Saâd-Eddine El Othmani a réussi haut la main sa première sortie médiatique. Lundi soir, lors d'une conférence de presse, le nouveau ministre des Affaires étrangères et de la coopération a forcé l'admiration de son assistance. Récit. Le pas pressé, l'élégante silhouette de Saâd-Eddine El Othmani arpente les couloirs de son nouveau département, pour rejoindre au plus vite la salle de conférence. Quelques jours à peine après sa succession à Taïeb Fassi El Fihri, le nouveau ministre des Affaires étrangères et de la coopération accueille les médias à bras ouverts dans une ambiance chaleureuse. Même les flashs interminables et vexants des appareils-photos ne le dérangent pas. Patient et très calme, c'est lui qui tient à donner aux photographes le temps qui leur est nécessaire avant d'entamer son discours, malgré le retard que cela génère. Tout sourire, le chef de la diplomatie est un homme heureux, très à l'aise dans ses nouvelles fonctions qu'il promet d'accomplir du mieux que possible et avec autant de dynamisme que son prédécesseur. A cette rencontre plutôt conviviale, il prévient que sa première sortie médiatique n'est qu'une prise de contact préliminaire qui fera bientôt suite à une série de rencontres plus ciblées. Mais cette prise de contact dure finalement plus longtemps que d'habitude, à la demande du ministre tenant à offrir pleine liberté aux journalistes avides de connaître sa vision et ses perspectives. Le ministre est bien contraint de n'en dévoiler qu'une infime partie puisque, comme il le rappelle, il faudra attendre la déclaration du gouvernement dès que le programme sera approuvé par le Parlement. Sagesse, Saâd-Eddine El Othmani en a fait toujours preuve et c'est bien à cela qu'il doit son ascension fort méritée et aussi sa maîtrise de l'art et de la manière de la diplomatie. On reconnaîtra au PJD d'avoir été pointilleux dans le choix de l'homme de la situation. « Nous avons une responsabilité, celle de nouer et de renforcer nos liens avec les composantes de l'Union du Maghreb arabe et du pourtour méditerranéen ». Un premier pas certain En fait, cette première conférence, organisée ce lundi soir 9 janvier, intervient à l'issue d'une rencontre que le ministre a tenue avec les ambassadeurs arabes et africains au Maroc. « Nous avons une responsabilité, celle de nouer et de renforcer nos liens avec les composantes de l'Union du Maghreb arabe et du pourtour méditerranéen. Pour utiliser mon vocabulaire, je parlerais de l'ensemble des pays arabes islamiques et africains mais aussi ceux du monde entier », lance-t-il. Une série de rencontres est inscrite à l'agenda du ministre qui devra donc s'entretenir avec l'ensemble des diplomates de différentes zones : arabe, africaine, européenne, américaine et asiatique. « Dans son lancement, cette initiative a concerné la zone arabe qui sera suivie par celle africaine. Nous ne ménagerons aucun effort pour activer la diplomatie et mettre en place, pour cela, à des mesures opérationnelles », déclare le ministre avec détermination. Des perspectives de travail et « d'acclimatation » du Maroc avec les mutations que connaissent ses partenaires dans les quatre coins du monde, c'est l'objectif que compte atteindre Saâd-Eddine El Othmani qui n'a pas tarit d'éloge, sur ce point précis, à l'égard de l'équipe de Taïeb Fassi El Fihri : « J'ai trouvé une équipe compétente qui veille et suit de très près, de jour comme de nuit, les différentes problématiques et évolutions ». Comblé, le ministre devra poursuivre la mission de son prédécesseur et y apporter une nouvelle dynamique marquée par une priorité, celle de l'application de la nouvelle Constitution. « Nous resterons fidèles à nos partenaires traditionnels, aux conventions et engagements qui nous lient. Nous le ferons dans le cadre du principe d'équilibre bilatéral », affirme le ministre, soulignant que la diplomatie marocaine est appelée à accomplir « son devoir » vis-à-vis des Marocains du monde. Un devoir et des principes Devoir oblige, donc, le ministre annonce de grandes évolutions dans l'affaire des Marocains détenus en Irak. Maîtrisant le sujet, El Othmani a même préparé un communiqué sur ce cas précis. « Le ministère a accompli plusieurs démarches à commencer par l'établissement du contact avec l'ambassade d'Irak au Maroc, la nôtre à Bagdad, la Croix-Rouge internationale. Taïeb Fassi El Fihri avait d'ores et déjà adressé une lettre au ministre irakien des Affaires étrangères à ce propos », explique-t-il. Et de préciser que l'intervention du ministère durant ces derniers mois s'est faite dans un cadre humanitaire. « Le but est d'améliorer les conditions de détention des Marocains, d'établir une liste même si cela s'avère très difficile et de permettre au CNDH d'accomplir une visite sur place », indique le ministre. L'exécution le 27 octobre 2011 d'un détenu marocain, Badr Achouri, par les autorités irakiennes a attisé les craintes de la diplomatie marocaine décidée plus que jamais à éviter à d'autres Marocains un sort pareil. « La peine de mort contre un autre Marocain en Irak a été, heureusement, suspendue. Nous demandons, à présent, à ce que le corps de Badr Achouri soit rapatrié, en collaboration avec la Croix-Rouge », révèle El Othmani assurant que la diplomatie marocaine poursuit encore ses tentatives dans ce sens. « Aujourd'hui, la famille Achouri a été accueillie au ministère par son secrétaire général afin de la tenir informée. C'est un devoir que nous avons vis-à-vis des familles et proches des détenus que nous souhaitons transférés au Maroc où ils pourront terminer de purger leur peine mais à proximité de leurs familles », soutient le ministre. L'arbre qui cache la forêt, l'affaire Achouri n'est pas unique, d'autres dossiers notamment celui du détenu Abdeslam Bekkali condamné à 8 ans de prison pour terrorisme devait être relâché en mars 2011 mais il ne l'a pas été. Saad-Eddine El Othmani aura du pain sur la planche.