«Une première»! L'Office marocain de la propriété industrielle et commerciale (OMPIC) vient de dévoiler mercredi au siège de la Confédération patronale à Casablanca les résultats de l'étude sur « l'impact économique de la contrefaçon au Maroc». Il en ressort que la consommation moyenne annuelle par habitant s'élève juste à 32 dollars, soit l'équivalent d'à peu près 300 dirhams, contre plus de 130 dollars dans un pays comme la Turquie (15e économie mondiale). Une estimation qui nous laisse pantois. D'autant plus vrai que les Marocains sont accros aux produits contrefaits. Et comme le traduit le proverbe, «on ne peut cacher le soleil par un tamis». L'informel, éternel refuge Au vu de la cherté des biens autorisés, le chaland migre en toute liberté vers les produits de la contrefaçon issus des flux d'importation de pays à risque et du marché informel de production et de distribution sans la moindre menace de courir un risque pénal. Il est aussi une ambiguïté à lever. Les produits autorisés respectent-ils les normes de sécurité ? Le danger guette donc. Miriem Bensalah Chaqroun, présidente de la CGEM ,elle-même, le confirme «on est fortement impacté. La contrefaçon nuit à notre tissu économique induisant en conséquence une consommation sans contrôle», déplore-t-elle. Le discours est logique mais la réalité veut aussi qu'on comprenne. L'étude critiquée aussi bien au niveau de sa méthodologie que sur celui des résultats comme l'ont fait remarquer bien de participants à cette rencontre nous révèle que la contrefaçon ne génère que près de 30 00 emplois informels. Alors que l'informel compte au Maroc une armée de près de 3 millions de personnes, selon les estimations officielles. Plus encore, ce marché parallèle entretient des relations avec le secteur formel et apporte son lot de contribution au circuit économique en créant de la valeur ajoutée, ne serait-ce que dans le cadre de la sous-traitance, comme l'a mentionné Ahmed Lahlimi Alami, Haut Commissaire au Plan lors d'une conférence de presse. Nombre d'économistes pensent même que la résilience de l'économie nationale face à la crise mondiale est due en grande partie au poids du secteur souterrain ou clandestin. Les derniers chiffres du HCP sur l'emploi en 2012 ne trompent pas : une destruction de plus de 110 000 emplois. Eu égard à la hausse du chômage, les chercheurs d'emploi ne trouvent refuge que dans le secteur informel. L'impact du phénomène L'étude laisse dégager également un impact socio-économique situé dans une fourchette allant de 6 à 12 milliards de dirhams, soit 0,7 à 1,3 % du PIB. L'équivalent d'un manque à gagner pour les caisses de l'Etat ou une perte fiscale de 1 milliard de dirhams. Les initiateurs de l'étude se sont basés dans leur diagnostic sur cinq secteurs que sont le textile, le cuir, pièces de rechange automobile, l'électrique et enfin les cosmétiques. Alors que la contrefaçon touche pratiquement au moins 14 activités économiques. Des filières par exemple relevant de la chimie (phytosanitaires) l'agriculture (semences et plantes) ou encore l'emballage n'y figurent pas, fait savoir ce professionnel. Les analyses de terrain ont pu identifier 50 « points noirs » de distribution de contrefaçon sur les quatre régions du grand Casablanca, l'Oriental, le Nord et le Sud. Loin d'être exhaustive et fidèlement représentative en raison de la nature même de l'activité clandestine difficile à appréhender d'ailleurs, l'étude nous fait découvrir que «les marchés informels de production et de distribution contribuent au même titre que les importations de produits contrefaisants à alimenter le marché intérieur en produits contrefaisants». Ce qui montre que les chiffres annoncés sont à manier avec prudence. Preuve en est la quasi-absence de données sur les flux locaux informels réels. Adil El Maliki l'avoue solennellement: «difficile de prouver sur terrain la contrefaçon…», reconnaît-il. Le patron de l'OMPIC a mis le doigt sur là où il fait mal, d'autant que le pays ne dispose pas encore de laboratoires agréés de conformité. En un mot : «naviguer sans radars» !