L'Espace associatif, conscient du rôle que doit jouer la société civile au lendemain des acquis accordés par la constitution à cette même société, a organisé, mercredi dernier à Rabat une table ronde sur «La loi de finances 2013 ; quels rôles et niveaux d'action de la Société civile ? ». Eléments de réponse. Selon l'indice IBO, le Maroc est classé 69e en 2010. Dans le cadre de la stratégie de l'Espace Associatif dans le suivi des politiques publiques conformément aux apports de la nouvelle Constitution, cette institution a organisé, en parallèle avec la présentation officielle devant le parlement du projet de loi de finance 2013, une table ronde discutant dudit projet en se posant la question des rôles et niveaux d'action de la société civile. A l'occasion de cette table ronde les participants ont questionné la démocratie participative dans la préparation de cette nouvelle loi 2013 ainsi ce qu'elle offre comme avantage pour les secteurs sociaux. Partant du fait que le contrat social et le contrat fiscal sont inséparables et que la justice sociale ne peut être atteinte sans équité fiscale, Abdelaziz Messaoudi, trésorier adjoint de Transparency Maroc a souligné que le programme du gouvernement actuel présente un certain nombre de lacunes. En effet, il est constaté une absence de diagnostic permettant de déterminer les causes profondes et structurelles de la situation socio-économique actuelle. De même, que jusqu'à l'heure, l'ensemble des déclarations de bonnes intentions n'a été accompagné que par des actions symboliques et ponctuelles. En somme, il y a une absence de véritables projets de changement ». Tout en poursuivant que le projet de la loi de finance 2013 se caractérise par « une éternelle transition des mesures proposées, une prédominance des prorogations qui sont multiples traduisant ainsi la continuité à défaut de changement et donc absence de nouvelle stratégie déclinée en action concrète ». Par ailleurs, « le projet présente des mesures ponctuelles et limitées traduisant un traitement conjoncturel et superficiel des problèmes économiques et sociaux avec une logique à prédominance caritative, contraire à la logique solidaire agissant sur les causes structurelles sans oublier le recour excessif aux taxes parafiscales alimentant des fonds dont la gestion est opaque », précise Messaoudi. Une fiscalité injuste Sur le volet fiscal, le trésorier adjoint de Transparency Maroc tient à rappeler que 10 % des sociétés paient plus de 80 % de l'IS, et que 75 % à 80 % de l'IR sont payés par les salariés. En parallèle, la TVA connaît une augmentation constante transférant ainsi la charge fiscale d'une catégorie sociale à une autre, de plus en plus supportée en particulier par la classe moyenne et les catégories sociales les moins aisées. En effet, selon Messaoudi l'expérience récente de l'évaluation des dépenses fiscales, comme premier pas vers la transparence budgétaire, a été récupérée et instrumentée pour faire passer la conception néo libérale de la fiscalité basée principalement sur le concept de « neutralité fiscale » et cherchant à consacrer la TVA comme principale source des recettes publiques. Cette approche a mené à offrir des cadeaux en matière d'IS avec la baisse du taux normal de 35% à 30%, justifiée par une soi-disant concurrence fiscale internationale, et de 39,6% à 37% pour le secteur financier. La baisse de l'IR a, de son côté, profité aux tranches supérieures et ces baisses seront largement compensées par la suppression d'exonérations ou de rehaussements de taux en matière de TVA. Quant à Najib Akesbi, économiste, il s'exclame sur le fait que « sur 4 mesures adoptées dans ce projet de loi de finance il y a 3 mesures prorogées accordant des avantages. Or, ne serait-ce que par respect aux députés, il fallait publier des études montrant l'utilité et l'impact de ces mesures justifiant cette prorogation ». Budget non compréhensible La loi de finance souvent jugée technique et difficilement compréhensible, peine selon l'Indice sur le budget ouvert (IBO) à apporter l'information nécessaire pour l'étudier. En effet, d'après cet indice qui évalue la quantité et le type d'informations que les gouvernements mettent à la disposition du public dans les 8 documents budgétaires clés qui doivent être publiés durant l'année budgétaire, « le Maroc offre une information minime et obtient un score de 28 sur 100 », précise Azzedine Akesbi, analyste économique. Il est ainsi classé 69e en 2010. Par rapport aux pays arabes la performance du Maroc est faible. La Jordanie obtient un score de 50, l'Egypte de 48 et le Liban de 32. Or « un niveau faible de l'information fournie ne permet pas aux citoyens d'être associés et de tenir le gouvernement responsable pour sa gestion de l'argent public ». Une situation qui ne traduit pas l'esprit de la nouvelle constitution du royaume et qui assoit le droit d'accéder à l'information détenue par l'administration publique, les institutions élues et les organismes investis d'une mission de service public (article 27 de la constitution 2011) ou encore le droit des ONG à participer à l'élaboration, la mise en œuvre et l'évaluation des décisions et des projets des institutions élues et des pouvoirs publics (article 12 de la même constitution). Pour Saïd Saadi, ancien ministre, l'orientation budgétaire n'accorde pas assez de lignes budgétaires aux secteurs sociaux, tel la santé ou l'éducation, contrairement aux annonces du gouvernement. Pis encore, rapporter les budgets accordés à ces secteurs au budget global fait ressortir un recul par rapport aux années précédentes. « Or l'austérité n'est pas la seule solution face à la crise. Elle présente plutôt un risque inflationniste ». * Tweet * *