Abdelilah Benkirane ne veut pas semer la panique. Pour lui, la situation sécuritaire n'est pas aussi inquiétante que le laissent croire certains événements « sporadiques ». Qu'un crime ou un délit secoue une ville à un moment donné, selon le chef du gouvernement, ne légitime aucunement ce constat : « Il n'y a plus de sécurité ». « La réalité est toute autre. Il est vrai qu'un problème existe, mais pas à ce point. La veille quotidienne assurée par les autorités concernées sur la situation sécuritaire dans notre pays montre qu'il n'y a pas de dérapage constant », affirme Benkirane, interrogé sur la situation sécuritaire par l'opposition, lundi 28 janvier, lors de la séance mensuelle des questions de politique générale à la Chambre des représentants. La stabilité en chiffres Benkirane brandit la logique des chiffres pour étayer ses propos, assurant que le Maroc préserve sa stabilité sécuritaire. « Les statistiques montrent que le taux annuel du crime n'a pas connu une augmentation importante au cours des dix dernières années. Selon le ministère de la Justice, il est passé de 400.303 en 2002 à 445.566 en 2011. Le taux du crime au Maroc reste très bas par rapport à d'autres pays similaires », souligne le chef du gouvernement. Et de préciser que le crime reste plus fréquent dans le milieu urbain avec plus 65%. « Malgré la situation qui secoue certains pays de l'Afrique du nord et de la région du Sahel, aucun pays n'a émis d'alerte concernant le Maroc », se félicite le chef du gouvernement, ajoutant que les autorités concernées ne ménagent aucun effort pour maintenir la sécurité. Quelque 400.000 individus ont été déférés devant la justice, dont 17.000 mineurs, 560.000 affaires ont été traitées, dont la majorité, soit 53%, se rapporte à l'atteinte aux personnes et aux biens. Tandis que 480.000 autres ont été résolues portant le taux d'élucidation à 86%. Benkirane affiche sa fierté que « le Maroc soit reconnu au plan mondial pour sa capacité de neutraliser le crime. C'est un talent pour lequel il faut féliciter les autorités sécuritaires », estime-t-il. Stratégie rime avec éducation Si la situation est maitrisée, il faudra en assurer la pérennité. Sur ce point, Benkirane annonce que son gouvernement dispose d'une approche en trois axes. « Notre approche se base sur le traitement des raisons du crime, le renforcement de l'arsenal juridique dissuasif et des moyens sécuritaires. La fréquence du crime, comme vous le savez, est intimement liée à plusieurs raisons, dont l'éducation, la situation économique défavorable et les écarts socio-économiques », précise le chef du gouvernement pour qui le manque ou la quasi absence de l'encadrement des jeunes sur les différents niveaux reste en tête de liste des problèmes à l'origine du crime. « La question de la sécurité ne relève pas uniquement des autorités, mais avant tout de la famille, de l'école et de l'entourage composé de la société civile et des institutions de l'Etat (...) C'est un problème structurel qu'on ne résout pas en un laps de temps », met-il en garde. Se voulant préventive, la stratégie du gouvernement compte donc s'attaquer aux racines du crime sur la base d'une approche participative où chaque élément devra s'acquitter de sa tâche. Et dans cette optique, l'administration pénitentiaire n'est pas dispensée, comme l'a d'ailleurs souligné Benkirane impliquant dans l'effort gouvernemental la réforme de la justice et celle des prisons. Par principe libéral Dans son analyse de la situation, Benkirane estime que le choix « libéral » que le Maroc a fait lui a valu une défaillance de gestion de la question du maintien de la sécurité. En somme, depuis plusieurs années, le Maroc paie la facture des droits de l'homme pour les respecter. « Arriver à un équilibre entre l'accusé et la victime n'est pas chose aisée et c'est le cas dans les plus grands pays », signale le chef du gouvernement appelant les citoyens à faire preuve d'une veille sécuritaire en dénonçant les crimes et en assumant un rôle dynamique dans l'approche participative que propose le gouvernement. « La sécurité relève également de la responsabilité des citoyens », insiste-t-il. Bref, dans la chaîne du maintien de la sécurité, à chacun son maillon, mais personne n'a le droit de s'en défiler.