Face au casse-tête que représentent les milices illégales, les autorités libyennes ont décidé de dissoudre tout groupe armé ne relevant pas de l'autorité de l'Etat. Les habitants de Benghazi lors d'une manifestation, vendredi, contre la présence de milices dans la ville. Les autorités libyennes ont annoncé dans la nuit de samedi à dimanche avoir décidé de dissoudre toutes les milices et groupes armés ne relevant pas de l'autorité de l'Etat, au lendemain de la sanglante rébellion des habitants de Benghazi contre des miliciens islamistes. L'armée a également fixé un ultimatum de 48 heures aux milices et groupes armés pour évacuer les bâtiments publics et les propriétés des membres de l'ancien régime dans la capitale et ses environs. « Il a été décidé la dissolution de toutes les brigades et formations armées qui ne sont pas sous la légitimité de l'Etat », a déclaré le président du Congrès général national libyen (CGN, Parlement), Mohamed al-Megaryef. Les autorités ont décidé également la mise en place d'un centre opérationnel à Benghazi, regroupant l'armée, les forces du ministère de l'Intérieur et les brigades d'ex-rebelles qui dépendent du ministère de la Défense, a ajouté Mohamed al-Megaryef. Le pouvoir a, par ailleurs dit, le chef d'état-major, Youssef al-Mangouch, d'asseoir son autorité sur les brigades qui font partie de l'armée, en plaçant des officiers de l'armée régulière au commandement de ces formations d'ex-rebelles qui avaient combattu le régime de Mouammar Kadhafi. Ultimatum Le nouveau pouvoir n'est pas parvenu à désarmer ces groupes d'ex-rebelles bien que plusieurs d'entre eux aient intégré les ministères de la Défense et de l'Intérieur. Vendredi, des dizaines de milliers de Libyens avaient manifesté pacifiquement contre la présence de milices armées dans la ville, où l'ambassadeur américain en Libye et trois autres Américains avaient été tués, le 11 septembre lors des premières protestations contre le film anti-musulman L'innocence des musulmans. Des centaines de manifestants avaient ensuite délogé le groupe salafiste d'Ansar al-Charia de la caserne qu'il occupait au centre-ville. Pointé du doigt par la population et plusieurs médias, le groupe avait démenti toute implication dans l'attaque du consulat. Par la suite, des centaines d'entre eux ont pris d'assaut des quartiers généraux et des bases de ces milices faisant 11 morts et des dizaines de blessés. Six membres des forces de sécurité figurent parmi les personnes qui ont été tuées. « Vu la nature des blessures, c'est clair que les six personnes ont été exécutées », a indiqué un médecin sous couvert de l'anonymat. L'armée a toutefois précisé qu'elle ferait usage de la force si la décision relative à la dissolution des milices n'est pas suivie. 3 QUESTIONS À … Mohamed Benhamou président de la Fédération africaine des études stratégiques. « Le dialogue est toujours possible avec ces miliciens » Quel danger représentent les milices armées pour la stabilité de la Libye aujourd'hui ? La situation sécuritaire en Libye est très préoccupante. La présence de ces milices fragilise davantage la transition et menace le rétablissement de la stabilité et de la paix dans le pays. Ces milices ont une grande autonomie d'action, même celle qui sont sous l'autorité de l'Etat. Cela fait qu'il n'y a pas un contrôle réel et une autorité sur ces différents groupes. La décision de dissoudre toute milice et groupes armés ne relevant de l'autorité de l'Etat sera-t-elle suivie selon vous ? La décision de dissoudre les milices illégales, annoncée par les autorités libyennes, est une décision importante politiquement. Toutefois, elle aura du mal à se mettre en oeuvre sur le terrain. Les milices sont importantes en nombre et leur force de frappe n'est pas moindre. Cela suppose donc que ces groupes armés ne vont pas se laisser faire. Quelle est la solution à votre avis ? D'abord cette situation est due à des préalables non établis et non gérés. C'est la non-gestion de certaines situations qui a conduit aujourd'hui à cela. Cependant, on doit pas non plus négliger certains facteurs régionaux tel que la crise malienne et les autres conflits. Sur le plan interne, il faut qu'il ait un partage du pouvoir mais aussi de la richesse du pays. Il faut de même souligner que le désespoir qui a conduit au mouvement de contestation contre l'ancien régime n'a pas disparu. Cela a engendré une colère qui demeure toujours. Sur le plan international, il y a aussi des actes irresponsables comme ce film « Innocence des musulmans » qui a enflammé les choses conduisant à la mort du diplomate américain à Benghazi. Nous sommes donc dans un contexte qu'il faut gérer avec la raison et non la passion. Je pense que le dialogue est toujours possible avec ces miliciens. Pour ce faire, je pense qu'il faut une stratégie globale qui réponde aux attentes.