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Abdelkader Amara : « Il est temps de mettre le turbo » | Le Soir-echos
Publié dans Le Soir Echos le 11 - 06 - 2012

Le ministre de l'Industrie, du commerce et des nouvelles technologies, Abdelkader Amara, revient pour Le Soir Echos, sur le bilan de la 6e édition de la Caravane pour l'Afrique qui s'est achevée à Ouagadougou samedi. Dans cet entretien, Abdelkader Amara évoque notamment les avantages du Maroc sur le marché africain et son positionnement.
[cooperation]
Ci-dessus, le port de Libreville, l'un des plus attractifs de l'Afrique centrale. «Le Maroc a déjà posé les jalons d'une coopération Sud-Sud solidaire avec l'Afrique subsaharienne », affirme Abdelkader Amara, le ministre d'Industrie, du Commerce et des Nouvelles Technologie (ci-dessous).
Qu'est-ce qui ressort de cette 6e édition de la caravane pour l'Afrique ?
Il est clair que l'organisation de cette 6e édition de la caravane consacre notre démarche qui a pour but de consolider et de fructifier les relations économiques et commerciales entre le Maroc et les pays de l'Afrique subsaharienne. Bien sûr, on ne peut que se réjouir quand on voit qu'il y a une sixième édition dans laquelle on est arrivé à faire adhérer un certain nombre d'entrepreneurs marocains et leurs homologues gabonais, camerounais et burkinabés. Pour nous, c'est très important d'autant plus que cela représente le côté opérationnel de cette relation au vu du nombre d'accords, de conventions et de mémorandums d'entente. Cette caravane représente un outil opérationnel et professionnel qui a pour but de mettre côte-à-côte les hommes d'affaires pour qu'ils puissent trouver des pistes de partenariat. Autrement, nos relations se limiteraient à un cadre général. Quand je vois les rencontres B to B organisées dans le cadre de la caravane, je me dis déjà que c'est un travail de terrain qui va aboutir à quelque chose car cela permet aux deux parties d'exposer les opportunités et les difficultés, en vue de trouver des pistes propices de part et d'autre. Nous sommes maintenant plus que déterminés car il s'agit d'une orientation de sa majesté le roi et aussi d'une déclaration du nouveau gouvernement d'aller de l'avant. Le continent africain est appelé à connaître dans les années à venir des taux de croissance très intéressants et va devenir le deuxième après l'Asie. Et comme tout le monde, on est bien sûr intéressé par les marchés où il y a de la croissance.
[Abdelkader-Amara]Quel est le positionnement du Maroc aujourd'hui sur le marché africain ?
En 2010 par exemple, on était à 590 millions de dollars d'investissement sur le continent. On est en deuxième position après l'Afrique du sud. 90 % des investissements extérieurs du Maroc ont été effectués sur le continent. Ce sont des chiffres, bien sûr, très intéressants. Nous avons nos banques à l'instar de Attijariwafa bank et de la BMCE qui sont déjà présentes en Afrique subsaharienne. Il y a aussi, bien sûr, d'autres sociétés marocaines qui sont également présentes dans plusieurs secteurs. Donc, sur le plan de l'infrastructure, nous avons déjà posé des jalons qui permettraient in fine aux hommes d'affaires de s'installer et de commercer. Et force est de remarquer que le flux du commerce reste en deçà de nos aspirations. L'exemple du Burkina faso l'illustre très bien d'ailleurs. Nos échanges n'excèdent pas les 177 millions de dirhams et encore ils sont en faveur du Maroc. Mais il faut dire également que le commerce intra-africain ne représente que 10 % alors qu'en Amérique latine il est déjà au delà de 26 %, en Union Européenne c'est pratiquement au delà des 70 %. Il y a donc une marge pour nous africains de renforcer nos échanges. Le Maroc est en train de poursuivre sa démarche, notamment dans la signature de plusieurs accords en vue de créer un cadre d'affaires avec les garanties nécessaires.
Quels sont les obstacles qui handicapent aujourd'hui cette coopération Sud-Sud de proximité ?
Concernant les obstacles, il y a d'abord un problème de distance car le Maroc commerce plus avec l'Europe parce qu'étant plus proche. Il y a un problème de transport lié aux lignes maritimes, aux plates-formes logistiques et autres. À cela s'ajoute aussi une certaine lourdeur liée aux démarches administratives et tout ce qui est procédure qu'il faudrait limiter avec un certain nombre d'accords.
