Depuis qu'il est nommé chef de gouvernement, Abdelilah Benkirane ne cesse de recevoir des messages de soutien. Le dernier en date émane du bras politique de Al Adl wal Ihssane qui a décidé de quitter le navire du Mouvement 20 février. Un beau cadeau de fin d'année. Les disciples de Abdeslam Yassine ne battront plus le pavé aux côtés des jeunes du Mouvement du 20 février, dont ils forment d'ailleurs le plus gros des troupes. La décision a été prise par le secrétariat général du cercle politique de la Jamaâ. Le chef du gouvernement Abdelilah Benkirane pourrait ainsi commencer son mandat sans trop se soucier des manifestations hebdomadaires des membres du M20F. Un cadeau inespéré. Le timing de ce retrait ouvre la porte à toutes les interprétations. Certains parlent même de « transaction » entre islamistes. Chose que dément Hassan Bennajeh, le chef du bureau du porte-parole de la Jamaâ, Fathallah Arsalen. «Il n'y pas eu de négociations avec le PJD autour de cette question. Nos droits et revendications, partagés par tout le peuple marocain, ne se prêtent à aucune forme de marchandage ». Sur les raisons de ce retrait du Mouvement du 20 février, ce membre de la Jamaâ explique que « depuis dix mois, nous avons constaté que le Mouvement a été la cible de tentatives de récupération et de déviation de ces principes fondamentaux de la part du pouvoir mais également de parties agissant de l'intérieur même du mouvement. Ces manœuvres ont pratiquement le même objectif : cantonner cette dynamique à un rôle purement secondaire et quadriller les revendications de la rue dans un cadre bien précis afin qu'elles ne débordent pas ». « Ce Mouvement n'est pas une marque déposée » Ce retrait sonne-t-il le glas pour le M20F ? « Je ne le crois pas. estime notre interlocuteur. Ce Mouvement n'est pas une marque déposée en notre nom ni, d'ailleurs, d'aucune force politique. C'est une initiative ouverte à toutes les composantes de la société marocaine ». Minimisant l'impact d'une telle décision sur les marches initiées par le M20F, Bennajeh soutient qu'«une partie de la jeunesse de l'association participera toujours aux manifestations du Mouvement». Fin de la lune de miel «Cette décision a été précédée par des appels du pied, publiés dans la presse, émanant de Fathallah Arsalane, porte-parole de la Jamaâ, à l'adresse du pouvoir. C'est dans ce contexte de rapprochement que s'inscrit le retrait des adlistes des activités du M20F. Parallèlement à ces déclarations de bonne intention, nous avons constaté, depuis trois semaines, une faible participation des adlistes aux marches organisées par le Mouvement», explique Nizar Bennamat, membre du M20F. Sur l'impact d'une telle mesure sur l'avenir du Mouvement, Bennamat pense que « ce retrait est bénéfique pour nous, dans la mesure où il incitera nombre de personnes, issues de la classe moyenne et ayant des craintes sur les réels objectifs d'Al Adl wal Ihassne, à nous rejoindre comme c'était le cas au début des marches ». Et d'ajouter que « les effets du retrait des adlistes sont de courte durée, leur nombre lors des premières marches serait moindre comparé aux précédentes mais le retour à la normale ne tardera pas à s'imposer ». Avec ce retrait, c'est toute la politique de rapprochement entre la gauche radicale et Al Adl wal Ihassane qui vient de prendre un sérieux coup. Les marches de dimanche prochain serviront de test pour les autres composantes du Mouvement du 20 février, Annahj Addimocrati notamment. Les amis de Abdellah El Harrif, qualifiés au même titre que les disciples de Abdeslam Yassine de « radicaux », pourrront-ils relever ce défi ? Avec ce retrait, c'est toute la politique de rapprochement entre la gauche radicale et Al Adl wal Ihassane qui vient de prendre un sérieux coup. Depuis des mois, islamistes et gauchistes jouaient parfaitement la même partition. Ils ont boycotté et le referendum sur la Constitution et les législatives anticipées du 25 novembre. Certains « illuminés » de l'extrême gauche avaient même poussé la chansonnette jusqu'à parler d'une alliance avec les « mourides » de Abdeslam Yassine.