C'est une grande première ! Lors du dernier trimestre 2010, il s'est vendu dans le monde davantage de smartphones que d'ordinateurs. Etat des lieux. Au cours des trois derniers mois 2010, ce sont 100,9 millions de Smartphones qui ont trouvé preneurs à travers le monde, contre 92,1 millions de PC. Des chiffres avancés par l'agence IDC, qui souligne une hausse des ventes de terminaux mobiles à hauteur de 87% par rapport au dernier trimestre 2009 – contre une augmentation des ventes de seulement 5,5% pour les PC. Face à un tel constat, un aperçu sur ceux qui font bouger le monde, la téléphonie intelligente s'impose. Avant, pour les constructeurs de téléphones mobiles, mais aussi pour les clients, les choses étaient simples, plus simples. Le marché se résumait à trois OS : Windows Mobile et Palm, puissants et ouverts mais surtout destinés aux professionnels et aux technophiles, et Symbian, davantage orienté grand public, comme l'étaient ses fers de lance Nokia et Sony Ericsson. Aujourd'hui, le marché se complique en même temps qu'il se complète. D'abord Apple a bousculé l'ordre établi avec son iPhone et son système d'exploitation uniques, puis Android a suivi. Aujourd'hui le paysage téléphonique compte une pléthore de systèmes d'exploitation et si une telle variété constitue un bon moyen pour les constructeurs de doper leurs ventes et de charmer des particuliers friands de nouveauté, il en va différemment du côté des professionnels du domaine. Ils doivent composer avec un marché, certes porteur de valeurs, mais nécessitant des investissements et adaptations à rallonges (par souci d'interopérabilité entre les plateformes. La pomme montre le chemin En imposant une marque forte grâce à une politique marketing offensive, Apple a su conquérir l'imaginaire, le quotidien et le style de vie de plus de 50 millions de consommateurs rien qu'en 2010. Ne serait-ce que sur le plan des usages, l'explosion du nombre d'applications – 320 000 applications sur l'Appstore, déjà 200 000 sur l'Android store… – démontre à elle seule l'instauration d'un réflexe de téléchargement depuis mobile et son ancrage dans les mœurs. Cette prolifération d'applications a non seulement permis le développement de l'usage de l'Internet mobile, mais nourrit aujourd'hui tout un écosystème autour des stores : des développeurs d'applications aux acteurs de la publicité mobile, ce véritable phénomène sociétal a ouvert de nouveaux marchés porteurs et réinventé plus d'un métier. Tandis qu'Apple a misé sur l'émergence et la confirmation de ces usages, les autres constructeurs tentent de se démarquer et d'imposer leurs propres OS. Ainsi, la stratégie de la gratuité de l'OS de Google semble aujourd'hui porter ses fruits, les plus grands équipementiers - Samsung, LG, Motorola, Sony Ericsson, Acer ou encore HTC – l'ayant adopté. En effet, le consommateur ne payant plus le système d'exploitation embarqué sur son Smartphone, il s'intéressera naturellement à ceux utilisant Android, même si l'OS reste perfectible. Une boucle vertueuse sera donc initiée : plus la communauté grandira, plus l'OS de Google s'améliorera, assurant ainsi un gain de parts de marché. Un autre choix stratégique de Google a été de se placer à la porte d'entrée de l'Internet - qu'il soit fixe ou mobile. L'observation du marché à un niveau mondial a montré que beaucoup de pays en voie de développement ont fait leur révolution digitale en adoptant directement le mobile, sans passer par l'ordinateur. Cela fait du positionnement de Google un gage de succès, le nombre de mobinautes devant dépasser le nombre d'internautes dès 2011. La riposte des vétérans L'hégémonie décennale de Nokia semble bel et bien finie, mais le constructeur saura-t-il rebondir grâce à l'intégration de l'OS et des services de Microsoft ? L'annonce de leur partenariat présente tout d'un accord gagnant-gagnant : Nokia profitera en effet du moteur de recherche Bing et de la régie publicitaire de Microsoft, tandis que ce