Cependant, il y a aussi un avantage incitatif mutuel car le Maroc a signé des accords de libre- échange avec les Etats-Unis, la Turquie et nous avons un statut avancé avec l'Union Européenne. Un homme d'affaires, on ne peut l'intéresser que quand il y a un cadre attractif. Et les pays que nous visitons dans le cadre de la caravane sont des pays qui, en général, jouissent d'institutions démocratiques et qui sont obligés d'observer une certaine rigueur quant à leur indicateur économique.
[Abdallah-Hamza]
Abdelkader Amara a été remplacé au pied levé par Abdellatif Maazouz, ex ministre du Commerce extérieur, lors de l'étape camerounaise de la caravane.
Vous avez rencontré samedi, le président de la Commission de l'UEMOA à Ouagadougou. Qu'en est-il de l'accord commercial avec l'UEMOA ?
Tout à fait, cette rencontre a été assez fructueuse. Je suis revenu à la charge pour réitérer la position du Maroc parce que c'est un accord qui a déjà été ficelé en 2008 et était en attente de ratification. Mais malheureusement, il y a eu un contre-temps qui a empêché cette ratification d'avoir lieu à Rabat. Entre-temps aussi, d'autres sujets importants liés à la sécurité, l'énergie et autres ont pris le dessus et mis cet accord en attente. Je suis donc revenu avec le président de la Commission de l'UEMOA (NDLR : Union économique et monétaire ouest-africaine) sur l'importance de ratifier cet accord qui constitue un signal très fort. Et le Maroc aussi a concédé un certain nombre d'avantages sur le plan industriel, notamment l'exonération des droits de douane pour permettre aux produits en provenance de ces pays d'atteindre le marché marocain. Je peux donc vous dire que j'ai été rassuré par le président de la commission comme quoi c'est un sujet qui va être débattu très prochainement malgré la panoplie de sujets actuellement en cours.
Comment le Maroc compte-t-il peser de tout son poids sur le marché africain aussi convoité par les grandes puissances comme la Chine ?
Certes, la concurrence internationale est très féroce mais il ne faut pas aussi ignorer la conjoncture internationale actuelle. Il y a une crise économique internationale et on ne sait pas trop comment cela va évoluer. Selon les institutions financières internationales, l'Europe connaîtra dans les années à venir une récession. Et cette situation va peser sur le commerce international. Il y a donc un certain nombre de pays qui commencent à se tourner vers l'Afrique qui représente aujourd'hui un grand chantier très intéressant. Dans cette situation, le Maroc, qui a déjà posé les jalons d'une coopération Sud-Sud solidaire avec l'Afrique subsaharienne, va accélérer le processus. C'est d'ailleurs pourquoi nous sommes revenus à la charge dans le cadre de cette caravane sur l'accord avec l'UEMOA. Nous allons aussi faire bouger l'accord avec la CEMAC ( NDLR : Communauté économique et monétaire de l'Afrique Centrale). C'est dans ce même cadre que le ministre des Affaires étrangères a effectué des visites dans un certain nombre de pays en Afrique subsaharienne. Il y a eu tout récemment la réunion de la commission mixte maroco-burkinabé. Il y a également la lettre de sa majesté aux assemblées générales de la Banque africaine de développement(BAD) dans laquelle, il a réitéré un certain nombre de principes. Maintenant, nous allons mettre le turbo. Par rapport à la Chine et à la Turquie qui veulent avoir un pied sur le continent, le Maroc a toujours eu des relations séculaires avec le reste de l'Afrique. Et de plus, nous avons un savoir-faire qui pourrait bénéficier aux pays de l'Afrique subsaharienne. De même, avec tous les accords de libre-échange que le Maroc dispose, il est devenu une plate-forme. Et le plus important, c'est d'ailleurs un point de vue que j'ai toujours défendu lors de mes déplacements sur le continent, le Maroc est là dans une logique de partenariat, une logique de co-développement et non pas uniquement dans une stratégie commerciale pure et dure de trouver des marchés pour écouler ses produits. C'est donc un partenariat gagnant-gagnant à même de permettre à ces pays de profiter de l'expérience qu'a eue le Maroc avec d'autres pays
Des perspectives d'avenir ?
Je pense qu'il y a un certain nombre d'outils qui sont déjà actionnés, mais ils ont besoin d'être réévalués. À travers les réunions et rencontres avec nos homologues des pays de l'Afrique subsaharienne, nous allons travailler sur des thématiques identifiées. Il faudrait aussi que, dans les prochains rendez-vous, on puisse avoir le feed-back pour permettre d'aller de l'avant et surtout peaufiner un certain nombre de sujets. Des projets conjoints devront également suivre pour matérialiser ce partenariat.
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