Après une année passée à la tête de la MDJS, Younès El Mechrafi dresse un bilan satisfaisant et affiche de grandes ambitions. Le Temps : Votre arrivée à la tête de la MDJS (Marocaine des jeux et de sports) a coïncidé avec le lancement de l'appel d'offres pour le changement de votre opérateur. Comment s'est déroulé cet appel d'offres ? Younès El Mechrafi :J'ai été amené à la tête de MDJS le 16 novembre 2009. Cela fera bientôt une année. Une période qui a été très riche et très intense au vu des nombreux d'événements qui se sont succédé. Je suis effectivement arrivé en plein processus d'appel d'offres pour le renouvellement de la concession qui est accordée à l'opérateur en charge, pour le compte de la MDJS, de l'exploitation de son réseau de jeux. Pour rappel, le modèle suivi par la MDJS est basé sur l'outsourcing. Nous avons un contrat de «facility management» avec un opérateur qui gère pour notre compte le réseau. Partant de ce contrat, l'opérateur gère les investissements, installe les équipements, les interconnecte, les maintient et développe le business tout en assurant le marketing et la communication. Sa rémunération est réalisée par l'intermédiaire d'une commission en fonction du pourcentage du chiffre d'affaires qu'il génère. Quels ont été les points forts de la société Intralot qui a remporté l'appel d'offres ? Quand je suis arrivé à la tête de la MDJS, il y avait un opérateur depuis une dizaine d'années et qui, suite à l'appel d'offres lancé à l'international, n'a pas été reconduit. Nous avons retenu l'offre d'Intralot qui était plus intéressante pour le Maroc. Cette offre a permis à notre pays d'économiser presque 300 MDH de commissions. Aujourd'hui nous avons des terminaux et des équipements dernière génération. Cette technologie permettra une certaine souplesse et un time to market (durée pour arriver sur le marché) très court. En parallèle à l'appel d'offres remporté par Intralot, quels ont été les autres chantiers sur lesquels vous avez travaillé ? Cet appel d'offres m'a accaparé pendant les quatre premiers mois. En parallèle, je m'adaptais à mon nouvel écosystème. Puis j'ai travaillé sur l'élaboration d'une stratégie dont la mouture a été finalisée au mois de février de cette année. Cette stratégie se divise en deux axes : un en matière de communication et l'autre, plus globale, que j'ai baptisé Cap 50. Un véritable programme de transformation de la MDJS qui va la mener à son cinquantenaire qui sera fêté en 2012 (ndlr : la MDJS a été créée en 1962). Quels sont les principaux piliers de cette stratégie ? La stratégie Cap 50 est basée sur cinq piliers. Le premier pilier concerne le développement du chiffre d'affaires et l'évolution des parts de marché et par conséquent une plus grande contribution au financement du sport. Le second est basé sur l'innovation en exploitant des outils technologiques performants que ce soit dans l'organisation, dans nos relations avec nos partenaires et surtout avec la clientèle finale. Le troisième concerne le renforcement de notre image d'entreprise citoyenne. Le quatrième est lié à la consolidation de notre partenariat institutionnel. Enfin, le cinquième à trait à la recherche de l'excellence opérationnelle qui passe par la mise à niveau de notre système d'information ainsi que des procédures organisationnelles. Ceci a abouti à un portefeuille de projets programmés sur les trois prochaines années. En tout, c'est plus d'une cinquantaine de projets qui sont dans le pipe et qui ont commencé à être planifiés dans le temps et budgétisés. Qu'en est-il de la stratégie de communication de la MDJS ? La MDJS est une entreprise qui a plutôt vécu dans la discrétion jusqu'à récemment. J'ai constaté ainsi qu'il y avait un déficit de notoriété et également une confusion dans l'esprit du public en ce qui concerne les produits présentés par notre institution (Toto foot, Côté foot, Chrono et les tickets à gratter). On nous confond à tort avec le Loto qui est un produit de la loterie nationale. Il y a un véritable travail de communication, de pédagogie et de «déconfusionnement» à opérer. D'ailleurs, notre dernière campagne corporate a commencé la semaine dernière avec, comme objectif principal, ancrer