dernier bénéficiera des services de cartographie et de géolocalisation de son partenaire. Partageant des enjeux publicitaires similaires à ceux de Google, l'ogre de Seattle pourrait revenir rapidement dans la course en intégrant ses services dans les 100 millions de smartphones vendus chaque année par Nokia. Laissant derrière lui ses quelque 4-5% de parts de marché, le voilà prêt à débarquer sur le devant de la scène en proposant avec son allié une troisième alternative aux consommateurs, aujourd'hui principalement tournés vers l'iPhone ou les Android. Le duo Nokia/Microsoft saura certainement offrir une palette de services mobiles complets, les forces de l'un pouvant compenser les faiblesses de l'autre : l'association d'un vendeur de services et d'un constructeur semble ici tout à fait pertinente. Tout porte à croire que les cartes ne sont aujourd'hui pas toutes distribuées. Le marché pourrait donc encore changer radicalement de visage dans les 18 prochains mois. Deux modèles semblent ainsi s'affronter avec, d'un côté les OS propriétaires à licence payantes et de l'autre le principe d'un OS open source, ouvert à la communauté de développeurs et gratuit pour les constructeurs. Le choix de l'un ou l'autre constitue une orientation bien marquée, à mettre en parallèle avec la dichotomie Windows VS. Linux/Ubuntu sur PC. Sur quel cheval faudra-t-il parier concernant les OS Smartphones ? Les constructeurs s'aligneront-ils en majorité sur les systèmes propriétaires comme pour le PC ? Faut-il craindre une uniformisation des OS qui instaurerait une forme de «pensée unique» ou bien au contraire, faut-il la rechercher car elle permettrait une formidable mutualisation des efforts de développement encore éparpillés ? En définitive, le dernier mot reviendra probablement à l'utilisateur et à l'usage qu'il fera de son Smartphone. Là aussi, deux modèles s'opposent : l'un basé sur une multiplicité d'applications monothématiques (Apple et Android), l'autre sur un système de tuiles et de hubs en page d'accueil qui agrègent le contenu choisi par l'utilisateur (Windows phone 7). Pour résumer, il s'agit de l'affrontement entre fonctionnalités (logique de pull par l'utilisateur) et contenu (push). Lequel l'emportera ? Et le Maroc dans tout ça ? Le marché des Smartphones a enregistré un chiffre d'affaires de 125 millions de dollars en 2010 ! Autant dire que l'enjeu est de taille pour les grands fabricants de «téléphones intelligents». Au Maroc, bien que le chiffre d'affaires du segment ne soit pas dévoilé, la tendance du Smartphone est bel et bien là. En 2010, nous avons enregistré une croissance en volume de plus de 120% par rapport à l'année précédente, soit 320.000 unités vendues durant l'année écoulée selon Gfk Retail&Technology North Africa, cabinet d'études de marché. Cela même, alors que le best-seller des smartphones n'est toujours pas officiellement commercialisé. Longtemps chez l'opérateur historique et annoncé pour la fin 2010, l'Iphone n'a toujours pas trouvé chaussure à son pied. IAM aurait lancé une commande de quelques 200.000 unités au distributeur américain. Seulement cette opération allait lui couter la bagatelle de 10 millions de dollars, soit 500 dollars l'unité. Il est à supposer que face aux perspectives d'une très faible rentabilité, MT a dû faire marche arrière. Sans compter qu'une commande de 200.000 unités parait disproportionnée et risquée par rapport à la taille du marché des Smartphones au Maroc. D'ailleurs, sur ce coup-là, Meditel pourrait bien voler la vedette à Maroc Telecom après l'entrée dans son tour de table de l'opérateur français Orange. Car, non seulement ce dernier a été le distributeur exclusif de l'Iphone en France mais il distribue aussi aujourd'hui le Smartphone d'Apple à travers plus de 28 pays ! Il ne serait donc pas étonnant de voir l'Iphone proposé par Méditel, à l'instar de ce qui s'est produit en Tunisie où Orange Tunisie détient l'exclusivité de sa commercialisation. Yassine Ahrar