C'est une autre paire de manches à laquelle sera confrontée l'équipe Benkirane. Après avoir déballé la liste des détenteurs d'agréments relatifs aux autocars, les professionnels des taxis attendent impatiemment leur tour. À elle seule, Casablanca compte pas moins de 17 000 taxis, dont 7 000 « blancs ». L'écrasante majorité des chauffeurs de taxis ne sont pas propriétaires de leurs véhicules. La poignée de privilégiés qui contrôle la totalité du parc est composée de ceux qui justement détiennent les « Grimate » d'exploitation des taxis. Le pavé dans la marre de Aziz Rebbah a fait bien des émules et les professionnels des taxis s'attendent à ce que le ministère de l'Intérieur fasse de même. En effet, aussi paradoxale que cela puisse paraître, les agréments et licences d'exploitation des taxis ne sont pas délivrés par le ministère du Transport, mais par l'Intérieur. La question qui se pose donc, est de savoir si le ministre de l'Intérieur, Mohand Laenser, publiera la liste de ces agréments. Plus d'équité Contacté par Le Soir échos, le coordinateur national des professionnels du secteur des taxis Lhaj Chafai, fait part de ses attentes, suite à la première liste de Rebbah. « Nous ne pouvons qu'être satisfaits de ce qu'a fait le ministre de l'équipement et du transport, et nous souhaitons que le ministre de l'Intérieur fasse de même », déclare-t-il. Concernant son point de vue à propos des détenteurs d'agréments de taxis, Chafai répond que « certains détenteurs d'agréments en ont jusqu'à sept ou huit », déplorant le fait que les principaux concernés, à savoir les chauffeurs, pour leur majorité, n'en ont pas une seule. Pour ce syndicaliste, le plus « scandaleux est le fait que bon nombre de détenteurs d'agréments sont très fortunés. Il y a des militaires, des policiers et même des hommes politiques. Sans parler de familles entières dont chaque membre dispose de sa « grima » », dit-il avec amertume. Pourtant, Chafai ne souhaite pas la fin du système des agréments. Pour lui, il faut réduire le nombre d'agréments à un seul par famille, mais surtout « les distribuer aux personnes réellement nécessiteuses, comme les mutilés de guerre, où les chauffeurs eux-mêmes ». Une manière, selon lui, d'installer un peu plus d'équité dans le secteur. La plupart des chauffeurs de taxis voient dans ce système des « grimate » une sorte d'« esclavagisme moderne », comme l'ont scandé plusieurs syndicalistes lors de la réunion qu'a tenue Rebbah avec les professionnels du secteur des transports, dimanche dernier à Casablanca. À la merci des détenteurs de « grimate » Pour Chafai, nombre de détenteurs de « grimate » doivent « rendre des comptes », arguant qu'il « faut en finir avec les privilèges ». « Ce système n'est pas sérieux, il faut que le ministère de l'Intérieur publie la liste au plus vite », réclame-t-il. Le département de Rebbah avait promis, dans une déclaration au Soir échos, que toutes les listes, de tous les ministères, allaient être « rendues publiques ». Mais entre promesses et passage à l'acte, le fossé est parfois plus profond qu'il ne le paraît, d'autant plus que l'initiative de Rebbah ne semble pas plaire à tout le monde, au sein même du gouvernement. Pendant ce temps, les chauffeurs de taxi continuent à travailler, sans couvertures sociales, sans retraites et à la merci des détenteurs des « Grimate ».