La cuvée 2011 de Mawazine a eu une gestation douloureuse, mais au final, le résultat est éloquent : une célébration musicale mémorable. Plus que toutes ses ainées, la dixième édition de Mawazine des musiques du monde aura fait couler beaucoup d'encre. Elle aura eu la chance, ou peut-être la malchance de tomber à un moment où le Maroc connaît un tournant historique. Hué pour sa «surenchère» ou pour son supposé gaspillage, pris pour cible par les 20 fébréristes et par d'autres adeptes de l'austérité artistique et tombant pile avec l'attentat contre le café Argana à Marrakech, l'on pouvait imaginer que les organisateurs seraient échaudés. Pas le moins du monde, Mawazine a tenu front et a offert au public marocain un concentré de son art : une célébration musicale capable d'égaler les plus grands festivals internationaux. Les R'batis ont de quoi être fiers. Comme une lettre à la poste Voilà un adage qui sied parfaitement au déroulement du festival. Les huit scènes que compte le festival ont connu une affluence remarquable durant toutes les représentations et ont rempli leurs missions de manière exemplaire. Et si nous parlons de missions au pluriel, c'est parce qu'elles sont nombreuses justement. Au-delà de l'engagement classique à rendre accessible au plus grand nombre, une pléthore d'artistes locaux et internationaux de gros calibre, les scènes de Mawazine ont été un bel exemple d'organisation. Techniciens, accompagnateurs et forces de l'ordre ont travaillé de concert pour assurer un déroulement impeccable des différents spectacles, faisant ainsi montre de la capacité du Maroc à organiser une manifestation artistique de grande envergure. Les autres héros du festival sont justement les spectateurs, au nombre 2 230 000, ont fait preuve d'un comportement exemplaire, tournés plus vers la célébration que vers le grabuge. Les festivaliers ont aussi prouvé qu'ils étaient capables d'apprécier la musique mondiale dans toute sa richesse et sa variété. N'en déplaise aux grincheux, le festival a connu le succès auquel il nous avait habitués et les spectateurs y ont fortement contribué. Il y'aura certainement quelques voix qui s'élèveront encore pour dénoncer ce qu'ils qualifient de dilapidation de deniers publics, mais reconnaissons-le, le Maroc a besoin d'une vitrine et d'une image positive et Mawazine a bien joué ce rôle. Au lendemain du printemps arabe et des remous qui ont secoué notre pays, le festival des musiques du monde nous a rappelé que le Maroc est un pays de paix, de pluralité et un excellent terreau pour l'accueil des manifestations culturelles, le tout sans dépenser le moindre centime d'argent public. C'est ce qu'on pourrait appeler un cadeau à l'image du Maroc. Musique solidaire L'autre cadeau qu'a offert Mawazine au Maroc reste indéniablement «Les voix de la paix». Un baume au cœur en la forme d'un mini Mawazine gracieusement offert aux Marrakchis, en guise de soutien suite à l'attentat contre Argana. Le concert «Les Voix de la paix» a réuni une belle palette de stars de renommée nationale et internationale, qui se sont produits bénévolement, pour dénoncer avec vigueur le terrorisme et la violence et exprimer leur solidarité avec les victimes de l'acte barbare ayant eu pour cible le cœur de la ville ocre. Le défilé des artistes a commencé dès lors. De mémoire, jamais un aussi beau rassemblement de stars n'avait eu lieu. D'abord la création Nass El Ghiwane par Safy Boutella qui s'est vêtu pour l'occasion d'une chemise aux couleurs du drapeau marocain auxquels l'assistance a fait un accueil très chaleureux. S'en est suivi une succession de stars tels que Quincy Jones qui a présenté Siedah Garrett, compositeur de deux des plus célèbres tubes de Mickael Jackson, Mory Kanté, la troupe indienne Bharati, ou encore Hussain Eljassmi… Les prestations se suivaient mais ne se ressemblaient pas. Etats-Unis, Europe, Asie, Afrique…le public a eu le loisir de se promener dans des contrées tout aussi merveilleuses les unes que les autres grâce à la musique. Yassine Ahrar