Dans son dernier rapport au Conseil de sécurité sur l'évolution du conflit du Sahara, rendu par ailleurs public lundi soir à New York, Ban Ki-moon a appelé solennellement, la gravité du ton en plus, à un « règlement urgent de l'affaire du Sahara, en raison de la montée de l'instabilité et de l'insécurité dans la région du Sahel... » ! On peut considérer a priori que c'est la première fois qu'il établit un lien aussi direct entre le Sahara et le Sahel, de manière officielle et sans tergiverser ! On doit, en revanche, comprendre qu'il le fait sous l'emprise d'une nouvelle prise de conscience, à la lumière des dernières missions effectuées par Christopher Ross, son émissaire dans la région. Elles portent la marque d'un constat rédhibitoire : la persistance du gouvernement algérien à bloquer une solution politique au Sahara favorise à coup sûr la déstabilisation de la région. Il ne faut pas être clerc pour s'en rendre compte. Le territoire algérien, ce n'est plus un mystère, est aujourd'hui le lieu de passage de tous les groupuscules terroristes vers le sud, au croisement du Mali notamment, du Niger, du Tchad et constituant le point d'ancrage du terrorisme qui prospère comme dans un terreau favorable. Le Sahel est transformé donc en zone grise, infranchissable mais accueillante pour al-Qaïda, notamment AQMI et les groupes des différentes obédiences islamiques qui s'implantent au fur et à mesure, mettant à profit l'indifférence ou la complice nonchalance des Etats de la région. Quand le problème du terrorisme au Sahel s'était posé crûment il y a deux ans aux Etats et aux gouvernements de la région, le Maroc n'a pas cessé d'en appeler à une action concertée et à la mise en œuvre d'une stratégie efficace qui impliquait notamment une riposte nécessaire et collective. Le gouvernement algérien, tout à son aveuglement, a cru utile d'isoler le Maroc et a commis l'erreur même de ne pas l'inviter à la conférence qu'il a organisée avec certains pays de la région pour définir une stratégie commune de lutte contre le terrorisme. Il a préféré s'ériger en « commandant suprême », mais n'a pas mesuré l'inefficacité de son prétendu engagement dans ce sens. Grand mal lui en fut, car le terrorisme – notamment celui d'AQMI – est un phénomène rampant, il ne pourra jamais être combattu isolément, mais interpelle tous les Etats riverains. L'inquiétude du SG de l'ONU Ban Ki-moon, tout à sa lucidité même tardive, vient de le comprendre et d'en expliquer la teneur. Il a vu que la réouverture des frontières entre le Maroc et l'Algérie favorisera, outre la paix, une concertation efficace entre les deux gouvernements. « La montée de l'instabilité et de l'insécurité dans la région du Sahel, dit-il dans son rapport, requiert un règlement urgent de ce conflit de longue durée... » ! Et comme pour mieux souligner la portée menaçante d'un tel danger, il a exprimé sa « grande préoccupation quant à la sécurité du personnel de la MINURSO », ajoutant que « les opération en cours au nord du Mali peuvent menacer à long terme la région ». Le secrétaire général des Nations unies, se souciant plutôt des membres de la MINURSO, a déclaré que « la suspension continue de patrouilles de nuit de la MINURSO est destinée écarter les risques de possibles infiltrations d'éléments armés et de lacunes en matière de coordination au niveau de la sécurité régionale... »... C'est peu dire qu'une telle inquiétude, justifiée bien entendu, semble ne pas tenir compte de la présence des Forces armées royales qui, voilà près de quarante ans maintenant, assurent la sécurité et la pleine quiétude des citoyens au Sahara, y compris des membres de la MINURSO ! Cela dit, il convient de mesurer à, quel point la communauté internationale , incarnée par l'ONU, s'achemine vers une prise de conscience plus ou moins aiguë de l'effet de l'affaire du Sahara sur le Sahel, à moins que ce ne soit l'inverse...Au Mali, fief d'une guerre par procuration à géométrie variable, la France s'est trouvée seule à faire la guerre au islamistes de toutes obédiences, à s'exposer ensuite aux représailles de ces derniers. Il aura fallu la grave attaque des islamistes contre le site pétrolier et gazier de Aïn Minas , avec sa tragique issue, pour que le gouvernement algérien prennent plus pou moins la réelle mesure du spectre terroriste et qu'il décide enfin de « verrouiller » le point de passage critique au sud de son territoire où se croisent toutes sortes de trafic : drogue, armements, cigarettes, commerce illicite et trafic d'hommes et de femmes. La pomme de discorde Poreuse, la fragile ligne de « démarcation » est jusqu'à nouvel ordre demeurée incontrôlée voire incontrôlable, lors même que les dirigeants algériens s'entêtent à affirmer à qui veut les écouter qu'ils vont assurer la sécurité, là, pas loin en tout cas où près d'une quinzaine d'otages européens, dont une majorité de Français, ont été kidnappés. C'est peu dire que l'appel pressant de Ban Ki-moon à une réouverture des frontières entre le Maroc et l'Algérie s'inscrit dans le souci de voir s'instaurer une concertation impérative face au déferlement du terrorisme qui, outre fragiliser les Etats, entend instaurer un ordre et un régime de violences et d'esclavage. Or, si Maroc et Algérie souscrivent à l'appel de Ban Ki-moon, rien ne semble les disposer à briser la barrière de la méfiance...L'affaire du Sahara constitue la pomme de discorde, le conflit le plus long qui devrait d'abord être réglé politiquement et consensuellement. C'est le préalable nécessaire... Et le ministre panaméen des Affaires étrangères, Fernando Nunez Fabrega, n'a pas tort d'affirmer que « le problème du Sahara n'est pas un conflit entre le Maroc et le Front polisario, mais plutôt entre le Royaume et l'Algérie », avant de préciser que son pays « soutient le processus de négociations sous les auspices des Nations unies, dans le respect de l'intégrité territoriale du royaume et que le plan marocain d'autonomie des provinces du Sud, constitue une initiative qui devrait être abordée par les parties avec un esprit d'ouverture, de pragmatisme et de réalisme »...