La raison a fini par l'emporter sur les souhaits. Les promesses de Benkirane de porter le SMIG à 3 000 DH ont été reléguées aux oubliettes. Contre toute attente, le patronat s'est prononcé officiellement contre la hausse du SMIG tant promise par le chef du gouvernement. Le refus catégorique de Jamal Belahrach, président de la Commission emploi et relations sociales de la CGEM, lors d'une rencontre, jeudi au siège de la confédération, inscrit le SMIC à 3 000 DH aux abonnés absents. « Le patronat n'est pas prêt à tout donner », tranche Belahrach. À ses yeux, améliorer le pouvoir d'achat des consommateurs pour donner un coup d'accélérateur à la machine économique ne passe pas obligatoirement par la voie du SMIG. D'autres périmètres de jeux existent où l'Etat pourrait intervenir pour diversifier les sources de revenus. Le professionnel de l'intérim pense en fait à la fiscalité , la couverture sociale… 200 000 jours de grêve Cette sortie médiatique, faut-il le souligner, tombe à pic. Et ce n'est pas un hasard que Belahrach lance à ce moment précis et ce messages, signe annonciateur d'un exercice qui n'est pas de tout repos pour le trio de choc Etat – patronat – syndicat. L'objectif annoncé est de « pacifier le territoire économique (…) au moment où le mur de le méfiance est tombé ». Au moment aussi où le climat social semble être très tendu. L'effet Printemps arabe oblige ! Les chiffres présentés par Belahrach confirment d'ailleurs le constat : les gréves ont enregistré, entre le premier semestre 2010 et celui de l'année 2011, un bond spectaculaire de 80%. Ce qui équivaut à plus de 200 000 jours perdus. Un chiffre record. Sans compter bien sûr le manque à gagner en termes de compétitivité et de productivité. Sommet social et observatoire Aujourd'hui et plus que jamais, le président de la commission emploi conçoit que « notre pays, ayant une chance historique, doit changer sa manière de traiter les sujets fondamentaux qui structurent sa société ». Raison pour laquelle il propose de donner corps à un sommet social, à fréquence biennale, dans un premier temps. Qui traiterait de lourds dossiers, d'urgence, tels le code du travail, le droit de grève, la promotion des conventions collectives… auxquels le nouvel exécutif devrait apporter des solutions rapides et efficaces. L'idée semble être, aux yeux de son concepteur, un bon moyen pour mettre à plat toutes les problématiques en souffrance de sorte à briser les tabous. « Un sommet social garant de la stabilité est plus qu'un besoin , c'est une nécessité absolue », insiste-t-il. À l'instar de l'observatoire de l'emploi et de l'employabilité, « l'installation d'un observatoire de médiation sociale serait une avancée extraordinaire », ajoute Belahrach. Inventer notre modèle Celui-là même déclare que le dialogue social, «caduc dans sa forme actuelle», commence à emprunter, quoi qu'il en soit, la bonne route. Déjà et suite à l'appel lancé par le patronat, une des six centrales syndicales a répondu présent. L'UMT, en l'occurrence, et le patronat ont signé mercredi dernier une convention. Ainsi, six sur les neufs problèmes soulevés ont trouvé leur voie de résolution, aux dires de Belahrach. Par ailleurs, ce dernier semble être imbibé par le modèle social allemand en matière de politique sociale. «Efficace qu'il est, ce modèle est flexible dans sa rigidité », explique-t-il, avant de modérer son propos en rétorquant: «l'idéal est d'inventer notre propre modèle». Liberté syndicale Pour Belahrach, le climat social et celui des affaires passe par l'installation d'un dialogue social. « Le dialogue direct entre les entreprises et les syndicats devra se renforcer et prendre une forme nouvelle, avec une représentation syndicale plus professionnelle au sein des entreprises, pour que l'efficacité du dialogue soit ressentie par les salariés et que l'entreprise ne soit plus l'ennemie des salariés ni des syndicats ».