise, l'épouse du ministre des Affaires étrangères et celle du futur ex-ambassadeur du royaume à Rome se sont donc crêpé le chignon, provoquant l'hilarité des convives… et la fureur du Palais. La surprise passée et la décision prise par Dar Al Makhzen de rappeler le malheureux ambassadeur, la lecture de cet événement ne doit pas dépasser son caractère d'incident anecdotique. Après tout, en Italie, rien n'étonne plus. En comparaison avec les frasques d'un Berlusconi, ses scènes de ménage et ses infidélités publiques, la prise de becs entre deux Marocaines de la haute société passe pour une banalité. D'ailleurs, les gazettes italiennes, si friandes de scandales, n'y ont pas accordé d'importance ni le moindre entrefilet. Voilà qui relativise le déluge médiatique et l'encre qui a coulé chez nous sur cette affaire. Plus sérieusement, même s'il va être relevé de ses fonctions, Nabil Benabdellah n'a pas démérité. C'est un homme de relations publiques, séducteur et charmeur, ayant commencé par habiter sa fonction en prenant des cours d'italien. Vraiment, un bon profil pour un poste tranquille d'ambassadeur, dont le métier consiste essentiellement à honorer des fonctions de représentation au service de l'image de son pays. Ceci ne minore en rien non plus les qualités de son remplaçant annoncé, Hassan Abouyoub, diplomate chevronné et homme d'Etat ayant une longue carrière dans la gestion des affaires publiques et souveraines du pays. D'ailleurs, et contrairement aux idées reçues, l'appareil diplomatique marocain regorge de femmes et d'hommes compétents et dévoués. Dans les grandes capitales par exemple, le pouvoir prend ses précautions en nommant des personnalités qualifiées et hautement “fiables”. À Londres, personne ne peut contester l'envergure d'une personnalité comme Lalla Joumala, à Lisbonne, celle de Karima Benyaïch, à Madrid, celle d'un Omar Azziman, ou à Paris, celle d'un Mustapha Sahel… Quant aux capitales “non stratégiques”, comme dans tous les pays, on y offre des ambassades pour récompenser des fidèles serviteurs du Trône ou des politiques en mal de maroquins… Cela n'a rien de choquant : tous les chefs d'Etat le font. Ainsi, Sam Kaplan, le nouvel ambassadeur des Etats-Unis à Rabat, doit plus son poste à sa proximité avec Barack Obama qu'a sa carrière diplomatique. Ce fut également le cas de ses deux prédécesseurs durant le mandat de George W. Bush. Et parmi les nombreux diplomates installés au Maroc, que j'ai connus durant ma carrière de journaliste, rares sont ceux qui m'ont laissé un souvenir impérissable. Polis, cultivés et mondains, ils savent surtout converser à table et montrer de bonnes manières. En, réalité, s'il faut reprocher quelque chose à notre appareil diplomatique, ce serait plutôt son incapacité à faire sien un activisme économique, à l'instar de son homologue français. Depuis toujours, le Quai d'Orsay a en effet multiplié la création de postes économiques à l'étranger, destinés à épauler l'entreprise France. Ces relais permettent une veille stratégique et donnent à la représentation diplomatique un prolongement “Business” au service du pays.