dans les esprits des citoyens que la MDJS a pour unique raison d'être le soutien financier du sport national. Dans le même sillage, nous avons lancé un projet concernant notre «e-réputation», une sorte de veille sur Internet et d'évaluation de notre image sur la Toile afin de l'optimiser. Le cahier des charges est en cours d'élaboration et l'appel d'offres sera lancé dans deux semaines. Cela sans oublier notre identité visuelle et notre portail qui ont subi une modification notable afin de réhabiliter l'image de la MDJS et la repositionner en tant qu'entreprise citoyenne. Vous avez déclaré récemment que vous visiez de nouveaux modes d'accès pour les joueurs comme l'Internet et le mobile. Voudriez-vous nous expliquer ce choix ? Je crois aux nouveaux canaux alternatifs de distribution pour nos jeux. Cela garantit la proximité, du confort et une certaine intimité en particulier pour la clientèle féminine. En effet, les femmes n'ont pas forcement envie d'aller jouer dans des cafés. C'est un service que nous allons proposer tout prochainement à nos citoyens. Dans quelle mesure la MDJS contribue-t-elle au développement du sport national ? Notre première contribution est d'ordre financier. Nous versons une redevance à l'Etat. En 2009, cette redevance représentait 18% de notre chiffre d'affaires, soit 140 MDH. A l'horizon 2015, nous escomptons porter cette contribution à 400 MDH. Et, en cumulé, nous aurons généré 1,5 MrDH au profit du sport national. Cette stratégie est parfaitement en adéquation avec la stratégie mise en œuvre par le ministère de la Jeunesse et des Sports. De ce fait, la MDJS est un levier financier au service de la stratégie du ministère et un réel incubateur pour des activités à caractère sportif et social. La World lottery Association vous a remis récemment la certification du «Jeu Responsable», une sorte d'ISO pour les sociétés de paris. Que représente pour vous cette distinction ? La certification du «Jeu Responsable» est quelque chose de très important pour nous et nous en sommes fiers. En soi, c'est une consécration pour l'état d'esprit et le comportement de la MDJS quant à la protection des mineurs et la prévention contre les excès. Un état d'esprit qui vise l'intégrité et la responsabilité dans notre politique. Actuellement, nous sommes au premier niveau et nous préparons la deuxième phase car il y a quatre niveaux dans cette certification. Quels sont vos projets ? Actuellement, j'ai lancé un projet de Business Intelligence (BI). En effet, nous sommes en train de mettre en place un système qui permettra de mesurer notre performance de manière multidimensionnelle. Cet outil permettra également de challenger l'opérateur Intralot. Aussi allons-nous démarrer bientôt un projet de géomarketing. Il va nous permettre d'avoir une approche méthodologique pour le développement de notre réseau et l'identification des zones géographiques à fort potentiel. L'appel d'offres a été lancé et c'est Urbasoft et 2Bconsulting qui l'ont remporté pour, respectivement, le géomarketing et la BI. Ces projets montrent notre volonté de recherche continue de l'innovation. Dan la même lignée, j'ai lancé un audit financier et c'est le cabinet KPMG qui a été retenu suite à un appel d'offres. Et j'ai souhaité également un audit opérationnel et organisationnel et c'est le cabinet de consulting Eurogroup qui s'en charge. Ces audits aboutiront à un diagnostic permettant de proposer à la MDJS des recommandations afin de s'améliorer son organisation. Quelles sont vos ambitions ? Nos prévisions de croissance sont déjà établies sous forme d'un engagement contractuel avec Intralot. L'opérateur s'est impliqué à développer le chiffre d'affaires de la MDJS sur une période de cinq ans avec un taux de croissance annuel moyen de 18%. Il a aussi promis de développer le réseau des points de vente (qui est de 1 200 actuellement) pour le porter à 4 500 points de vente. Sur un autre registre, la MDJS ambitionne de s'ouvrir vers d'autres sports. Le Côté Foot deviendra incessamment Côté Sport et nous ambitionnons aussi de créer une équipe de cyclistes de la MDJS sur le modèle de l'Equipe française des jeux. Propos recueillis par Mohamed Amine Hafidi (Le Temps)