Le roi Mohammed VI a inauguré, jeudi 9 février, l'usine de l'Alliance Renault-Nissan à Tanger, en compagnie de Carlos Ghosn, PDG de Renault et de Nissan. Ce seront pas moins de 60 véhicules par heure, 6 000 emplois directs et 30 000 indirects qui seront générés par cette implantation qui représente un investissement d'un milliard d'euros. La capacité maximale de 400 000 véhicules par an de l'usine permettra à Renault de poursuivre le succès mondial rencontré par la gamme Entry (Logan, Sandero, Duster). « Renault et Nissan partagent avec le Royaume du Maroc de grandes ambitions de développement industriel. Grâce à l'engagement de Renault et de ses partenaires, et au soutien sans faille du gouvernement marocain, notre usine est en bonne voie de devenir une nouvelle référence de l'industrie automobile mondiale », a déclaré Carlos Ghosn lors de la cérémonie d'inauguration. Une cérémonie particulière puisque le Roi Mohamed VI a eu droit à la présentation en avant-première mondiale de la Lodgy, la voiture low-cost, actuellement fabriquée par Renault dans l'usine de Tanger. Un monospace 5 ou 7 places qui sera commercialisé à partir du printemps. Outre la Lodgy, la deuxième ligne du site tangérois devrait produire très prochainement un utilitaire style Kangoo en version low-cost et, début 2013, un troisième véhicule qui viendra en remplacement de la Logan. Une 3e ligne pour Nissan « La deuxième ligne de l'usine devrait, de son côté, être opérationnelle dès la fin de cette année », révèle au Soir échos Basegmez Tunç, directeur de l'usine Renault Tanger. Quand à la production, « elle atteindra sa vitesse de croisière sur la première ligne (170 000 véhicules) à partir de 2013. Cette production augmentera avec la ligne 2 au fur et à mesure que nous maitriserons les process, que nos ouvriers seront formés pour que nous puissions garantir la qualité de nos véhicules », ajoute-t-il. Plus concrètement, dans un premier temps, Renault produira entre 150 000 et 170 000 véhicules, l'objectif étant d'arriver à 400 000 véhicules à partir de mi-2014. Carlos Ghosn a aussi tenu à annoncer, lors d'une conférence de presse à l'issue de l'inauguration, qu'une troisième ligne était prévue dans l'usine de Renault et qu'elle devrait être destinée à la production de Nissan. Par ailleurs, « le choix de Tanger est clair », déclarent une nouvelle fois les responsables de Renault. « Le détroit représente le carrefour de plusieurs routes maritimes et Renault servira tous les marchés du pourtour méditerranéen et d'Amérique latine », précise-t-il. Ceci dit, c'est toute l'économie de la région qui va être impactée. Tout autour du site, des dizaines d'équipementiers se sont déjà installés. Ils ont créé des centaines d'emplois nouveaux. Une délocalisation qui fâche en France L'ouverture de Renault au Maroc n'a pas le même goût en France. Le parti socialiste a fustigé l'initiative du constructeur automobile. De son côté, François Bayrou (Mouvement démocrate) veut défendre le « made in France ». Quant à François Hollande (parti socialiste), il évoque le patriotisme industriel et rappelle que quelque 880 000 sites industriels ont été fermés en France depuis 2009 et qu'environ 100 000 emplois industriels ont été perdus durant la même période. Mais il faut le rappeler: depuis 2009, ce sont 494 000 nouveaux sites industriels qui ont été créés en France. Ces hommes politiques n'ont visiblement pas saisi le concept de spécialisation de gamme. Renault entend s'attaquer au créneau de la voiture low-cost. La réponse de Carlos Ghosn ne s'est pas fait attendre : « La question du low-cost, c'est de faire au Maroc ou de ne pas faire du tout » et au vu du coût du travail en France, il n'est pas possible d'y produire du low-cost. Ce low cost serait même encore trop cher pour certains marchés comme l'Inde. Le low-cost, fer de lance de Renault La nouvelle usine de Melloussa produira donc essentiellement des voitures low cost. Renault veut faire de ce site sa nouvelle base arrière de véhicules économiques. Avec 6% de rentabilité pour le moment, cette gamme a d'ailleurs de beaux jours devant elle. Les européens privilégient les petits budgets et les pays émergents se ruent sur ces automobiles. « Nous avons énormément augmenté nos ventes, dans plusieurs pays, grâce aux véhicules low-cost. C'est le cas du Maroc (avec 20% de pénétration, légèrement devant Renault), du brésil ou de la Russie où ces mêmes véhicules font de très gros scores de ventes », nous explique Gérard Detourbet, directeur du programme Entry et membre du comité de direction de Renault. Donc après avoir vendu plus de 800 000 modèles économiques, le constructeur français vise la barre des 1 million cette année. L'ouverture de Tanger vient à point nommé, au moment où l'usine roumaine créée pour concevoir les premières voiture low-cost du groupe et ouverte en 1999 arrive à saturation. Les marocains pourront donc se concentrer sur la nouvelle Lodgy. 85% de la production sera exportée vers plus d'une centaine de pays, d'Europe – la France devrait être un gros client- , d'Amérique latine en passant par l'Afrique, un potentiel encore inexploité que Renault vient de conquérir. « Les exportations du royaume seront valorisées de plus de 38 milliards de dirhams ». Ce sont là les propos de Abdelkader Amara, ministre du Commerce, de l'Industrie et des nouvelles technologies. Les 15 % restants devraient, de leur coté, être commercialisés au Maroc. Vu les derniers chiffres de vente de la marque dans le royaume en janvier (+34 % par rapport à janvier 2011), tout laisse à penser que les Marocains continueront à compter sur les françaises. « C'est une marque qui va continuer à croître parce que nous proposons de plus en plus de produits qui sont en harmonie avec les besoins du pays », souligne Gérard Detourbet. L'histoire d'amour entre Renault et le Maroc dure depuis 84 ans et elle n'est pas prête de se terminer.