Au moins 173 personnes ont été tuées et 90 torturées ou maltraitées au cours des violences ayant suivi la proclamation des résultats de la présidentielle en Côte d'Ivoire, a annoncé jeudi l'ONU. La commissaire adjointe aux Droits de l'Homme Kyung-wha Kang a déclaré que ces meurtres et tortures avaient été perpétrés entre les 16 et 21 décembre derniers. Lors d'une session extraordinaire du Conseil des droits de l'homme consacrée à la Côte d'Ivoire, elle a précisé qu'au moins 471 arrestations et incarcérations avaient été recensées, et que 24 cas de disparitions avaient été signalés. "Malheureusement, il est impossible d'enquêter sur toutes les accusations de violations graves des droits de l'Homme, parmi lesquelles des signalements de fosses communes, en raison d'importantes restrictions de mouvement imposées au personnel de l'ONU", a déclaré Kyung-wha Kang. Elle a également déploré le contrôle exercé sur les médias par le camp Gbagbo. "L'utilisation de la Radio et Télévision Ivoirienne publique et de certains journaux privés, pour inciter à la haine et à la violence au sein de la population et disséminer des informations fausses et incendiaires contre les Nations unies, est particulièrement alarmante", a-t-elle souligné. David Kennedy, porte-parole de la mission américaine auprès de l'ONU à Genève, a déclaré que les Etats-Unis étaient "très préoccupés par "l'étendue des mauvais traitements commis" en Côte d'Ivoire. A Washington, le département d'Etat a dit être en discussions avec d'autres pays pour tenter de trouver une issue à l'impasse dans laquelle se trouve le pays. "Nous sommes en discussions avec d'autres pays de la région pour voir si l'on peut trouver un moyen de renforcer la force de maintien de la paix de l'ONU", a déclaré le porte-parole P.J. Crowley. "Ce type de renforcement pourrait être un autre moyen d'adresser un message clair au président (Laurent) Gbagbo". Le porte-parole du département d'Etat n'a pas précisé quels pays avaient été contactés. Il a toutefois noté que le Nigeria contribuait de manière importante aux forces de maintien de la paix en Afrique de l'Ouest, et mentionné les intérêts de la France en Côte d'Ivoire. Mercredi, Guillaume Soro, nommé Premier ministre par Alassane Ouattara, a appelé la communauté internationale à employer la force pour déloger Laurent Gbagbo. Le président du Nigeria Goodluck Jonathan, actuel président de la Communauté économique des Etats d'Afrique de l'Ouest (CEDEAO), s'est entretenu jeudi par téléphone avec Nicolas Sarkozy "pour évoquer la situation en Côte d'Ivoire", a indiqué la présidence française dans un communiqué. La CEDEAO doit tenir une réunion vendredi soir sur la crise ivoirienne. La communauté internationale reconnaît Alassane Ouattara comme vainqueur de la présidentielle du 28 novembre, mais le chef de l'Etat sortant Laurent Gbagbo refuse d'admettre sa défaite, malgré la pression internationale. Mercredi, la Banque mondiale a annoncé avoir gelé ses prêts à la Côte d'Ivoire. Sur le terrain, la tension est toujours aussi forte. Des centaines de casques bleus protègent à Abidjan l'hôtel du Golf, qui sert de quartier général à Alassane Ouattara. Mais ils sont eux-mêmes encerclés par l'armée, loyale à Laurent Gbagbo. Les partisans d'Alassane Ouattara sont retranchés à l'intérieur de l'hôtel. (AP)