Dans son récent rapport sur les droits humains, l'ONG Human Rights Watch (HRW), siégeant à New York, constate les avancées du pays en termes des droits de l'Homme mais soulève en outre des irrégularités risquant de sanctionner l'image démocratique du Maroc. « Réagissant aux mouvements pro-démocratie du Printemps arabe et à des manifestations en faveur de réformes au Maroc, le roi Mohammed VI a proposé en juin des amendements constitutionnels contenant d'importantes garanties en matière de droits humains, mais peu de limites véritables à ses propres pouvoirs en tant que souverain. L'électorat a approuvé ces amendements en juillet. » HWR reconnaît par ces constats-là un vent de changement. L'amazighité a été en effet reconnue langue officielle et la détention arbitraire tout comme les traitements inhumains sont désormais interdits par la nouvelle Constitution. La présomption d'innocence et le droit à un procès équitable sont désormais « acquis » Mais, pour l'ONG, ce n'est pas tout. Manifestations: un bilan mitigé Le rapport dresse de prime abord un bilan sur les libertés de rassemblement, d'association et d'expression. Citant la personne de l'année qui n'est d'autre que le M20F, ce dernier a fait preuve de maturité politique et sociale qui n'a pas toujours été bien accueillie par les autorités du pays. « La police a toléré certaines de ces manifestations, mais a parfois attaqué et violemment battu les protestataires… », soulève le rapport. Ce dernier ne rate pas non plus l'occasion de remémorer la tragique mort de « Kamal Ammari suite à un affrontement dans une manifestation le 29 mai à Safi. Il est mort le 2 juin. Une enquête est toujours en cours sur ce cas… », note le rapport. Pour ce qui est du dossier du terrorisme, le rapport cautionne l'attentat d'Argana à Marrakech le 28 avril 2011, « tuant 17 personnes et en blessant des dizaines. Personne n'a revendiqué la responsabilité de cet attentat terroriste, le plus meurtrier commis au Maroc depuis 2003. Le 28 octobre, la chambre spéciale ant-terrorisme de la Cour d'appel de Rabat a déclaré coupables de cet attentat neuf militants islamistes présumés et en a condamné un à mort et les autres à des peines de prison. », remarque le rapport. Mais, si virulente soit-elle, la vague de terrorisme au Maroc est relativement bien assiégée par les autorités. « La police a arrêté des centaines d'autres militants présumés, dont un grand nombre ont été condamnés et emprisonnés, pour avoir appartenu à un «réseau terroriste» ou pour s'être apprêtés à rejoindre le «djihad» en Irak ou ailleurs. », mentionne HRW. Liberté de presse conditionnée Le rapport n'est pas très d'accord avec les méthodes parfois violentes de la justice criminelle. « Il est rare que les tribunaux soient le théâtre de procès équitables dans les affaires ayant des connotations politiques. Les juges ignorent généralement les demandes d'examen médical d'accusés, refusent de faire comparaître des témoins de la défense et prononcent des condamnations sur la base d'aveux apparemment extorqués », soulève le rapport. A part Al Adl Wal Ihssan, mouvement islamiste interdit mais toléré, le droit d'association est garanti du moment que l'idéologie ne remet pas en doute les constantes du pays. Pour ce qui est des droits de la femme, le rapport applaudi la levée des réserves sur les articles 9(2) et 16 de la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes mais la violence conjugale reste toujours à l'ordre du jour. « Le Haut Commissariat au Plan a constaté que 55 % des femmes marocaines incluses dans l'enquête et âgées de 18 à 64 ans, avaient subi des violences familiales lors de l'année 2009; 15 % d'entre elles ont fait état de violences physiques et 48 % de violence émotionnelle. », affirme le rapport. Pour ce qui est du dossier des mineurs employés dans les maisons, « le gouvernement marocain a adopté en octobre un projet de loi qui, s'il est approuvé par le Parlement, alourdirait les sanctions contre les personnes qui violent l'interdiction d'employer des enfants de moins de 15 ans et durcirait les conditions d'autorisation du recrutement d'employés de maison âgés de 15 à 18 ans. », fait remarquer HRW. Enfin, concernant la liberté de la presse, même si Rachid Nini est le seul journaliste emprisonné « pour avoir critiqué le service des renseignements marocains. », le rapport considère que la presse écrite indépendante et les médias en ligne du Maroc peuvent enquêter sur les responsables et les politiques du gouvernement mais s'exposent à des tracasseries et à des poursuites s'ils franchissent certaines limites. ». L'islam, le Sahara et le roi, restent des sujets ultra sensibles. Le rapport clot ses constats sur l'étranger. A l'international, le Maroc est officiellement sur la bonne voie. Pourtant, l'image du pays doit tout de même être applaudie ici plus qu'ailleurs… La presse écrite indépendante et les médias en ligne peuvent enquêter sur les responsables et les politiques du gouvernement mais s'exposent à des tracasseries et à des poursuites s'ils franchissent certaines limites.