La raison veut que l'on ne légifère pas sous la pression de l'émotion, à moins de se lancer dans une course au populisme le plus abject. Cependant, les faits divers qui font la Une des journaux sonnent parfois comme autant de rappels de l'immobilisme du législateur sur certains dossiers. L'histoire tragique de cette adolescente qui a tenté par deux fois d'intenter à sa vie en se jetant dans le vide rejoindra vite la cohorte d'autres histoires, plus sordides les unes que les autres. Qui se souvient de Khadija, 11 ans, morte sous les coups de tuyau de gaz de sa matrone en juillet 2011 ? Qui se souvient de Hanane, 9 ans petite bonne à Fès, torturée et brûlée ; de San, petite bonne philippine confinée comme une bête sur un balcon ? Qui se souviendra de toutes ces personnes sans défense, confiées par des familles, que leur précarité aveugle, à d'autres familles où elles devraient théoriquement échapper à la famine et au froid ? Pour une histoire qui alimente la colonne des faits divers, combien ne seront jamais connues ? En attendant de construire un monument à ces innocentes mortes parce qu'elles ne comptaient pour rien, il est urgent, non pas de légiférer, mais de mettre en pratique les lois qui ont déjà été proposées, de se montrer sévère avec les criminels qui soulagent leurs frustrations en s'en prenant à des enfants et d'organiser un secteur où règne le flou le plus total. Le travail domestique est une réalité avec laquelle il faut composer. Il est urgent d'assujettir les employés de maisons, les concierges et les gardiens au code du travail pour les protéger. Une société qui exclut une faction des siens des droits élémentaires, est une société qui maquille l'esclavagisme sous des prétextes les plus fallacieux les uns que les autres où se mêlent faux paternalisme et fausse générosité. Au XXIème siècle, ceci ne devrait se voir que dans les livres d'Histoire, pas dans la presse. Pour que le sort de toutes ces victimes ne soit pas réduit à néant, il faut mettre la pression sur le législateur pour que cette priorité soit traitée comme telle.