Faisant exception par rapport à leurs collègues, deux jeunes salariées décident de briser le silence en mettant au grand jour leurs cas dans l'entreprise : elles ne supportaient plus le calvaire dont elles sont victimes depuis un an, l'état de leurs santé ne permettant plus de continuer sur le même rythme de travail. Leur initiative n'a pas pour objet une confrontation directe avec leur patron mais de trouver une solution qui leur permettrait de travailler chez le même employeur, en toute dignité. Une des deux jeunes femmes témoigne : « Notre patron nous fait travailler comme des machines au-delà de l'horaire normal, sept jours sur sept et les jours fériés. Pire encore, il ne nous indemnise pas sur les heures supplémentaires effectuées. Nous ne supportons plus ce traitement et nous avons décidé de ne plus effectuer d'heures supplémentaire». L'employeur a-t-il le droit d'obliger ses salariés à travailler des heures supplémentaires ? Quelle est la procédure à suivre en cas de litige ? Et comment peut-on prouver l'existence des heures supplémentaires en cas de refus de paiement de ces dernières ? Définition de l'heure supplémentaire Le législateur fixe un seuil d'horaires au-delà duquel les heures de travail fournies sont considérées comme des heures supplémentaires. Autrement dit, les heures de travail effectuées dans les activités non agricoles au-delà de 2288 heures par année où 44 heures par semaine sont considérées comme des heures supplémentaires. (Voir article 184). Toutefois le calcul des heures supplémentaires pour le salarié qui travaille à temps partiel, commence dès la première heure qui dépasse le temps de travail convenu avec l'employeur. Le Code du travail prévoit dans ce sens que lorsque les entreprises doivent faire face à des travaux d'intérêt national ou à des surcroîts exceptionnels de travail, les salariés des dites entreprises peuvent être employés au-delà de la durée normale de travail dans les conditions fixées par voie réglementaire, à condition qu'ils perçoivent, en sus de leurs salaires, des indemnisations pour les heures supplémentaires. (Voir article 196) Les conditions pour effectuer des heures supplémentaires En principe, l'employeur est libre d'instaurer des heures supplémentaires. Néanmoins, il doit observer certaines dispositions telles qu'elles sont fixées par le décret n° 2-04-57029 (lire encadré). Il doit en outre faire bénéficier les salariés chargés de les effectuées d'une indemnisation calculée comme suit : les heures effectuées entre 6 heures et 21 heures pour les activités non agricoles et entre 5 heures et 20 heures pour les activités agricoles donne lieu à une majoration de 25%, les heures effectuées entre 21 heures et 6 heures pour les activités non agricoles et entre 20 heures et 5 heures pour les activités agricoles donne lieu à une majoration de 50%. Si les heures supplémentaires sont effectuées le jour du repos hebdomadaire du salarié, même si un repos compensateur lui est accordé, la majoration est portée respectivement à 50% et à 100%. (Voir article 201) Conseils pratiques Le cas précité évoque un cas atypique, car les salariées sont exploitées doublement : elles travaillèrent au-delà des heures sur contingent et elles ne bénéficient pas d'une indemnisation. Malheureusement, le Code du travail n'organise pas cette situation à l'exemple du code du travail français qui prévoit dans l'article L. 3171-4, qu'« en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, l'employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles ». La preuve incombe au salarié Ceci étant, il incombe au salarié d'apporter la preuve qu'il a fourni des heures supplémentaires en produisant un décompte des heures qu'il a prétendu réalisées et en étayant sa demande par tous éléments suffisamment précis pour permettre à l'employeur de répondre en apportant le cas échéant, ses propres éléments sur les horaires effectivement réalisés. Toutefois, en cas de litige, rien n'empêche l'inspecteur du travail ou le juge du fond (contrairement au juge du droit) de demander à l'employeur de produire toutes pièces, tous documents, conclusions ou justifications de nature à lui fournir des éclaircissements. En sus, le juge peut convoquer et entendre tout témoin et il peut également prescrire toutes mesures d'instruction et notamment des expertises conformément à l'article 280 du code de procédure civile. Un refus protégé par la loi Il découle de cette analyse que le chef d'entreprise a le droit de recourir aux heures supplémentaires. Mais, il doit justifier le motif du recours, respecter le volume d'horaires autorisé, les modalités de concertation avec les salariés telles que fixées par le décret évoqué et il doit également verser au salarié l'indemnité des heures supplémentaires majorée au moment de la paie. En cas de non respect de ces conditions, le salarié a le plein droit de refuser de fournir des heures supplémentaires sans craindre le risque de licenciement pour insubordination. La Cour de Cassation estime dans ce sens « que le refus du salarié de travailler au delà des contingents d'heures supplémentaires prévues par la loi, ne constitue point une faute qui induit la résiliation du contrat et que le respect des horaires du travail par le salarié dépend de ce qui est fixé par la loi» (Arrêt de la cour de cassation N°186 Du 20 février 2008).